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HistoireAfrique

Les 140 ans de la conférence de Berlin sur l'Afrique

15 novembre 2024

La conférence de Berlin de 1884 passe pour avoir été celle où les Européens se sont partagés l'Afrique et ses ressources. La réalité historique est plus complexe, même si la réunion a posé les jalons d' un accaparement.

Illustration de la Conference de Berlin (1884-1885) avec des hommes autour d'une table
Aucun représentant de l'Afrique n'avait été invité à prendre part à la conférence de BerlinImage : akg-images/picture-alliance

Le 15 novembre 1884 a débuté la conférence de Berlin. Jusqu'à la fin du mois de février 1885, le chancelier Bismarck invite des émissaires des puissances impérialistes d'Europe, des Etats-Unis et de l'Empire ottoman, venus dans la capitale allemande pour s'accaparer les matières premières des autres continents et s'assurer des appuis stratégiques… sans consultation des populations concernées, notamment en Afrique.

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Vérité arrangée

La conférence de Berlin reste d'abord l'un des emblèmes de la politique de colonisation occidentale. Pendant longtemps, l'image véhiculée est celle d'une conférence durant laquelle les Occidentaux se partagent le continent africain et ses ressources.

Mais la réalité est plus complexe que cela. C'est ce qu'expliquait l'historienne Camille Lefèbvre (Institut des mondes africains), en 2010, sur notre antenne :

"La conférence de Berlin est ce qu'on peut appeler un mythe", expliquait alors la chercheuse au micro de Carine Debrabandère. "C'est-à-dire qu'on a construit, dès les années 1880, l'idée qu'on avait partagé l'ensemble du continent africain lors de cette conférence. Or, ce n'est pas du tout vrai si on regarde les textes et la réalité de ce qui s'est passé à l'époque : il n'y a pas eu de partage de l'Afrique lors de la conférence de Berlin."

Pas de tracé de frontières à Berlin, donc. C'est plus tard, au fil des années, que les puissances occidentales passent des accords avec des chefs locaux et ratifient des accords bilatéraux pour définir les frontières de leurs sphères d'influence.

Organiser l'accaparement des richesses

Mais la conférence de Berlin pose bien les jalons d'un mécanisme pernicieux d'appropriation des richesses puis des terres.

Dans la même archive que celle citée plus haut, Jakob Vogel, un professeur qui enseignait alors l'histoire à l'Université de Cologne, détaillait le processus en ces termes : "On donne d'abord à une compagnie privée ou à des commerçants un droit spécial qui lui permet de travailler, de faire du commerce avec telle ou telle région. Et c'est seulement au fil du temps, dans les années 1880 ou 1890, que les Etats européens ont pris de plus en plus en main, avec leurs propres militaires, avec leur propre administration, des colonies privées."

L'objectif premier du chancelier Bismarck, en 1884, c'est avant tout d'organiser l'équilibre entre les puissances européennes, pour éviter la guerre sur fond de rivalités en Afrique.

Ainsi, l'acte général ratifié à Berlin stipule que toute puissance européenne installée sur une côte, en Afrique, a le droit de poursuivre son expansion vers l'intérieur du continent… jusqu'à rencontrer une autre sphère d'influence (sous-entendu : occidentale).

Mémoire de l'humanité

Et cette histoire "d'agression collective contre les peuples d'Afrique et d'Asie", il faut l'enseigner, de l'avis d'Alexandre Kum'a Ndumbe III, de l'Université Yaounde I, dans l'émission de Carine Debranbandère précitée.

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"Je crois que la stratégie européenne était de faire en sorte que la mémoire africaine soit effacée et ne s'oriente qu'avec des pseudo-repères européens. Pseudo-repères puisqu'ils ne vivent pas en Europe", précise-t-il.

"Pour nous, le travail fondamental est d'œuvrer à ce que l'Africain récupère sa mémoire, mais l'Européen aussi. Parce que l'Européen, on lui a effacé une bonne partie de sa mémoire aussi. L'Européen ne sait même pas ce qu'on a fait en son nom."

140 ans après la conférence de Berlin, les débats historiques et politiques continuent, sur la colonisation. Notamment ceux qui portent sur l'ampleur de la "dette" contractée par les colonisateurs auprès des peuples colonisés – et sur les modalités de son remboursement.

Svenja Schulze, la ministre allemande au Développement, appelle aussi, en 2024, à se confronter au colonialisme et à son héritage, à en tirer les leçons pour établir des relations équitables et un véritable partenariat avec l'Afrique.

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