Friedrich Merz rencontre Donald Trump
5 juin 2025
Le chancelier allemand doit s'entretenir ce jeudi [05.06.25] avec Donald Trump et les deux dirigeants devraient d'ici quelques heures présenter les résultats de leurs discussions à la presse. Celles-ci devraient porter essentiellement sur les relations commerciales, les taxes douanières et la guerre en Ukraine.
Ce voyage revêt un caractère particulier pour Friedrich Merz dont c'est le premier voyage à Washington depuis sa prise de fonctions. Si le chancelier ne voulait pas venir en quémandeur, Donald Trump reste un partenaire de premier plan pour l'Allemagne.
L'honneur de la Blair House
Friedrich Merz et Donald Trump ont beau s'appeler par leur prénom, les deux hommes sont très différents et leurs points de vue divergent sur de nombreux dossiers.
Ils ne s‘étaient rencontrés auparavant que brièvement, il y a plusieurs années, à New York.
Le protocole américain a réservé un honneur spécial au chancelier : le droit d'être logé durant son voyage dans la Blair House, une demeure située en face de la Maison Blanche, où ont séjourné des hôtes de marque avant lui, comme Charles de Gaulle ou la reine Elizabeth II.
"Ne pas se laisser rabaisser"
Néanmoins, il y a quelques semaines, Friedrich Merz s'est agacé de l'accueil humiliant réservé par Donald Trump et son vice-président JD Vance à Volodymyr Zelensky, le président ukrainien.
Le chancelier allemand, membre du parti conservateur (CDU) n'apprécie guère non plus que les responsables américains expriment de la sympathie pour l'AfD, le parti de l'extrême droite allemande.
De ses appels téléphoniques à Donald Trump, Friedrich Merz avait raconté qu'il était important "de ne pas trop parler et de le laisser parler, lui". Et concernant le fait que le président américain ponctuait ses phrases du mot "great" : "il faut le prendre comme il est sans se laisser rabaisser", avait ajouté Friedrich Merz.
Carlo Masala, professeur en politique internationale à l'Université de la Bundeswehr, à Munich, recommande aux interlocuteurs européens de Donald Trump de "faire preuve d'assurance, tout en lui donnant toujours l'impression qu'il est un grand homme d'Etat".
Les reproches de Donald Trump
Parmi les griefs du président américain envers les autres membres de l'Otan, dont l'Allemagne, il y a leurs contributions financières à l'Alliance, qu'il estime trop faibles au point de menacer d'un retrait des États-Unis.
Friedrich Merz peut rassurer Donald Trump : son gouvernement prévoit de consacrer 5% du PIB de l'Allemagne au financement de l'Otan (3,5% pour l'aspect militaire et 1,5% pour les infrastructures en lien avec la défense).
Friedrich Merz entend aussi augmenter son ascendant au sein de l'UE. L'un des derniers exemples de cette volonté: la visite de soutien à Kiev qu'il a initiée avec les chefs d'Etat et de gouvernement de la France, du Royaume-Uni et de la Pologne .
Le chancelier allemand veut également répondre aux attentes des États-Unis pour que l'Europe s'occupe davantage elle-même de sa sécurité intérieure. En échange, il espère convaincre Donald Trump d'augmenter sa pression sur Vladimir Poutine.
Barrières douanières et transatlantisme
Pour ce qui est du volet commercial, Friedrich Merz n'a pas les prérogatives nécessaires pour négocier au nom de l'UE. Mais l'Allemagne est particulièrement touchée par les barrières douanières américaines, en tant que grand pays exportateur.
Le nouveau chancelier allemand est un transatlantiste convaincu. Il veut convaincre Donald Trump qu'il y a va des intérêts réciproques de l'UE et des États-Unis de garder un lien étroit.
Mais l'Europe doit se préparer à l' éventualité d'un retrait du soutien américain à l'Ukraine dans sa guerre contre la Russie.
Quant au dossier de l'AfD, Friedrich Merz voulait éviter de l'aborder à Washington, à l'instar de son ministre des Affaires étrangères, Johann Wadephul, qui n'en a pas parlé lors de son voyage préparatoire aux Etats-Unis, il y a quelques jours.
Invitation en Allemagne
Le nouveau gouvernement fédéral composé des conservateurs de la CDU/CSU et des sociaux-démocrates du SPD a opté pour un style différent dans la politique étrangère. L'ancienne ministre écologiste des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, a parfois été critiquée pour son attitude moralisatrice. Désormais, Berlin veut mettre l'accent sur les intérêts communs et la recherche de compromis, même avec des partenaires difficiles. Le gouvernement Trump en fait partie, avec unprésident américain qui dit tout et son contraire.
Avant même sa visite inaugurale à Washington, Friedrich Merz avait invité Donald Trump à se rendre dans la patrie de ses ancêtres. Le grand-père du président américain, Friedrich Trump, était originaire du village viticole de Kallstadt, dans le Palatinat, et a émigré aux États-Unis. Pour l'instant, on ne sait pas si Donald Trump a accepté. Peut-être que cela dépendra de la manière dont s'est déroulé son entretien avec Friedrich Merz.