Donald Trump peut-il faire plier Vladimir Poutine ?
15 juillet 2025
La Russie a 50 jours pour mettre fin à son offensive en Ukraine. C'est l'ultimatum fixé par Donald Trump à Vladimir Poutine.
Autrement, la Russie sera frappée de sanctions secondaires, c'est-à-dire que les Etats-Unis imposeront des droits de douane aux pays alliés de Moscou.
Dans le même temps, Washington va livrer de nouvelles armes pour l'Ukraine.
Reste à savoir, si ces moyens de pression seront efficaces. 50 jours, c'est long, et le Kremlin a déjà inversé la logique, expliquant que ce soutien américain accru va pousser Kiev à "prolonger la guerre".
Des milliards de dollars d'armes
Depuis le bureau ovale de la Maison Blanche, où il recevait le patron de l'Otan Mark Rutte, Donald Trump a promis des "milliards de dollars” d'armement à l'Ukraine, dont des batteries et missiles de défense anti-aériennes Patriot, que l'Ukraine réclame pour pouvoir défendre ses villes des frappes aériennes russes.
Dans le même temps, Donald Trump, qui explique qu'à quatre reprises, il pensait avoir un accord de paix, avant que Vladimir Poutine ne continue à bombarder l'Ukraine, donne désormais 50 jours à Moscou pour stopper la guerre.
Autrement, les pays qui achètent des exportations russes seront sanctionnés de droits de douane à hauteur de 100 %.
Actuellement, les sanctions qui visent la Russie lui permettent de continuer à vendre des hydrocarbures à des grands pays comme la Chine et l'Inde.
Et depuis plus de trois ans et les premières sanctions occidentales, on s'interroge ainsi sur l'état réel de l'économie russe, qui semble avoir fait preuve d'une impressionnante résilience.
Vers un ralentissement de l'économie russe
En 2023 et en 2024, le PIB de la Russie a augmenté de plus de 4 %.
Cet élan, largement alimenté par le passage à une économie de guerre, semble maintenant s'estomper. De nombreux économistes s'attendent à ce que la croissance de la Russie soit divisée par deux cette année. Même la banque centrale russe s'attend à un ralentissement.
L'un des principaux freins est les taux d'intérêt vertigineux de la Russie, actuellement à 21 %, qui étouffent l'investissement privé. Les secteurs de l'automobile, de la production de moteurs et de machines, l'industrie du bâtiment et de l'acier sont particulièrement handicapés.
Dans le même temps, le rouble – la monnaie russe - a gagné plus de 40 % par rapport au dollar américain depuis le début de l'année, ce qui surprend de nombreux analystes.
Selon Vassili Astrov, expert de la Russie à l'Institut de Vienne pour les études économiques internationales (WIIW), l'appréciation du rouble a été en grande partie le résultat de la position conciliante de Donald Trump envers la Russie.
Changement de ton à la Maison Blanche
"Lorsque le président Trump a pris ses fonctions, il a dit qu'il adopterait une approche radicalement différente de celle de Joe Biden à l'égard de la Russie", rappelle Vassili Astrov.
Le président américain avait fait allusion à une coopération plus étroite, et même à un assouplissement, voire la fin des sanctions américaines, déclenchant une "euphorie" sur les marchés financiers russes.
En novembre 2024, les États-Unis avaient inscrit sur leur liste noire Gazprombank, la banque contrôlée par l'Etat russe et liée aux activités du géant gazier Gazprom.
Gazprombank a été exclu du système financier américain, accusée de payer les soldats et les armes pour la guerre en Ukraine.
Cette décision avait eu un impact immédiat. Le rouble avait perdu un quart de sa valeur par rapport au dollar et les marchés financiers avaient plongé, en particulier dans les secteurs financier et énergétique.
La Chine et l'Inde en bouée de sauvetage pour Moscou
La menace de "sanctions secondaires" dans 50 jours, brandie par Donald Trump, fait référence aux sanctions imposées aux pays, aux entreprises ou aux individus tiers qui continuent à faire des affaires avec la Russie.
En attendant, au Congrès américain, le républicain Lindsey Graham, fidèle supporter de Trump, et un groupe bipartite de sénateurs, préparent des sanctions contre les pays qui importent des produits énergétiques russes.
D'après le chef de la majorité républicaine au Sénat, la loi pourrait être examinée avant que le Congrès ne parte en congés, le 1er août.
Selon le chercheur Vassili Astrov, ces nouvelles sanctions viseraient principalement la Chine et l'Inde.
"La Chine est désormais le partenaire commercial le plus important de la Russie, représentant environ 40 % de ses importations et 30 % de ses exportations en 2024. Des importations cruciales pour l'industrie militaire passent par la Chine et Hong Kong”, explique-t-il.
La Chine et l'Inde, l'autre grand soutien à l'économie russe, "absorbent ensemble plus de la moitié des exportations totales de pétrole de la Russie".
Le "China track"
Sous le président Joe Biden, les sanctions secondaires étaient strictement appliquées, l'administration Trump a jusque-là relâché la pression, comme par exemple en démantelant le département du Trésor américain en charge de cibler les actifs des oligarques russes et en "allégeant massivement" l'application des sanctions secondaires, observe Vassili Astrov,
Selon lui, il est actuellement "difficile de prédire" à quel point de nouvelles sanctions secondaires affecteraient les partenaires économiques de la Russie.
Enfin, des sources dans le secteur des banques ont assuré à l'agence de presse Reuters que les principales banques russes ont déjà mis en place un système de paiement surnommé "China Track" (la voie chinoise) pour leurs transactions avec la Chine, dans le but de "réduire leur visibilité auprès des régulateurs occidentaux et d'atténuer le risque de sanctions secondaires".
"Le nouveau système a été mis en place par les principales banques sanctionnées et fait appel à un réseau d'intermédiaires enregistrés dans des pays que la Russie considère comme amis. Le système est en place depuis un certain temps et n'a pas encore subi de revers majeurs", écrit Reuters.