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La Centrafrique, dix ans après le coup d’Etat de la Séléka

Jean-Fernand Koena
24 mars 2023

Le pays vit toujours dans le chaos et les conditions de vie des habitants du nord de la Centrafrique ne se sont pas améliorés.

Des déplacés sous un hangar en Centrafrique
Les violences en Centrafrique ont déjà fait des milliers de déplacés Image : David Belluz/AP Photo/picture alliance

En prenant le pouvoir par un coup d’Etat, le 24 mars 2013, la Séléka ambitionnait de soulager la souffrance des habitants du nord de la Centrafrique qui se sentent oubliés par Bangui.  

Mais dix ans plus tard, le sort de ces populations ne s’est pas amélioré et la Séléka a laissé derrière elle un pays qui vit toujours dans le chaos.  

En dépit du fait d’ailleurs que certains de ses représentants occupent des postes importants au sein du gouvernement.  

"Les rebelles ont pris les armes pour des raisons que vous connaissez", avait lancé Michel Djotodia, chef de la Séléka, pour soutenir à l’époque sa prise d’arme contre Bangui. 

Realpolitik 

Après sa chute au bout de seulement dix mois au pouvoir, les proches de Michel Djotodia ont exercé et exercent encore des responsabilités en tant que ministre des Mines, de l’Energie, des Transports ou encore de l’Equipement.  

Comme leurs prédécesseurs, ils semblent eux aussi être rattrapés par la Realpolitik.  

Ecoutez le reportage à Bangui...

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Jacques Tafogo, député de Bria, une région du Nord, dresse un bilan très négatif de la Séléka. 

Pour lui, "la situation est presque dramatique. Avant l’avènement de la Séléka, en 2012, la zone du nord-est disposait de quelques infrastructures, les routes étaient au moins praticables et pour les structures scolaires, sanitaires, il y avait quelques bâtiments. Mais depuis l’avènement de la Séléka, ces structures ont été vandalisées."

Une région dévastée  

Bria compte aujourd’hui le plus important site de déplacés internes du pays. L’accès des enfants à l’école est un défi et malgré son potentiel minier, la région demeure pauvre, en raison notamment des sanctions liées au processus de Kimberley sur l’interdiction des minerais de guerre.  

Jacques Tafogo rappelle le paradoxe de la Séléka qui a détruit les infrastructures d’une région dont elle revendiquait la protection. 

"Ce sont eux qui avaient souligné que la région était délaissée et ce sont eux qui ont détruit les quelques infrastructures qui existaient. Il y a certaines zones qui demeurent sous leur contrôle et c’est difficile pour ces zones-là d’avoir accès aux services sociaux de base. C’est le bilan de dix ans que je peux vous dresser pour le moment", soutient le député. 

Le contrôle des richesses minières handicape les efforts de paixImage : Thierry Bresilion/AA/picture alliance

Paralysie  

Ces dix ans sont analysés par les médias nationaux, à l’exemple de Oubangui Média, qui souligne la volonté de la Séléka de maintenir la région dans la précarité absolue. 

Fridolin Ngoulou, directeur de publication de Oubangui médias, estime que la Séléka n’a pas aidé "les partenaires qui interviennent et les autorités pour qu’ils puissent répondre aux préoccupations de base. Il y a des entreprises pour construire des routes et des organisations pour construire les hôpitaux mais ces entreprises ont souvent été pillées et braquées. La Séléka a contribué au ralentissement de la mise en œuvre de leurs propres recommandations. Aujourd’hui, la région du nord est occupée par les rebelles et reste une région difficile d’accès. Dix ans sont passés et rien n’a changé."

Le nord reste donc un foyer d’inquiétude et le contrôle du sous-sol par les multiples factions de la Séléka rend hypothétique tout effort de paix.