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Coup d'Etat au Soudan : l'armée prend tout le pouvoir

Georges Ibrahim Tounkara | Avec agences
25 octobre 2021

Des militaires ont arrêté ce lundi 25 octobre plusieurs dirigeants dont le Premier ministre, Abdallah Hamdok, et cela après des jours de tensions.

Jeune manifestant qui dénonce l'arrestation du Premier ministre Abdallah Hamdok
Jeune manifestant qui dénonce l'arrestation du Premier ministre Abdallah HamdokImage : AFP/Getty Images

L'armée soudanaise a arrêté lundi, les dirigeants civils, notamment le Premier ministre parce qu'il refusait de soutenir un "coup d'Etat", a annoncé le ministère de l'Information après des semaines de tensions entre militaires et civils qui se partagent le pouvoir depuis 2019.

C'est un "coup d'Etat militaire", a pour sa part, dénoncé l'Association des professionnels, l'un des fer de lance de la révolte de 2019 qui a mis fin à 30 années de pouvoir d'Omar el-Béchir.

Avec le syndicat des médecins et des banques, ils appellent à la désobéissance civile à Khartoum déjà plongée dans le chaos, sans internet et avec des rues noires de monde se demandant quel nouveau rebondissement arrive dans un pays déjà secoué par un coup d'Etat manqué il y a un mois.

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Dans les rues de Khartoum, où les réseaux sociaux ne sont plus accessibles pour beaucoup, de nombreux Soudanais ont conspué le général Abdel Fattah al-Burhane, qui chapeaute le Conseil de souveraineté désormais amputé de sa part civile.

Beaucoup convergeaient vers le principal axe du centre-ville où des pro-civils avaient organisé jeudi une démonstration de force aux cris de "révolution" pour refuser ce que les militants appelaient déjà "un coup d'Etat rampant".

"Nous n'accepterons pas de régime militaire et nous sommes prêts à sacrifier nos vies pour la transition démocratique", a juré l'un d'eux à l'AFP, Haitham Mohamed

"Nous ne quitterons pas les rues avant le retour du gouvernement civil et la reprise de la transition", affirme de son côté Sawsan Bachir, elle aussi sous la nuée de drapeaux soudanais.

Manifestants soudanais dans les rues de Khartoum, le 21 octobre 2021Image : ASHRAF SHAZLY/AFP via Getty Images

Lire aussi →Le Soudan, un an après la chute d'Omar el-Béchir

État d'urgence

Le général Abdel Fattah al-Burhane, à la tête des autorités de transition, a annoncé la dissolution du gouvernement et du Conseil de souveraineté, le limogeage de préfets et ministres et décrété l'état d'urgence dans l'ensemble du pays.

Mais, le général a réitéré son attachement à "la transition vers un Etat civil" et promis de créer les nombreuses institutions étatiques, comme la Cour suprême.

Condamnations internationales

L'Union africaine a appelé à une "reprise immédiate" du dialogue entre civils et militaires. "Le président de la Commission de l'Union africaine, Moussa Faki Mahamat, a appris avec une profonde consternation la grave évolution de la situation au Soudan", a affirmé dans un communiqué l'organisation panafricaine,

L'Allemagne a "clairement condamné" lundi la tentative de coup d'Etat au Soudan qui "doit cesser immédiatement" pour permettre la poursuite d'une "transition politique pacifique vers la démocratie", selon un communiqué du ministre des Affaires étrangères.

"Les informations faisant état d'une nouvelle tentative de coup d'État au Soudan sont atterrantes", a déclaré Heiko Maas, appelant au "dialogue" entre responsables politiques.

Le Premier ministre Abdallah Hamdok Image : Hannibal Hanschke/REUTERS

"J'appelle les forces armées à relâcher immédiatement les personnes retenues", a exhorté l'émissaire de l'ONU au Soudan Volker Perthes, jugeant "inacceptables" les arrestations de la quasi-totalité des civils au sein des autorités de transition.

Les Etats-Unis, dont l'émissaire Jeffrey Feltman était la veille encore dans le bureau du Premier ministre, Abdallah Hamdok, aujourd'hui arrêté, se sont dits "profondément inquiets", prévenant que "tout changement du gouvernement de transition mettait en danger l'aide américaine".

Pour sa part, le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a appelé la communauté internationale "à remettre la transition soudanaise sur les rails", tandis que la Ligue arabe se disait "inquiète", exhortant au "dialogue".

Le 18 octobre 2021, à Khartoum, des manifestants demandent la dissolution du gouvernementImage : Mahmoud Hjaj/AA/picture alliance

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Épilogue d'une crise

En avril 2019, l'armée poussait au départ Omar el-Béchir, après trois décennies de pouvoir, sous la pression d'une énorme mobilisation populaire.

Depuis août de la même année, un Conseil de souveraineté composé pour moitié de civils et pour moitié de militaires, menait le pays, promettant les premières élections libres fin 2023.

Des Soudanais dans les rues de Khartoum ce lundi 25 octobre 2021Image : Rasd Sudan Network/AA/picture alliance

Mais, ces derniers jours, la tension est montée entre les deux camps. Le 16 octobre, des pro-armée ont planté leurs tentes devant le palais présidentiel où siègent les autorités de transition.

En réponse, le 21 octobre, des pro-civils sont descendus par dizaines de milliers dans les rues du pays, dans un joyeux festival pour, disaient-ils, "sauver" leur "révolution" anti-Béchir.

Il y a deux jours, le camp pro-civil avait mis en garde contre un "coup d'Etat rampant", lors d'une conférence de presse qu'une petite foule avait cherché à empêcher.

La rumeur courait dans Khartoum qu'un remaniement ministériel était imminent et que l'armée cherchait à étendre son influence au sein des autorités de transition.

Mais M. Hamdok, qui parlait depuis des jours de "crise la plus grave et la plus dangereuse" pour la transition, avait assuré ne pas avoir accepté.

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Georges Ibrahim Tounkara Journaliste au programme francophone de la Deutsche Welle