En Guinée équatoriale, le triple scrutin de ce dimanche devrait conforter le président, au pouvoir depuis 43 ans, un record de longévité dans le monde.
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Week-end électoral en Guinée équatoriale : ce dimanche 18 novembre, on vote pour la présidentielle, les élections législatives et sénatoriales dans ce petit pays coincé entre le Cameroun et le Gabon.
L’issue de ces scrutins ne fait guère de doute, dans l’un des pays les plus totalitaires du monde : le président Teodoro Obiang devrait repartir pour un sixième mandat de sept ans. Ses deux seuls adversaires, à savoir un opposant autorisé à concourir et un allié du parti au pouvoir, ne sont que là pour la forme.
On surnomme ainsi le pays la "Corée du Nord d‘Afrique". Et pour cause : la Guinée équatoriale est dirigée depuis 43 ans par Teodoro Obiang, qui lui-même était arrivé au pouvoir en renversant son oncle en 1979.
Le président détient ainsi d’un chef d’Etat encore en vie, si l’on ne compte pas les monarchies.
Longévité au pouvoir des présidents africains : Biya et les autres
À 90 ans Paul Biya occupe toujours le fauteuil de président. Il fait partie des chefs d'Etat africains qui ont le plus duré au pouvoir. Voici ces présidents qui battent des records de longévité sur le continent.
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Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, 81 ans
Homme d’État équato-guinéen, il est au pouvoir depuis 1979 et totalise à ce jour, 44 ans de présidence sans partage. Teodoro Obiang Nguema Mbasogo détient le record absolu de longévité au pouvoir en Afrique. Son fils, Teodorin Nguema Obiang, assure la fonction de vice-président et part favori pour succéder à son père. Il a été condamné en France pour blanchiment d'abus de biens sociaux.
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Paul Biya, 90 ans
Président du Cameroun depuis novembre 1982, il comptabilise 41 ans de vie présidentielle. Il est le doyen des présidents d’Afrique en termes d’âge. Paul Biya a réussi à s'assurer la loyauté de l'armée alors que son pays traverse une crise sécuritaire avec la rébellion anglophone et les attaques de Boko Haram dans l’extrême nord. Le régime de Paul Biya est souvent décrit comme autoritaire.
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Denis Sassou-Nguesso, 79 ans
Il cumule 38 années de pouvoir au Congo. Il a été président de 1979 à 1992 à l'époque où le pays s'appelait la République Populaire du Congo, avant de revenir à la tête du pays en 1997. Sa réélection en 2016 ne s'est pas faite sans contestation. Denis Sassou-Nguesso écrase toute opposition. Ses enfants, Denis Christel et Claudia sont accusés de détournement et de blanchiment d’argent.
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Yoweri Museveni, 79 ans
En Ouganda, il verrouille lui aussi son emprise, qu’il exerce depuis 1986. Yoweri Museveni totalise 37 ans de règne sur le pays. La Constitution ougandaise a été modifiée afin de supprimer la limite d’âge de 75 ans maximum pour exercer la fonction de président de la République. Le président Museveni compte briguer un 6e mandat en 2021. Le chanteur populaire Bobi Wine est son principal adversaire.
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Issayas Afewerki, 77 ans
Président de l’Érythrée depuis l’indépendance du pays en 1993. Dès le début de son mandat, Issayas Afewerki instaure un régime de parti unique, sans élections. Mais c'est surtout après la deuxième guerre contre l’Éthiopie, de 1998 à 2000, qu'il fait basculer son pays dans la dictature, jusqu'à faire considérer son pays comme "la Corée du Nord de l’Afrique". Il règne sur l’Érythrée depuis 30 ans.
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Paul Kagame, 66 ans
Le président rwandais dirige d'une main de fer depuis 23 ans. Paul Kagame est venu de l'Ouganda en libérateur au moment où le Rwanda sombrait dans le génocide. Il est adoubé par une grande partie des Rwandais pour les progrès attribués au pays. Certains le présentent comme un "dictateur bienveillant" qui lutte pour le développement du pays mais qui ne tolère pas la liberté d'expression.
Image : picture-alliance/C. Ndegeya
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L’opposition n’est qu’une opposition de façade. Longtemps parti unique, le Parti démocrate de Guinée équatoriale, n’a de “démocrate” que le nom. Le PDGE dirige une coalition de 14 partis satellites, et détient 99 des 100 sièges à l’Assemblée ainsi que la totalité du Sénat.
Et pour ne rien laisser au hasard, comme avant chaque élection, le régime a mené une campagne d’arrestation d’opposants ces dernières semaines, en les accusant de complot. Amnesty International a récemment dénoncé des détentions arbitraires, des tortures et disparitions forcées.
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Jet-set et corruption
Les scrutins de dimanche semblent donc n’être qu’une formalité. Teodoro Obiang a remporté toutes ses élections passées avec plus de 90% des voix.
Jusqu’à peu, on le pensait toutefois être prêt à passer la main à son fils, le numéro 2 du régime, surnommé Teodorin. "Il règne une agitation au sein du clan", assure Ana Lucia San, une chercheuse en politique, dans une interview à la DW. Le président a 80 ans, et "on ne sait pas à quoi va ressembler l’avenir après lui".
Mais Teodorin est connu pour son train de vie luxueux et son goût pour les belles voitures. Un style de jet-setteur qui contraste avec celui de son père, très austère.
Les récentes affaires judiciaires à l’étranger de l'héritier naturel auraient poussé le clan à temporiser cette succession, d’autant que le pays est devenu plus dépendant des financements extérieurs, notamment à cause de la chute de ses revenus tirés des hydrocarbures.
Plus largement, la Guinée équatoriale est considérée comme l’un des pays les plus corrompus au monde, classé 172e sur 180 par Transparency International.
Ces dirigeants qui vivent dans le luxe
Le président russe Vladimir Poutine se voit accusé d'avoir un palais luxueux et secret au bord de la Mer Noire. Mais il est loin d'être le seul dirigeant dans le monde à vivre dans le faste.
Image : DW/J.J. Hörn
250 salles de bain pour le sultan du Bruneï
Bandar Seri Begawan, la capitale du Bruneï, abrite le plus grand palais du monde: Istana Nurul Iman. Depuis 1984, il est le lieu de résidence officiel du sultan. 1.800 pièces réparties sur une surface habitable de 200.000 m², 18 ascenceurs, 250 salles de bain, une coupole dorée au-dessus de la mosquée privée du souverain. Pour un coût de plus d'un milliard de dollars.
Image : Albert Nieboer/RoyalPress/dpa/picture alliance
Illuminé la nuit et ouvert au public
Le chantier du Rashtrapati Bhavan (maison du président en hindi) a duré 17 ans. Depuis 1950, ce palais est la résidence du président de l'Inde. Il compte quatre étage et 340 pièces. Mis bout à bout, ses couloirs font 2,5 km de long et son jardin est plus grand qu'une centaine de terrains de foot. Le tout a été construit sur les deniers publics mais on peut au moins le visiter.
Image : Mayank Makhija/NurPhoto/picture alliance
Une mer de coupoles blanches
En plein centre d'Abu Dhabi, le palais Qasr-al-Watan fait 380.000 m². Il abrite le gouvernement. Le président et le prince héritier y ont leur bureau et y reçoivent les invités d'Etat étrangers. Les portes sont recouvertes à la feuille d'or, les murs sont en marbre, des mosaïques colorées ornent ce palais qui est aussi ouvert aux visiteurs.
Image : Erich Meyer/euroluftbild.de/picture alliance
Première fortune foncière du Royaume Uni
La reine d'Angleterre a une fortune personnelle estimée à plus de 400 millions d'euros et elle possède deux châteaux privés, Balmoral et Sandringham, qui valent à eux deux environ 350 millions d'euros. Sans compter les fortunes de son époux, le prince Philip et de leurs enfants. Dans le royaume, la frontière public-privé est floue quand il s'agit de la richesse des souverains.
Image : picture alliance/Photoshot
L'autre Maison Blanche... des superlatifs
Au Tadjikistan, le président loge au Kohi Millat. Ce palais est situé dans la capitale et à côté est planté un immense mât sur lequel flotte un drapeau, à 165 mètres de hauteur. Mais le faste des résidences de chefs d'Etat devient surtout problématique quand ceux-ci confondent argent public et propriété privée.
Image : Halil Sagirkaya/AA/picture alliance
La méga-résidence de Vladimir Poutine
Vladimir Poutine aurait fait construire cette villa folle avec de l'argent public. C'est ce qu'affirme dans une vidéo la fondation anti-corruption d'Alexeï Navalny. La propriété serait 40 fois plus grande que la principauté de Monaco. Elle aurait coûté 1,1 milliard d'euros... et aurait été financée par des fonds appartenant à des entreprises publiques.
Image : Navalny Life youtube channel/AP Photo/picture alliance
Erdogan au bord du Lac de Van
La Turquie traverse une crise économique. Mais le président Recep Tayyip Erdogan fait construire des palais comme celui en bordure du Lac de Van. Des médias turcs évaluent les coûts de sa construction à plus de 14 millions d'euros - financés sur de l'argent public. Un tribunal avait ordonné l'arrêt du chantier mais le président a promulgué un décret pour le poursuivre.
Le 14 janvier 2011, Ben Ali fuyait la Tunisie sous la pression de la rue. La famille du président tunisien déchu possédait un patrimoine important, notamment en France, géré par le milliardaire Aziz Miled.
Image : Imago
La douzaine de palais du roi du Maroc
Outre ses palais au Maroc, la famille royale marocaine possède plusieurs biens immobiliers à l'étranger. Par exemple le château de Betz, au nord de Paris ou un hôtel particulier tout près de la Tour Eiffel, acquis en 2020 pour 80 millions d'euros. La douzaine de palais de la famille royale coûtent environ 1,2 millions d'euros par jour aux contribuables marocains.
Image : Klaus Rose/dpa/picture alliance
La famille Sassou Nguesso aime la France
Le président de la République du Congo, Denis Sassou Nguesso, "utilise", entre autres biens immobiliers en France, les 485 m² de la Villa Suzette, au Vézinet, près de Versailles, qui appartenait à son frère, puis à une société luxembourgeoise aux actionnaires anonymes. Son épouse Antoinette et leurs enfants Denis Christel et Julienne possèdent plusieurs appartements et hôtels particuliers à Paris.
Image : picture-alliance/dpa/Witt
Avenue Foch à Paris, une adresse de Teodorin Obiang
Les noms d'Omar Bongo et son épouse, Jeff Bongo [un des fils], du frère de Denis Sassou Nguesso, d'un neveu du président congolais, Wilfrid, et de Chantal Compaoré [épouse de l'ex-président burkinabè] apparaissent dans 34 procès-verbaux de l'Office central pour la répression de la grande délinquance financière en France, datés de 2007.
Image : Getty Images/AFP/E. Feferberg
Teodorin Obiang Nguema, visage des "biens mal acquis"
La condamnation du fils du président de Guinée équatoriale, Teodorin Obiang Nguema, a été alourdie en appel à Paris, en février 2020 : trois ans de prison avec sursis et le remboursement de 30 millions d'euros pour détournement de fonds publics. Egalement vice-président de son père, Teodorin mène une vie de jet-set et possède des appartements dans des quartiers chics de Paris.
Image : AFP/J. Leroy
Les maisons de la famille d'Ali Bongo Ondimba
Le président du Gabon avait lancé l'opération "Mamba" contre la corruption. Mais entre la fin du mandat de son père Omar et le début du sien, entre 2006 et 2012, environ 2.700 milliards de francs CFA ont disparu des caisses de l'Etat. En tout cas, la famille Bongo détient entre 10 et 30 appartements, des hôtels particuliers, des villas de luxe, notamment à Paris et dans le sud de la France.
Image : Getty Images/AFP/S. Jordan
Le Palais de l'Unité à Yaoundé, au Cameroun
Ça, c'est le Palais de l'Unité, celui du président du Cameroun. Le président Paul Biya est visé par une plainte de "recel de détournements de fonds publics" en France. Le chef de l'Etat camerounais possède aussi un château rue de Lausanne à Genève.
La villa de Jacob Zuma à Nkandla a créé le scandale
Jacob Zuma, qui a fait deux mandats à la tête de l'Afrique du Sud, a fait construire une villa dans son village natal de Nkandla. Au terme d'une longue procédure judiciaire, l'ex-président a été condamné à rembourser 500.000 euros au Trésor public car une partie au moins des fonds employés pour la construction de cette villa appartenait à l'Etat.
Image : Getty Images/AFP/M. Longari
Et Mandela dans tout ça?
Ceci est la maison de Nelson Mandela à Qunu. L'ancien président sud-africain possédait aussi une villa dans la réserve de Shambalala, dont des chambres sont désormais louées aux touristes pour plusieurs centaines d'euros la nuit. Par ailleurs, le couple Mandela n'a jamais dû rendre de compte sur les frais de ses voyages pour se rendre dans sa villa privée de Maputo, au Mozambique.
Image : Reuters
Gbadolite, un palais de Mobutu parmi d'autres
L'ex-président Mobutu (actuelle RDC) possédait de nombreux biens immobiliers. Au Congo, bien sûr, mais aussi en France, comme le Domaine des Miguettes à Savigny, revendu en 2016 pour plus de 550 millions d'euros.
Image : picture alliance/AP Photo/H.Hranjski
Une liste non-exhaustive
Les noms cités dans ce portfolio résultent d'un choix incomplet... D'autres dirigeants de par le monde sont soupçonnés de détourner des fonds publics pour améliorer leur train de vie (notamment en acquérant des logements de luxe). Parmi les familles que nous évoquerons la prochaine fois : celle de Yahya Jammeh (Gambie), les Dos Santos (Angola), des dirigeants algériens de l'ère Bouteflika, etc...
Image : picture-alliance/AP Photo/J. Delay
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Près de 80% des 1,4 millions d’habitants vivraient sous le seuil de pauvreté. Une gageure quand on est le troisième producteur de pétrole d’Afrique après le Nigeria et l’Angola.
Mais seules quelques familles se partagent le butin. Comme le résume le défenseur des droits humains équato-guinéen Tutu Alicante, le pays est "un exemple parfait d’appropriation d’un Etat : une famille a infiltré toutes les institutions étatiques, la justice ne fonctionne pas, il n’y a pas de législateur et pas de société civile".