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La Belgique ne présentera pas d'excuses pour la colonisation

22 décembre 2022

La commission spéciale "passé colonial", composée de 19 députés, n'a pas dégagé de consensus sur la question des excuses officielles pour les crimes commis entre 1885 et les indépendances au Rwanda, au Burundi et en RDC.

Le roi Philippe de Belgique en visite au Mémorial aux anciens combattants, à Kinshasa, en juin 2022
En visite à Kinshasa, le roi Philippe de Belgique a répété ses "plus profonds regrets"Image : Benoit Doppagne/BELGA/IMAGO

La Belgique ne présentera pas d'excuses officielles pour les crimes commis durant l'ère coloniale.

La commission spéciale "passé colonial", composée de 19 députés, n'a pas permis de trouver de consensus sur la question. Les parlementaires ont travaillé pendant deux ans pour exposer les exactions commises en RDC, le Burundi et le Rwanda, et étudier les conséquences du colonialisme aujourd'hui, telles que le racisme. Cette commission a permis des avancées majeures mais aussi pourquoi elle se solde, aux yeux de certains, par un échec.

Un travail de longue haleine

La commission devait formuler des recommandations au Parlement.

Pendant plus de deux ans, son travail s'est déroulé en quatre grandes phases : d'abord la connaissance de ce qui s'est passé durant la colonisation belge, c'est-à-dire de 1885 aux indépendances des années 1960.

Grâce à un travail sur des archives, d'audition de victimes directes et de leurs descendants, les crimes perpétrés au Rwanda, en RDC et au Burundi ont pu être établis.

"Les excuses sont la base sur laquelle on peut bâtir de nouvelles relations", estime Marianne Ballé MoudoumbouImage : Benoit Doppagne/BELGA/dpa/picture alliance

La deuxième phase était celle de reconnaissance officielle de ces atrocités par le Parlement. Ensuite est venue l'étape de l'établissement des responsabilités, avec une réflexion sur le rôle de l’Etat, Eglises, mais aussi d’entreprises privées qui se sont accaparé dans la brutalité les ressources des pays colonisés et se sont livrés à des violences systématiques envers la population civile.

Mais c'est sur les excuses de l'Etat belge que la négociation politique a achoppé, comme l'explique Valérie Rosoux. Directrice de recherche au Fonds de la recherche scientifique et professeure à l'université de Louvain, en Belgique, elle a suivi de près les travaux de la commission et rappelle que des excuses ont déjà été formulées par le passé pour des cas particuliers, ainsi que les "les plus profonds regrets" du roi Philippe, à Kinshasa, en juin dernier.

Valérie Rosoux relate toutefois qu'"au sein de plusieurs partis politiques, la peur était que prononcer des excuses risquait d'entraîner une multiplication de procès pour dommages et intérêts et donc le risque de devoir réparer avec des compensations financières."

Excuses et/ou dédommagements

Valérie Rosoux et d'autres experts font pourtant valoir que le fait de présenter des excuses n'était pas lié, d'un point de vue juridique, au versement de dédommagements.

Aux Pays-Bas, le Premier ministre a présenté par exemple des excuses pour le rôle de l'Etat néerlandais dans l'esclavage sans prendre d'autres engagements. L'Allemagne a aussi reconnu le génocide des Héréros et des Namas sans verser de compensations.

Interview de Marianne Ballé Moudoumbou

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Déception

Les militants antiracistes sont déçus de ce refus d'excuses officielles de la Belgique, tout comme une partie de la gauche et du reste de la société belge... et même au-delà.

En Allemagne, Marianne Ballé Moudoumbou, porte-parole de l'organisation PAWLO-Masoso (Pan-african Women Empowerment and Liberation Organization Masoso), estime que les excuses des anciennes puissances coloniales sont essentielles dans le processus de réparation. "C'est tout un cortège d'atrocités qui sont à peine descriptibles et qui amène des traumatismes transmis de génération en génération, déclare-t-elle. Si ce processus n'est pas engagé, cela veut dire que de nouvelles relations ne peuvent pas s'établir."

Ecoutez ci-dessus l'entretien avec Marianne Ballé Moudoumbou

Malgré tout, le travail de restitution d'œuvres pillées, comme les bronzes du Royaume de Benin, l'écoute des victimes, le travail sur les archives historiques, les mouvements de protestation, aussi, dans l'espace public, permettent de faire avancer la réflexion. Et la société dans son ensemble, au fil des générations. 

Valérie Rosoux estime que ce n'est que le début d'un mouvement de fond, "comme une vague", qui va continuer.

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