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Gabon : couvre-feu après une journée électorale

Bob Barry | Avec agences
26 août 2023

Un couvre-feu a été instauré et l'accès à internet suspendu ce samedi soir à la fermeture des bureaux de vote.

Des électeurs attendent devant un bureau de vote à Libreville
Près de 847.000 électeurs gabonais sont appelés à voterImage : Gerauds Wilfried Obangome/REUTERS

Dans une déclaration à la chaîne de télévision publique, Rodrigue Mboumba Bissawou, ministre de la Communication, a annoncé que "le gouvernement a pris la décision de suspendre jusqu'à nouvel ordre l'accès à l'internet sur toute l'étendue du territoire."

Selon lui, cette décision a pour but d'éviter "la propagation d'appels à la violence (...) et des fausses informations".

"Un couvre-feu sur l'ensemble du territoire est également décrété et sera appliqué dès ce dimanche 27 août. Il sera de vigueur tous les jours, à partir de 19H, jusqu'à 6H", a déclaré le ministre de la Communication.

Les élections du 26 août au Gabon

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Les Gabonais votaient, ce samedi, pour décider s'ils confient ou non un troisième mandat au président Ali Bongo Ondimba.

En face, 13 candidats, dont Albert Ondo Ossa, son plus sérieux rival.

En fin de matinée, des dizaines d'électeurs patientaient devant des bureaux de vote du centre de Libreville, dont les rues, pavoisées aux seules couleurs du camp Bongo, étaient étonnamment quasi-désertes, selon plusieurs témoins. 

Ces élections au Gabon, auxquelles étaient appelés près de 847.000 électeurs dans un pays de 2,3 millions d'habitants, se sont déroulés également sans observateurs internationaux, africains comme européens, et en l'absence de médias étrangers, qui se sont vu refuser des accréditations ou l'entrée dans le pays, a dénoncé Reporter sans Frontières (RSF). 

Le candidat de la coalition de l'opposition Albert Ondo Ossa promet de "chasser" du pouvoir par les urnes le président sortant et de mettre un terme à la "dynastie Bongo" à la tête du pays depuis plus de 55 ans.

Ali Bongo, président depuis 14 ans, avait été élu une première fois en 2009 après la mort de son père Omar Bongo Ondimba, qui dirigeait le pays depuis plus de 41 ans.

Tentative de fraude

En milieu de matinée, Albert Ondo Ossa dénonçait déjà sur son compte Facebook la "malice" du camp adverse, en assurant que les bulletins de cinq candidats de l'opposition qui se sont officiellement désistés en sa faveur étaient toujours présents dans certains bureaux de vote. 

"Je peux décliner mon identité mais pas Ali Bongo"(Albert Ondo Ossa)

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Des accusations auxquelle le Centre Gabonais des Elections (CGE), l'instance qui organise les scrutins, a refusé de répondre et renvoyant la question aux responsables des bureaux incriminés par l'opposition.

Le candidat de la coalition de l'opposition, âgé de 69 ans, est un personnage peu connu du grand public jusqu'alors.

Il a été choisi par les principaux partis de l'opposition, rassemblés dans la plateforme Alternance 2023, à huit jours seulement du scrutin et n'en a eu que six pour mener campagne alors que le président sortant Ali Bongo, 64 ans, a poursuivi tambour battant depuis plusieurs mois une tournée très médiatisée dans tout le pays, le tout avec des moyens considérables, "ceux de l'Etat" accuse l'opposition.

Mais, Albert Ondo Ossa, dans un marathon sur six jours, a drainé par endroits des foules comparables. Ainsi, la très grande majorité des autres partis et plateformes de l'opposition ont appelé à voter pour lui.

Le bulletin unique, enjeu du scrutin

Les scrutins présidentiel et législatifs sont regroupés en un seul vote par le truchement d'un bulletin unique pour les candidats à la présidentielle et à la députation issus d'un même parti. 

Un "bulletin inique", s'insurge l'opposition, qui dénonce une "manoeuvre frauduleuse" pour favoriser le camp Bongo.

Le candidat Ondo Ossa, professeur d'université agrégé d'économie, ancien ministre d'Omar Bongo, exhorte les Gabonais à "ignorer" les législatives pour se concentrer sur la présidentielle, "seul enjeu des élections". Il a promis de dissoudre l'Assemblée nationale issue du vote s'il était élu président.

La famille du président sortant Ali Bongo Ondimba dirige le Gabon depuis plus d'un demi-siècleImage : imago images/Afrikimages

L'opposition avait déjà critiqué une "modification des règles du jeu" il y a cinq mois pour tailler une réélection sur mesure au sortant, en faisant repasser le scrutin de deux à un tour, gagnable donc à la majorité relative pour Ali Bongo, face à 13 candidats.

Risques de violences post-électorales

En 2016, Ali Bongo avait été réélu mais laborieusement, avec 5.500 voix seulement d'avance sur l'opposant Jean Ping, qui dénonçait des "fraudes". La contestation des résultats avait plongé le pays dans des violences reprimées dans le sang par les forces de sécurité.

Deux ans plus tard, en octobre 2018, un AVC avait laissé M. Bongo de longs mois invisible. Cinq ans après, une partie de l'opposition continue  de mettre en doute ses capacités physiques et intellectuelles à diriger le pays.

La majorité au pouvoir, elle, dénonce des campagnes centrées sur sa santé, "sans aucun autre programme" dans l'un des pays les plus riches d'Afrique en PIB par habitant, grâce à son pétrole, son manganèse et son bois notamment.

Mais "le Gabon peine à traduire la richesse de ses ressources en une croissance durable et incusive". Selon la Banque mondiale, un tiers (32,9%) de ses habitants vivent sous le seuil de pauvreté. 

Bob Barry Journaliste, présentateur et reporter au programme francophone de la Deutsche Welle@papegent