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Sylvie Njobati : "Ces objets nous reviennent de droit"

1 juillet 2022

La jeune Camerounaise milite pour la restitution par l’Allemagne de la statue Ngonnso au peuple Nos. Interview...

Sylvie Njobati à Berlin
Image : Okach George/DW

Sylvie Njobati a multiplié les allers-retours entre le Cameroun et l'Allemagne pour faire campagne en faveur de la restitution de la statue Ngonnso du peuple Nso, basé dans le nord-ouest du Cameroun.

Sa dernière visite à Berlin pour inciter à des négociations officielles sur la restitution a eu un résultat positif.

La statue de Ngonnso, qui se trouve en Allemagne depuis 120 ans et est actuellement exposée au Humboldt Forum de la ville de Berlin, devrait bientôt être restituée au peuple Nso au Cameroun qui n'en a actuellement qu'une réplique.

Dans une interview à la DW, elle explique le sens de son engagement.

Ecoutez l'interview de Sylvie Njobati...

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DW : Pourquoi est-ce si important pour vous que la statue revienne au Cameroun ?

Sylvie Njobati : C'est une question que l'on me pose très souvent. Qu'est-ce qui m'importe ? Il s'agit de mon identité, de ma culture, de mon histoire. Cela veut dire que vous ne pouvez pas apprécier où vous allez si vous ne savez pas d'où vous venez. Quand la journée s'achève, je ne reconnais pas qui je suis s'il n'y a pas de Ngonnso. Je reconnais cet héritage colonial hérité de l'époque coloniale, de la Grande-Bretagne, de la France et de l'Allemagne. Mais c'est important parce que c'est ce que je suis. C'est notre culture. C'est notre identité, nos racines.

Comment voyez-vous la problématique des objets d'art africains volés exposés dans les musées européens ?

C'est un gros problème que ces objets d'art soient exposés dans les musées européens car il s'agit de l'âme d'un peuple. Ces objets ne sont pas des œuvres d'art. Ils ne sont pas destinés aux musées. Ils incarnent la spiritualité d'un peuple. Aussi, l'exposition de ces objets est une preuve de mauvaise foi. Cela permet de maintenir l'emprise du pouvoir colonial, cela permet de maintenir l'emprise des relations inégales qui existaient à l'époque et aujourd'hui entre l'Afrique et l'Europe. Donc c'est comme, "Oh ouais, nous avons le trophée. Nous sommes allés tuer, nous avons incité les pires génocides de l'histoire et nous avons toujours les trophées et nous en sommes fiers". Voilà ce que c'est. Et donc pour nous, Africains, il s'agit aussi de rechercher la justice sociale. Il s'agit de rechercher la renaissance de l'Afrique.

Êtes-vous surprise qu'il a fallu autant de temps pour que des pays comme l'Allemagne acceptent de rendre ces objets ?

Je ne suis pas surprise. Je suis déçue qu'il ait fallu autant de temps pour que l'Allemagne commence à rendre ces objets. C'est une sorte de prise de conscience à laquelle je m'attendais depuis longtemps, puisque le monde parle beaucoup de la justice globale et essaie de combattre d'autres injustices. Cela aurait dû arriver il y a longtemps déjà.

La statue de Ngonnso vient du nord-ouest du CamerounImage : Okach George/DW

Et maintenant, quelle est la suite du processus ?

Il y a maintenant besoin de négociations, qui consisteraient à mobiliser les parties prenantes de retour du Cameroun pour qu'elles s'assoient à la table des négociations avec les parties prenantes en Allemagne afin de négocier comment la restitution pourrait se faire, pour créer le calendrier ensemble.

Ce qui est clair, c'est qu'il y a un processus de négociation qui va commencer le mois prochain. De mon côté, ma proposition est que d'ici décembre, Ngonnso devrait être de retour chez lui.

Que répondez-vous à ceux qui disent que de nombreux pays africains ne peuvent pas prendre soin de ces objets restitués ?

La première chose est que ces objets nous reviennent de droit. Le fait que nous puissions ou non en prendre soin ne devrait pas vraiment être un problème majeur. Avant que ces objets soient volés, nous en prenions soin. C'étaient des objets qui étaient restés des siècles et des siècles. Et l'Afrique, en tant que continent, est également à la pointe du développement et de la technologie. Nous comprenons que la culture évolue, et l'Afrique évolue aussi. Je pense que nous avons la capacité de prendre soin de nos objets. Et même si nous ne le faisons pas, ce sont toujours nos objets.