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Covid-19: attaques en règle contre l'OMS

9 avril 2020

À chaque crise sanitaire, l'organisation mondiale de la Santé fait l'objet de critiques pour sa gestion. Le Covid-19 ne fait pas exception.

Le directeur général Tedros Adhanom Ghebreyesus est notamment critiqué pour avoir félicité Pékin pour sa transparence
Le directeur général Tedros Adhanom Ghebreyesus est notamment critiqué pour avoir félicité Pékin pour sa transparenceImage : Reuters/D. Balibouse

L'attaque est venue du bureau ovale. Alors que les États-Unis sont en passe de devenir le nouvel épicentre de la pandémie de coronavirus, le président américain Donald Trump a menacé mardi (07.04.2020) de suspendre la contribution américaine à l'Organisation mondiale de la Santé.

Le président américain a attaqué frontalement l'OMS lors de son point de presse quotidienImage : picture-alliance/AP Images/A. Brandon

"Ils ont eu tort sur beaucoup de choses", a-t-il lancé pour justifier ses menaces. Le principal tort étant - selon Donald Trump - d'avoir osé critiquer sa décision de fermer les frontières aux personnes venant de Chine au début de l'épidémie.

Sur Twitter, le président américain a ouvertement reproché à l'OMS d'être trop favorable à Pékin. "Étrangement, ils (l'OMS) sont largement financés par les Etats-Unis et pourtant très centrés sur la Chine. Nous allons nous pencher avec attention sur le dossier", peut-on lire sur un tweet publié mardi matin.

L'OMS contre-attaque après les critiques de Trump

La réponse de l'Organisation mondiale de la Santé ne s'est pas fait attendre. Mercredi (08.04.2020), le directeur général de l'organisation onusienne Tedros Adhanom Ghebreyesus a dénoncé une "politisation" de la crise sanitaire.

"Ne continuons pas à jouer avec le feu" face à un virus qui progresse "de façon exponentielle", a déclaré l'ancien ministre éthiopien des Affaires étrangères lors d'une conférence de presse virtuelle, alors que le Covid-19 a déjà fait près de 100.000 morts dans le monde.

Il a aussi appelé la Chine et les États-Unis à s'unir pour combattre le virus.

Dans le cas du Covid-19, c'est surtout un manque de clarté qui est reproché à l'OMS. Présente dès l'apparition des premiers cas en Chine, l'organisation a estimé le 10 janvier, un jour avant le premier décès rapporté en Chine, qu'il n'y avait "pas de transmission interhumaine significative".

Des recommandations trop floues

Elle se basait sur les résultats d'une enquête préliminaire et déconseillait à Pékin de prendre des mesures pour restreindre la circulation des personnes et des biens. Depuis, l'agence onusienne a modifié ses recommandations mais ne donne pas toujours de consigne stricte sur les mesures à prendre.

Sur le port du masque, par exemple, qui est en train d'être peu à peu instauré dans l'espace public dans de nombreux pays, le site officiel  de l'OMS continue de le déconseiller aux personnes saines qui ne sont pas en contact avec des malades.

Les dirigeants de l'OMS font-ils preuve de complaisance à l'égard de la Chine?Image : picture-alliance/AP Photo/Naohiko Hatta

Mais c'est aussi l'attitude de l'OMS envers la Chine qui cristallise les critiques, et pas seulement de la part du président américain. Les félicitations adressées par le Dr Tedros aux autorités chinoises pour leur "transparence" ont été diversement appréciées dans les capitales.

Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a toutefois estimé que le moment "n'était pas venu" de tirer les leçons sur le travail de l'OMS sur le Covid-19 mais de "rechercher l'unité".

"Je suis surpris d'apprendre que le gouvernement américain mène campagne contre les dirigeants mondiaux de l'OMS", a pour sa part réagi Moussa Faki Mahamat, le président de la Commission de l'Union africaine, sur Twitter.

Le message du chef de l'UA a été approuvé sur Twitter par les présidents rwandais, Pierre Kagame, et namibien, Hage Geingob, qui ont eux aussi pris la défense de l'OMS et appelé à davantage de solidarité.

Des critiques à chaque épidémie

Les dirigeants africains ont une expérience encore récente de gestion de crise sanitaire par l'OMS: cela ne fait que quelques semaines qu'aucun nouveau cas d'Ebola n'a été enregistré en République démocratique du Congo, où la maladie a resurgi en 2018 après avoir ravagé l'Afrique de l'Ouest entre 2013 et 2016.

En RDC, l'OMS a coordonné la riposte avec les autorités de santé congolaisesImage : Reuters/O. Acland

Si la situation se maintient, l'OMS pourra déclarer la fin officielle de l'épidémie dans quelques jours, le 12 avril.

En 2015, l'Organisation mondiale de la Santé avait été fortement critiquée pour sa gestion de l'épidémie en Afrique de l'Ouest. L'ONG Médecins sans Frontières lui reprochait notamment d'avoir été trop lente à réagir. L'OMS avait en effet attendu cinq mois avant de déclarer une urgence sanitaire internationale.

Lors de la réapparition de la maladie en RDC, l'OMS a tiré les enseignements de la crise précédente en organisant mieux la riposte et en assurant un suivi des ex-malades.

Une décennie plus tôt, c'est un excès de zèle qui avait valu à l'agence onusienne une salve de critiques. Lors de l'épidémie de grippe H1N1 en 2009, de nombreux pays du monde avaient suivi les recommandations de l'OMS de produire et d'acheter massivement des vaccins.

Mais une fois l'épidémie passée, on avait accusé l'OMS d'avoir crié "au loup" sous la pression des laboratoires pharmaceutiques, entraînant des dépenses excessives pour les budgets publics.

Jeudi (09.04.20), l'administration américaine a relancé son offensive contre l'OMS et la Chine en accusant l'agence d'avoir tardé à déclarer que le Covid-19 était une urgence sanitaire internationale et Pékin d'avoir manqué de transparence.

Selon la diplomatie des Etats-Unis, "il y aura de nombreuses leçons à tirer", "notamment pour savoir où et comment le système OMS a échoué à remplir sa mission".
 

Avec agences