Le discours populiste des nouveaux putschistes en Afrique
7 septembre 2023Les militaires putschistes ont recours à un discours populiste, axé sur le rejet de la présence occidentale et notamment française. Un discours aux relents nationalistes et souverainistes qui vise à rallier à leur cause les populations et surtout légitimer leur prise de pouvoir par les armes. Le tout sur fond de diverses promesses.
Au cours de sa prestation de serment lundi (04.09), le nouveau président de transition au Gabon, le général Brice Oligui Nguema, a beaucoup promis à ses compatriotes. Il a par exemple juré de "préserver les acquis de la démocratie" ainsi que d'organiser "des élections libres et transparentes" après la transition. Il s'est aussi engagé à amnistier les "prisonniers d'opinion".
Quelques jours seulement après sa prise de pouvoir, le général Brice Oligui Nguema a aussi annoncé qu'il allait affecter les fonds détournés par les anciens dignitaires du pouvoir Bongo au bénéfice des populations.
Un discours également tenu avant lui par les putschistes du Mali et du Burkina Faso qui ont, pour leur part, justifié leur prise de pouvoir par la détérioration de la situation sécuritaire.
"Le résultat d'une mauvaise stratégie"
Etienne Fakaba Sissoko est chercheur au Centre d'analyses politiques, économiques et sociales du Mali et il doute de la sincérité de ces déclarations.
D'après le chercheur : "Tout en disant que l'insécurité est du fait des forces étrangères, ils oublient sciemment de mentionner que cette insécurité est de leur fait. Puisque les militaires qui prennent le pouvoir sont dans les arcanes du pouvoir depuis dix ans, vingt ans, voire plus et que ce sont eux qui ont élaboré pendant toute ces années les stratégies de reconquête de leur territoire. Ce sont eux qui élaborent les stratégies de lutte contre les groupes terroristes. Si résultat négatif il y a, c'est le résultat justement de leur mauvaise stratégie."
Sy Savané Saliou, analyste senior chez Boislandry Consulting, un cabinet d'analyse géostratégique, revient pour sa part sur les raisons pour lesquelles ces discours populistes des putschistes prospèrent au sein des populations.
"Vous avez le vieux ressentiment colonial et puis, vous avez une partie des élites politiques et administratives que ça arrange, parce que ça permet d'occulter leurs travers. La plupart de nos pays, ce sont des pays où 70% des gens ont moins de 25 ans, pour la plupart sans perspective sur le plan professionnel. Mais il est très facile de les manipuler. Vous avez, d'un côté, les djihadistes qui les utilisent, qui surfent sur cette tragédie. Et puis, de l'autre côté, des gens qui surfent en actionnant le sentiment anti-France" explique-t-il.
Que ce soit au Mali, au Burkina Faso, en Guinée, au Niger et plus récemment au Gabon, la prise de pouvoir par les militaires s'est accompagnée de liesses populaires. Signe de l'adhésion d'une partie de la population.