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Economie

Mauritanie : monnaie "allégée", mais prix à la hausse

Diagana Khalilou
13 mars 2018

La monnaie a changé de valeur en début d'année. Depuis, les consommateurs se plaignent de la hausse des prix des denrées alimentaires.

Mauretanien, Nouakchott, Währung Ouguiya
Image : DW/K.Diagana

En Mauritanie, la monnaie s'est allégée d'un zéro depuis le premier janvier dernier, suite à une décision de la Banque centrale. L'ouguiya, la monnaie nationale, a perdu un zéro. Depuis son entrée en vigueur, les nouvelles pièces et nouveaux billets remplacent progressivement les anciens.

Un changement évidemment remarqué sur ce marché de la proche banlieue de Nouakchott. Ici il est difficile de se faire un passage entre les étals, les vendeurs ambulant et les charretiers.

Les clients et commerçants se sont vite appropriés la nouvelle version de l'ouguiya qui prend progressivement la place de l'ancienne. Ils ont vite compris que le changement de base de la monnaie se matérialise par l'ajout d'un zéro à chaque sommes pour avoir sa valeur réelle.

Ainsi 100 ouguiyas de la nouvelle version valent 1000, 10 valent 100.  L'ouguiya actuelle, c'est donc comme le dit la BCM "Moins de chiffres, même valeur."

Doublement du PIB

Image : picture-alliance/robertharding/C. Kober

"Le PIB du pays a plus que doublé entre 2009 et 2017. Par conséquent, la masse monétaire aussi a doublé", explique Sidi Mohamed Ould Dhaker, Directeur du centre de pilotage stratégique de la BCM. "Cette augmentation de la masse monétaire, conjuguée aux perspectives économiques, va contribuer à accentuer la pression sur la masse monétaire et la liquidité. La BCM a la responsabilité de la gestion et l'entretien de cette monnaie."

Autre raison invoquée par la BCM, la réduction des risques de falsification. Les anciens billets se dégradaient vite et  leurs émissions et entretien coutaient 1,5 milliards d'ouguiyas par an. Les nouveaux billets en polymère semblent plus surs.

Mais derrière cette reforme, y a-t-il une dévaluation cachée ? Pas du tout répond Isselmou Ould Mohamed, ancien ministre et professeur d'économie à l'ENA (école nationale d'Administration) : "Depuis quelques temps, il y a un dérapage constaté sur le marché de change entre l'ouguiya par rapport a l'euro et au dollar. Ça s'explique par d'autres considérations qui ne sont pas liées au changement de base de la monnaie", explique-t-il.

Les raisons de la hausse des prix

Image : Getty Images/AFP/I. Sanogo

Le cours de change officielle de l'ouguiya par rapport au dollar américain et a l'Euro n'a guère changé. Mais, les consommateurs mauritaniens ont constaté une hausse des prix de certaines denrées. "Les spaghettis, par exemple, coûtaient 3000 ouguiyas pour 10 kilos, actuellement c'est 4000, le riz thaïlandais coûte maintenant 16 000 avant c'était 14 000", montre Awah El Yedali de l'association mauritanienne pour la protection des consommateurs et l'environnement. 

Pour Awwah El Yedali, les commerçants ont profité de la transition entre nouvelle et l'ancienne ouguiya pour augmenter les prix. Mais pour lui les raisons profondes de la hausse sont ailleurs : "Le monopole des importateurs est une cause de la hausse des prix". 

Issemou Ould Mohamed cite pour sa part la faiblesse de la concurrence : "Le système commercial n'est pas concurrentiel. Dans un système concurrentiel ça se règle par la pression de l'offre et de la demande. Ici la plupart des produits sont importés par des oligopoles ou monopoles qui peuvent influencer le marche et sont en position de force par rapport aux pauvres consommateurs". 

Autres raison de la hausse continue des prix : la Mauritanie importe l'essentiel de ses besoins, environ 90%. Dans cinq mois, l'ancienne ouguiya disparaitra totalement du marché mauritanien. En sera-t-il de même de la hausse des prix ? "Pas sûr", répondent les consommateurs.