La Côte d'Ivoire secouée par un scandale financier
5 janvier 2024En Côte d'Ivoire, pour se faire établir une pièce nationale d'identité, il faut être Ivoirien et fournir un extrait de naissance, un certificat de nationalité et la carte nationale d'identité de l'un des deux parents, puis payer la somme de 5000 francs CFA sur une plateforme Mobile money.
Pour le passeport, ce sont les mêmes documents qu'il faut fournir. Sauf que le coût est plus élevé.
"En ce qui concerne donc le passeport, il faut s'acquitter d'un droit de timbre qui s'élève à 40.000 francs CFA qu'on paie dans une banque. Le grand public se dit que cet argent rentre dans les caisses de l'État. Mais manifestement non", a déploré le journaliste André Sylvère Konan.
La société du président de l'Assemblée nationale
La concession de l'établissement des cartes nationales d'identité a été confiée à l'Office national de l'État civil et de l'identification de Côte d'Ivoire. Pour ce qui est du passeport, c'est l'homme d'affaires Adama Bictogo, aujourd'hui président de l'Assemblée, qui détient le marché depuis une quinzaine d'années.
"Pour ceux de quarante mille francs, le droit de timbre de l'État est en réalité fixé à 15.000 francs CFA. Donc, ce sont moins de 50 % qui sont reversés à l'État de Côte d'Ivoire. Et qui est censé être collecté par le Trésor public", explique André Sylvère Konan.
Mais la Cour des comptes, dans son dernier rapport en date du 3 janvier 2024, a dit que ce sont seulement 792.000 francs CFA, soit un peu moins 1200 euros, qui ont été reversés à l'État de Côte d'Ivoire comme recettes pour les cartes nationales d'identité et passeports établis en 2022.
La société privée Snedai a assuré mercredi (03.01.2024) s'être "toujours acquittée sur une base régulière de ses obligations" à son égard.
Mauvaise gouvernance ?
Pour la société civile, ce scandale financier aurait pu être évité si l'on avait pris soin de bien ficeler le contrat de répartition.
"L'idéal aurait été que ce soit un recouvrement automatique où la répartition est faite à travers les comptes que l'État a ouverts. Soit dans une banque, soit au Trésor. C'est-à-dire que le concessionnaire, dès qu'il perçoit l'argent au bout d'une journée ou de deux, ce qui doit aller dans les comptes de l'État y va directement, et ce qui doit rester dans les comptes du concessionnaire y va également", estime l'économiste Sylvain Kocoin.
Maintenant que le pays fait face à cette situation qui ressemble à un détournement portant sur une forte somme, et que les Ivoiriens ont bien envie de savoir ce qui s'est réellement passé, le journaliste et analyste André Sylver Konan invite le gouvernement à clarifier cette affaire.
"Manifestement, cet argent est quelque part, ou a servi quelque part, a été perçu quelque part, a été sorti quelque part. Il appartient aux structures régaliennes d'y voir encore plus clair." Sans doute que cette affaire fera tomber de grosses têtes.