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En Allemagne, l'affaire Oury Jalloh reste non élucidée

Marco Wolter | Avec ARD
7 janvier 2025

Il y a 20 ans, ce demandeur d’asile de Sierra Leone a été retrouvé mort dans la cellule d’un commissariat de police allemand, le corps brûlé.

Une cellule de prison, des carrelages au mur, un mannequin représentant Oury Jalloh est couché sur un matelas, les pieds et mains attachés. Un homme enquête.
La cellule de dégrisement reconstituée dans laquelle le corps d'Oury Jalloh a été retrouvé Image : picture-alliance/ dpa

Il y a 20 ans exactement, le 7 janvier 2005, Oury Jalloh, un demandeur d'asile de Sierra Leone, était retrouvé mort dans la cellule d'un commissariat de police allemand, le corps brûlé. Les circonstances de son décès, survenu à Dessau, dans l'est de l'Allemagne, n'ont jamais été élucidées.

Sa famille, des avocats et des ONG estiment qu'Oury Jalloh a été tué par la police, mais l'enquête a été refermée, sans pour autant être parvenue à lever tous les doutes.

20 ans plus tard, l'affaire reste considérée comme l'un des plus grands scandales policier et judiciaire de l'après-guerre en Allemagne. 

Retour sur les faits

Le 7 janvier 2005, Oury Jalloh, 30 ans, est arrêté en état d'ivresse après avoir harcelé plusieurs femmes et résisté aux forces de l'ordre dans les rues de Dessau, dans l'est de l'Allemagne, selon la police.

Emmené au poste de police de Dessau, il est enfermé dans une cellule de dégrisement située au sous-sol. Quelques heures plus tard, son corps brulé et inanimé est retrouvé dans sa cellule. Couché sur un matelas, ses mains et ses pieds sont attachés à son lit.

Depuis, l'affaire n'a jamais été totalement élucidée. La question est de savoir si Oury Jalloh a lui-même mis le feu à son matelas avec un briquet, comme les autorités chargées de l'enquête l'ont longtemps supposé, ou si des policiers l'ont tué.

Chaque année, des manifestants protestent le 7 janvier à Dessau pour soutenir la famille d'Oury Jalloh

L'hypothèse d'une intervention de l'extérieur

Lors du premier procès, les deux agents en service mis en cause ont finalement été acquittés. Le tribunal n'avait pas été en mesure d'éclaircir les circonstances "malgré les efforts les plus intensifs", expliquait la justice à l'époque.

Un nouveau procès va conduire à la condamnation d'un responsable de la police de Dessau pour homicide involontaire, supposant que la cellule aurait dû être mieux surveillée. Ce verdict appuie la thèse selon laquelle le Sierra-Léonais aurait lui-même incendié son matelas.

D'autres expertises et rapports qui iront dans le sens de l'implication de tierces personnes, d'autant que son état de lucidité et les attaches au matelas n'auraient pas permis à Oury Jalloh de mettre le feu à sa cellule.

Des experts ont tenté de reconstituer les faitsImage : Mario Pfeifer

Racisme au sein de la police de Dessau

L'enquête est toutefois refermée en 2017, la fin de l'investigation finit par être confirmée par la Cour constitutionnelle.

Et malgré ce rebondissement en 2018, après la nomination par les autorités politiques régionales d'enquêteurs spéciaux. Ceux-ci font état de racisme au sein de la police de Dessau. Ils soulignent des manquements de taille, lors de l'arrestation d'Oury Jalloh. Par exemple, un gardien aurait dû être assis devant la cellule de dégrisement pour intervenir en cas d'étouffement, le Sierra-Léonais étant attaché à son lit.

Plusieurs fois, la version officielle sera remise en question, le travail d'enquête épinglé dans des reportages d'investigation. De nombreux documentaires ont depuis été consacrés à la mort d'Oury Jalloh. 

Mais à la fin, on ne connaît toujours pas toute la vérité. 

20 ans plus tard, des manifestants se sont une fois de plus réunis hier à Dessau, pour continuer à dénoncer le travail de la justice, de la police et l'opacité dans cette affaire.