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Ces armes venant d'Europe qui circulent au Sahel

24 août 2021

La récupération par des groupes armés des armes vendues à des Etats sahéliens prend de l’ampleur et inquiète d’autant que la plupart des armes viennent d’Europe.

Un détachement de l'armée malienne à Diabaly (Archives - Diabaly, 21.01.2013)
Un détachement de l'armée malienne à Diabaly (Archives - Diabaly, 21.01.2013)Image : AFP/Getty Images

 Dans un communiqué publié ce mardi 24 août, l'Ong Amnesty international insiste sur un certain nombre de points troublants. C’est en se basant sur l’analyse de photos et vidéos du Burkina Faso et du Mali, publiées sur les réseaux sociaux par des membres de groupes armés, entre janvier 2018 et mai 2021, qu’Amnesty international est parvenue à identifier les types d’armes utilisés par les groupes armés au Sahel

Pour certains, il s’agit de modèles très récents de fusils de guerre. Des armes qui se retrouvent entre les mains des combattants de divers groupes armés dont l’EIGS, le GSIM, les Dozos, les Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), les Koglweogo ou encore les membres de l'organisation Dan Nan Ambassagou.

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Des armes qui proviendraient d’Europe précise Ousmane Diallo, l’un des chercheurs d’Amnesty International. Selon lui "la plupart des armes légères et de petit calibre dont disposaient ces groupes étaient des armes qui provenaient des pays d’Europe de l’Est, en particulier de la Serbie, de la République Tchèque et de la Slovaquie. Pour les groupes d’autodéfense, il y a des trafics qui existent, souvent à partir des arsenaux des Etats de la région. Ou bien par le fait que ce sont les officiers militaires qui fournissent directement ces armes aux groupes d’autodéfense. Pour les groupes extrémistes violents, il est fort possible qu’ils aient acquis ces armes via des attaques contre les garnissons des Etats de la région et au-delà, ces groupes peuvent bénéficier de réseaux illicites de trafics d’armes".

Des soldats de l'armée malienne portant leurs armesImage : Getty Images/AFP/A. Jocard

Une intensification des livraisons

L'Ong Amnesty International relève également que la République Tchèque, la France et la Slovaquie exportent de grandes quantités d’armes légères et de petits calibres aux gouvernements de la région.

Des exportations d’armes qui selon l’Union européenne relève de la seule autorité des Etats "qui sont responsables des livraisons dans le cadre de contrats bilatéraux", précise Pierre Stano, le porte-parole principal pour les affaires étrangères et la politique de sécurité.

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 Dans le communiqué d'Amnesty International, on peut également lire que d'’après les données officielles du rapport annuel de l’Union européenne, depuis 2013, les États membres de l’UE ont accordé 506 licences pour des équipements militaires, pour un montant de 205 millions d’euros, au Mali et au Burkina Faso.

La Slovaquie a indiqué ainsi avoir livré au Mali 1.000 armes d’assaut, 2.460 fusils et carabines, 550 mitrailleuses, 680 pistolets et revolvers et 750 pistolets-mitrailleurs. La République Tchèque a indiqué avoir pour sa part livré au Burkina Faso 3.500 fusils d’assaut et dix pistolets-mitrailleurs.

Enfin, la France a livré au Mali 1.164 pistolets et revolvers à chargement automatique, quatre fusils et carabines, ainsi que 13 véhicules blindés de combat.

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Lutter contre la prolifération des armes

Pour éviter que cet arsenal soit détourné, des mécanismes existent pourtant, rappelle Ousmane Kornio. Consultant, expert en prévention et gestion des conflits, il travaille notamment sur cette question du contrôle des armes légères et de petits calibres et précise que "dans les 15 pays de la Cédéao, chaque Etat a une commission de lutte contre la prolifération des armes légères. Nous avons le G5 Sahel qui fait aussi de l’animation pour demander aux pays de s’organiser pour lutter contre la prolifération des armes légères. Même au niveau local, on a mis en place des commissions, par exemple au Mali, une commission locale de sensibilisation et de récupération des armes".

Des initiatives qui ne sont toutefois pas vraiment efficaces, reconnaît le chercheur qui précise que les populations voudront toujours se défendre elles-mêmes tant que l’insécurité perdurera.
Pour sa part, Ousmane Diallo estime qu'il faudrait que les Etats exportateurs revoient leur protocole en incluant notamment une dimension relative aux droits de l’Homme pour s’assurer que les armes vendues ne tombent pas dans de mauvaises mains. 
Il insiste par ailleurs sur l’importance que les partenaires du Sahel, comme la France et l’Union européenne, appuient les pays sahéliens dans le renforcement de leur dispositif de préservation et de stockage de leur arsenal militaire.