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PolitiqueMadagascar

Le colonel Randrianirina investi président de Madagascar

Hilda Hasinjo
17 octobre 2025

Randrianirina a été investi vendredi président de Madagascar, quelques jours après la prise de pouvoir par son unité militaire qui a poussé l'ex-dirigeant Andry Rajoelina à fuir

Madagascar Antananarivo 2025 | Le colonel Michael Randrianirina signe des documents après son investiture
Le colonel Michael Randrianirina investi "président de la refondation"Image : Siphiwe Sibeko/REUTERS

Michael Randrianirina, 51 ans, chef d'une unité de l'armée, le CAPSAT, qui s'est mutinée et jointe aux manifestants antigouvernementaux le weekend dernier, avait annoncé la prise de pouvoir par les militaires mardi après la destitution de M. Rajoelina par l'Assemblée nationale.

"Le jour d'aujourd'hui marque un tournant historique pour notre pays", a-t-il déclaré après sa prestation de serment lors d'une cérémonie à la Haute cour constitutionnelle à Antananarivo, la capitale, ont constaté des journalistes de l'AFP.

"Nous allons travailler main dans la main avec toutes les forces vives de la nation afin d'élaborer une belle Constitution de la République et de concerter sur de nouveaux textes électoraux sur l'organisation des élections et référendums", a-t-il assuré.

Il a remercié les jeunes du mouvement Gen Z d'avoir été à la pointe des manifestations et affirmé que l'armée était intervenue à la demande de la Haute cour pour "éviter l'anarchie et le désordre".

Dans l'assistance figuraient des officiers de l'armée, des hommes politiques, des représentants du mouvement de contestation Gen Z et plusieurs délégations étrangères, dont celles des États-Unis, de l'Union européenne, de la Russie et de la France, ex-puissance coloniale.

"Nous nous engageons à une rupture avec le passé"

A Madagascar, il s'agit de la troisième transition militaire depuis son indépendance de la France en 1960, après les coups d'État de 1972 et 2009Image : Zo Andrianjafy/REUTERS

Sous le feu de critiques à l'international, dont celles de l'ONU, le nouvel homme fort de Madagascar, qui réfute tout coup d'État, s'évertue à entourer sa prise de pouvoir de légalité.

Il a promis des élections d'ici 18 à 24 mois et assuré jeudi que le pays ne serait pas dirigé par un régime militaire et que "le gouvernement appartient aux civils".

Pour la cérémonie de vendredi, il avait échangé son uniforme pour un costume et s'est adressé aux délégations étrangères en français, les invitant à "accompagner Madagascar dans le processus de pilotage et de mise en oeuvre de la refondation nationale".

"Nous nous engageons à une rupture avec le passé", a-t-il dit. "Notre mission principale est de réformer en profondeur les systèmes administratifs, socio-économiques et politiques de gouvernance du pays".

"La transition est désormais engagée", a jugé dès jeudi depuis le Nigeria le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot, appelant à la "pleine association des civils au processus en cours".

Plusieurs représentants de la communauté internationale présents

Le colonel Michaël Randrianirina a été investi, ce vendredi, président de la transition à Madagascar, quelques jours après la prise de pouvoir par son unité militaire, qui a poussé le président élu, Andry Rajoelina, à quitter le paysImage : Brian Inganga/AP Photo/picture alliance

L'Allemagne, la France, le Royaume-Uni, les États-Unis, La Russie, la Chine et la Corée du Sud, ainsi que l’Union européenne, ont envoyé leur représentant pour assister à la cérémonie d’investiture du président de la transition malgache, ce matin, à Antananarivo.

Maître Tokisetra Ramilison est un avocat expert en relations internationales. Selon lui, l’enjeu géopolitique est important. En effet, un rapprochement de Madagascar avec la Russie ou la Chine n’est pas souhaité par les pays occidentaux.  

Malgré tout, ceux-ci restent prudents et leur présence ne signifie pas qu’ils cautionnent la prise de pouvoir par les militaires. 

"Au moins, ils observent. Ils manifestent leur présence. Nous n’irons pas jusqu’à dire qu’ils cautionnent, qu’ils valident ou qu’ils reconnaissent le nouveau chef de l’État, mais au moins, ils ne le boycottent pas. Ils sont ouverts aux dialogues. Ils sont venus, ils ont assisté à la cérémonie. Ils ont serré la main du nouveau chef de l’État et ils l’ont félicité", analyse Ramilison.

Un diplomate américain rappelle ainsi que la présence de l’ambassadeur des États-Unis devrait être comprise comme un "signe de bonne volonté et d’amitié". 

La Maison blanche n’a toutefois pas encore formulé sa position officielle face à la situation actuelle à Madagascar. Une annonce dans ce sens devrait se faire dans les prochains jours.

De leur côté, les institutions africaines ont brillé par leur absence. Ni la Sadc, ni l’Union africaine, ni la Commission de l’océan Indien n’ont été représentés à Ambohidahy, siège de la Haute cour constitutionnelle.  

 L'Union africaine et la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC) ont prévu d'envoyer des missions d'enquête sur l'île et appelé au respect de la démocratie constitutionnelle.

L'ex-président en fuite

Madagascar est la dernière de plusieurs anciennes colonies françaises passées sous contrôle militaire depuis 2020, après des coups d'État au Mali, au Burkina Faso, au Niger, au Gabon et en GuinéeImage : Siphiwe Sibeko/REUTERS

Les partisans d'Andry Rajoelina ont condamné le soutien de la Haute cour constitutionnelle au commandant du CAPSAT, le jugeant entaché d'illégalités procédurales.

Ils insistent sur le fait que M. Rajoelina-- qui n'a pas révélé où il se trouvait-- reste le chef de l'État et qu'il tente de trouver des solutions aux problèmes de l'île pauvre de l'océan Indien, notamment les coupures d'eau et d'électricité qui avaient déclenché la contestation des jeunes le 25 septembre.

Les forces gouvernementales ont été accusées de répression violente contre les manifestants, avec au moins 22 morts et une centaines de blessé selon l'ONU, jusqu'à ce que le CAPSAT annonce le 11 octobre qu'il refuserait de tirer sur eux.

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Cette mutinerie a marqué un tournant, l'unité ayant été célébrée par les protestataires qui espèrent désormais un rôle dans la nouvelle administration.

Le pays, situé au large du Mozambique, est un des plus pauvres au monde malgré une abondance de ressources naturelles et sa riche biodiversité attirant le tourisme.

Au moins 80% de ses 32 millions d'habitants vivent avec moins de 2,80 euros par jour, le seuil de pauvreté fixé par la Banque mondiale.

Andry Rajoelina est le troisième dirigeant malgache renversé à fuir le pays. Avant lui, Didier Ratsiraka était parti pour la France en 2002 après des violences post-électorales et Marc Ravalomanana s'était envolé pour l'Afrique du Sud en 2009.

 

Avec :  AFP

Hilda Hasinjo Correspondante DW