Festival de Bayreuth, la centième
28 juillet 2011Malgré ce chiffre rond, pas de grandes festivités mais des polémiques. Il y a d'abord eu la mise en scène audacieuse de l'opéra romantique "Tannhäuser" qui a ouvert le festival. Et puis il y a eu le débat autour de cet orchestre israélien, invité par les organisateurs de Bayreuth et qui a interprété mardi l'Idylle de Siegfried, une sérénade composée en 1870 par Wagner. Problème : ce dernier, en plus d'être un grand musicien était aussi un antisémite notoire dont l'œuvre reste aujourd'hui encore taboue en Israël.
Richard Wagner a composé l'idylle de Siegfried pour sa femme, Cosima, en guise de cadeau d'anniversaire. Une œuvre plutôt romantique donc mais qui n'a pas empêché l'association des survivants de l'Holocauste et de leurs familles de qualifier la décision de l'Orchestre de chambre israélien de "rupture honteuse de la solidarité avec les personnes qui ont souffert des horreurs nazies". Mort en 1883, Richard Wagner reste pour beaucoup associé au IIIème Reich, fondé un demi-siècle plus tard. Sa musique était en effet adulée par le régime hitlérien qui avait par ailleurs fait de Bayreuth une sorte de ville modèle. Noah Klieger a 84 ans. Survivant du camp de concentration d'Auschwitz. Il vit aujourd'hui en Israël
"Je ne veux pas entendre Wagner ici et cela pour une raison très simple. Cet homme est le père de la théorie des races. Ce sont certes les Allemands sous Hitler qui l'ont mise en pratique mais la théorie vient de Wagner et non pas d'Hilter."
Mardi, les spectateurs ont cependant applaudi pendant de longue minutes l'Orchestre de chambre israélien. Pour sa performance musicale d'abord : pour ne pas échauffer encore davantage les esprits, l'orchestre avait décidé de ne commencer les répétitions que 48 heures avant le concert, en Allemagne. Le public a également saluer les musiciens pour leur courage et leur engagement. Yonatan Livni, président de la Société wagnérienne israélienne a assisté à la représentation
"C'était un moment historique selon moi. Nous avons montré - ou plutôt un orchestre israélien à Bayreuth a montré - que l'art et la culture ne connaissent pas de frontière."
La réception positive du concert, malgré la polémique qu'il a déclenché, devrait encourager les organisateurs du Festival - parmi lesquels l'arrière-petite-fille de Richard Wagner, Katharina Wagner - a poursuivre leurs efforts pour dédiaboliser Bayreuth. D'autres projets sont d'ailleurs à l'ordre du jour : la création d'un centre culturel juif et l'ouverture des archives de la famille Wagner pour que les liens de cette dernière avec le régime national-socialiste puissent être étudiés de façon transparente.
Auteur : Konstanze von Kotze
Edition : Sébastien Martineau