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ConflitsUkraine

L'Allemagne réduit de moitié son aide militaire à l'Ukraine

18 juillet 2024

Dans son projet de budget 2025, le gouvernement allemand prévoit 4 milliards d'euros au lieu de presque 8 milliards actuellement pour aider militairement l'Ukraine.

Volodymyr Zelensky se tient au garde-à-vous à coté de soldats
Image : Ukraine Presidency/Ukrainian Pre/ZUMAPRESS/picture alliance

Le soutien de l'Allemagne est-il en train de vaciller, alors que la guerre de la Russie contre l'Ukraine est dans sa troisième année ? Ulrike Franke est spécialiste des questions de sécurité et de défense allemande et européenne au Conseil européen des relations internationales et s'exprimait sur la DW ce jeudi 18 juillet.

"Comme dans tous les budgets, il faut faire des choix"

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DW : La baisse du budget de l'aide militaire allemande est-elle un signal inquiétant pour l'Ukraine ?

Ulrike Franke : Certainement qu'à Kiev, ils n'ont pas de raison d'être contents. Après, les Allemands vont nous dire qu'il y a des raisons pour ça et que ça ne veut pas forcément dire qu'on donne moins, mais que ça vient par des voies différentes. Les crédits du G7 ont été mentionnés, le support de l'Union européenne [notamment l'argent récupéré du gel des avoirs russes, ndlr], ce genre de choses. Mais oui, enfin, quand on voit ça à Kiev, c'est clair que ce n'est pas une bonne nouvelle. C'est moins que ce qu'ils aimeraient voir.

DW : Cette décision, elle est motivée par les économies que doit faire le gouvernement allemand où est-ce qu'il y a autre chose derrière?

Le ministre de la Défense Boris Pistorius ne décolère pas : le budget 2025 lui accorde 6,5 milliards de moins que ce qu'il avait espéréImage : Christian Ditsch/epd

Ulrike Franke : A priori, d'après ce que j'entends, c'est vraiment une question d'argent. Comme dans tous les budgets, il faut faire des choix de ce qu'on veut et de ce qu'on peut faire. Et là, il y a plein de choses que, à priori, ce gouvernement aurait bien aimé faire. Et d'ailleurs ce n'est pas un secret du tout que le ministre de la Défense allemand Pistorius aurait aussi aimé beaucoup plus d'argent pour son propre budget, pour les forces armées allemandes de la Bundeswehr, il ne l'a pas eu.

Ce n'est pas parce que le chancelier ou le gouvernement croit que ce n'est pas nécessaire, mais ils ont fait le choix que finalement, ce n'est pas aussi nécessaire que d'autres choses.

DW : Que représentent ces 4 milliards ? Est-ce que ça compromet d'éventuelles livraisons allemandes d'équipements de défense ?

Ulrike Franke : Là, il n'est pas encore dit ce que ça inclut, parce que c'est juste le budget, c'est juste un nombre. Mais cela concerne le soutien allemand pour l'Ukraine. Après, on sait bien que ce genre de choses se décide parfois à relativement court terme, parce qu'il y a une urgence, il y a des choses qui deviennent possibles qui n'étaient pas possibles avant.

DW: L'Allemagne est quand même le deuxième contributeur d'aide militaire à l'Ukraine, après les États-Unis. On sait que Donald Trump a déjà signalé qu'il mettrait fin à l'aide américaine s'il était élu. Est-ce que le soutien à l'Ukraine est en train de vaciller, vu aussi la tournure que prend la guerre en Ukraine ?

Selon Ulrike Franke, le soutien de l'Allemagne à l'Ukraine est encore intactImage : Fabian Bimmer/AFP/Getty Images

Ulrike Franke : A priori, la volonté de soutenir l'Ukraine de ce gouvernement et de la population allemande reste relativement élevée. A priori, l'Allemagne a compris que soutenir l'Ukraine, on ne le fait pas juste parce que c'est "the right thing to do", la chose qu'il faut faire, disons moralement, mais aussi parce que c'est dans notre intérêt.

Bien entendu, il y a des voix qui voient ça différemment. Il y a de temps en temps des gens qui disent "on veut faire ça autrement", mais je ne vois pas un vrai changement en ce qui concerne la volonté de l'Allemagne de soutenir l'Ukraine. Mais bien entendu, il y a toujours cette question de jusqu'à quand on veut faire cela. Est-ce qu'il y a une limite ? Est-ce qu'on peut se permettre de faire ça  pendant des années et des années ? Chaque année, on va devoir renégocier exactement cette question. Donc, ce n'est jamais décidé pour toujours.

DW : Mais avec le soutien américain qui est complètement remis en cause, ça change quand même la donne pour l'Allemagne aussi et pour les Européens...

Ulrike Franke : Oui mais franchement là on sait pas encore. A priori, les Allemands espèrent que Donald Trump ne sera pas réélu. Et que si jamais il était réélu, que finalement il changera d'avis parce que ce n'est pas du tout clair, ce n'est pas un politicien normal qui dit une chose et le fait après. On ne sait rien de ce qu'il ce qu'il va faire. Donc je crois qu'en Allemagne, à Berlin, l'espoir c'est qu'il ne soit pas réélu. Et si jamais il est réélu, qu'on puisse le convaincre que soutenir  l'Ukraine, c'est aussi dans l'intérêt américain.

L'administration de Joe Biden soutient l'Ukraine, mais en cas de victoire de Donald Trump en novembre, les cartes risquent d'être rebattuesImage : Kay Nietfeld/picture alliance/dpa

DW : Et du côté ukrainien, est-ce que l'appel qu'a lancé Volodymyr Zelensky, le président ukrainien, en début de semaine à un sommet pour la paix, à des discussions avec Moscou ne montre pas qu'on n'est pas justement en train de préparer cette éventualité ?

Ulrike Franke : Bien sûr qu'ils ont peur. Ils ont peur que ce soit Donald Trump qui soit élu et de ce qu'il ferait... On ne sait pas d'ailleurs. Mais il a eu des idées très problématiques pour l'Ukraine. Donc oui, l'idéal serait justement de finir cette guerre avant l'élection de Donald Trump. Mais ce n'est pas comme si l'Ukraine pouvait vraiment influencer ça, c'est la Russie. Et la Russie a bien entendu tout intérêt à ne pas le faire.

Appel de l'Otan

Preuve que l'hypothèse d'un retour de Donald Trump aux affaires aux Etats-Unis inquiète : le secrétaire général de l'OTAN Jens Stoltenberg a justement appelé Washington à maintenir son soutien à l'Ukraine. Selon lui, "il est dans l'intérêt des Etats-Unis, y compris pour leur sécurité, de soutenir l'Ukraine", car "si le président Poutine gagne en Ukraine, ce sera non seulement une tragédie pour les Ukrainiens, mais cela rendra aussi le monde plus dangereux et plus vulnérable", a-t-il déclaré.

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