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La Cédéao célèbre ses 50 ans sur fond de crise

Mohamed Touré | Avec agences
28 mai 2025

L’organisation peine à mettre en place la charte de la démocratie et reste marquée par le départ de trois pays membres : le Mali, le Niger et Burkina Faso.

Le drapeau de la Cédéao
Un vent nouveau souffle sur la Cédéao depuis le départ de certains paysImage : FRANCIS KOKOROKO/REUTERS

Les dirigeants de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) se réunissent mercredi (28.05.2025)à Lagos, au Nigeria, pour célébrer le 50e anniversaire de l'organisation.

Cette célébration intervient à une période trouble pour la Cedeao, autrefois saluée comme un pilier de stabilité dans la région. Le bloc ouest-africain est désormais profondément divisé, après le départ en début d'année de l'organisation de trois États dirigés par des juntes militaires: le Mali, le Burkina Faso et le Niger.

La Cédéao fait également face à une recrudescence des violences jihadistes, alimentées par des tensions internes entre États membres, notamment dans le Sahel et la région du lac Tchad. Le Bénin et le Nigeria ont été frappés par une série d'attaques ces derniers mois.

Le Sahel a d'ailleurs été classé en 2024 comme l'épicentre mondial du "terrorisme" pour la deuxième année consécutive, concentrant plus de la moitié des décès liés à des attentats dans le monde, selon l'Indice du terrorisme mondial publié en mars.

Il n'est pas exclu qu'ils reviennent un jour, il faut discuter", Lansana Kouyaté (Ancien Premier ministre guinéen)

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"Ceux qui sont partis pourraient revenir"

Le général Yakubu Gowon, cofondateur de l'organisation et ancien chef militaire nigérian, s'est montré confiant quant au retour du trio au sein de la Cedeao devant une assemblée réunie dans un hôtel à Lagos mercredi.

"Nos nations soeurs qui ont choisi de quitter la communauté pourraient, avec le temps, reconsidérer leur décision, car les liens historiques, culturels et de destinée commune demeurent intacts", a-t-il expliqué.

"Je suis convaincu qu'avec de la bonne volonté et un engagement sincère, elles trouveront une raison de revenir dans la famille de la Cedeao, plus fortes, plus unies et déterminées à réaliser notre vision commune pour l'Afrique de l'Ouest", a ajouté le général Yakubu Gowon.

Le ministre des Affaires étrangères du Nigeria, Yusuf Tuggar, a également déclaré être convaincu que les trois pays ayant formé l'Alliance des États du Sahel (AES) "reviendront à l'avenir".

Joint par la DW, Lansana Kouyaté, ancien secrétaire exécutif de la Cédéao et ancien Premier ministre guinéen, est lui aussi optimiste. Pour lui, il est normal que ce type d’institution passe par des périodes de crise.

"L'un des problèmes des organisations sous-régionales, c'est de ne pas souvent faire l'évaluation. Je crois de temps en temps il faut évaluer où sommes nous, qu'est ce qui menace ? Essayons de réorienter. Si vous ne le faites pas, le temps passe et vous vous trouvez en porte à faux avec la réalité du moment", dit l'homme politique guinéen. Cliquez sur l'image ci-dessus pour écouter son interview.

La Cédéao est fragilisée par le départ de trois de ses pays membresImage : Ubale Musa/DW

La démocratie fragilisée dans la sous-région

Au cours de la dernière décennie, les coups d'État et les tentatives de déstabilisation politique, nourris par une défiance populaire croissante envers les élites politiques, ont ébranlé près de la moitié des pays fondateurs de la Cedeao, mettant à mal la démocratie et fragilisant les liens entre pays voisins.

Le départ du Mali, du Burkina Faso et du Niger a porté un coup dur à la crédibilité et à l'influence régionale de l'organisation, selon plusieurs experts.

"C'est une atteinte majeure à la capacité de la Cedeao à incarner les espoirs et l'optimisme de ses débuts", estime Kwesi Aning, spécialiste de la coopération internationale au Centre international de formation au maintien de la paix Kofi Annan, basé à Accra, au Ghana.

Parmi les premières économies du continent africain, pays le plus peuplé de la région, le Nigeria qui assure actuellement la présidence de la Cédéao était attendu comme la "force stabilisatrice" de l'organisation, mais il est "vacillant" aujourd'hui, selon un rapport publié mercredi par le cabinet de conseil en risques SBM Intelligence.

"Ses crises internes, notamment la mauvaise gestion économique, l'instabilité politique, l'insurrection de Boko Haram et les échecs de gouvernance, ont considérablement réduit sa capacité à diriger", indique le rapport.