Le nord du Ghana mobilisé contre l’infiltration djihadiste
2 décembre 2025
Alors que la rébellion djihadiste prend de l'ampleur au Sahel et que les conditions de sécurité au Burkina Faso s'aggravent de jour en jour, depuis le coup d'Etat militaire de 2022, les pays côtiers du sud se battent contre le débordement des terroristes.
Dans le nord du Ghana, les groupes terroristes restent discrets mais leur présence a bien été attestée, notamment dans les échanges commerciaux. Les recrutements de combattants ghanéens ne sont pas rares. mais, sur place, gouvernement et acteurs de la société civile s'activent pour sensibiliser les communautés et faire front.
Ainsi, dans la région du Haut-Ghana oriental, sur la petite place du village frontalier de Widnaba, de grands arbres protègent Gifty Awuah du soleil chaud de cette matinée. Elle se rappelle la visite d'un groupe suspect, il y a quelques années.
"On a vu des hommes blancs venir, raconte-t-elle. Ils nous disaient qu'ils étaient musulmans et qu'ils voulaient construire des puits. On l'a pris à la légère parce qu'on pensait qu'ils voulaient aider. De la manière dont ils parlaient, c'est comme s'ils voulaient une certaine dévotion et ils parlaient beaucoup de leur religion aussi."
Détecter et alerter les autorités
Gifty et d'autres femmes volontaires du village ont été formées, début 2025, par l'association locale Codac, à détecter ces comportements, interroger les individus et alerter les autorités. Elle explique que "c'est plus tard que nous avons réalisé que ces gens peuvent aussi venir, non dans le but de nous aider mais pour nous influencer à faire ce qu'ils veulent."
Entre les maisons éparses, on aperçoit les collines qui séparent le Ghana du Burkina Faso. Une route sans poste frontière relie ici les deux pays.
Comme d'autres villages, Widnaba vit sous la pression de la révolte djihadiste voisine: son des explosions, afflux de centaines de Burkinabè à chaque attaque. Le chef a même été menacé directement par téléphone depuis le Burkina Faso il y a quelques mois, en lien avec les prières de la mosquée locale et la foi des jeunes.
Pour Issaku Bukari, directeur de l'association Codac, le schéma est habituel. Il explique que "Si vous regardez les signes et ce qu'ils font pour convaincre les gens, c'est soit à travers la religion, soit à travers d'autres philosophies politiques, des activités économiques ou sociales."
L'argent peut convaincre les nouvelles recrues
Grâce à l'ambassade britannique, Codac a formé 200 volontaires dans trois circonscriptions frontalières. Les habitants sont maintenant vigilants, et les patrouilles militaires ont été renforcées par le gouvernement.
Mais les témoignages d'infiltration et de recrutement restent fréquents. Aaron Kulariba, un autre informateur Codac,
"La dernière fois j'ai entendu que des jeunes se déplaçaient d'ici vers le Burkina Faso pour rejoindre les terroristes, affirme Aaron Kulariba, un autre informateur de la Codac. Je n'ai pas entendu ça que d'une seule communauté, même à Kultamise, même dans la communauté de Nware où je suis maintenant, on m'a dit que les gens essayaient de traverser. Nous sommes vraiment les dernières communautés avant le Burkina Faso."
L'idéologie religieuse dans le nord du Ghana n'est pas à tendance extrémiste, mais tous les habitants s'accordent à dire que l'argument monétaire pourrait convaincre certains jeunes hommes de rejoindre des groupes terroristes.