La chancelière allemande prend sa retraite après seize ans à la tête du gouvernement. Elle en parle au micro de la DW.
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Angela Merkel est en fin de carrière. La chancelière sortante prend sa retraite après seize ans à la tête du gouvernement allemand. Elle continue avec son cabinet d'expédier les affaires courantes jusqu'à la formation d'un nouveau gouvernement. Et en ce moment, elle multiplie les déplacements pour faire "ses adieux" … mais elle a trouvé un moment dans son emploi du temps chargé pour accorder une interview à notre confrère Max Hofmann de la Deutsche Welle… voici quelques morceaux choisis.
'L'intérêt de l'Allemagne en Afrique s'est déplacé' (Angela Merkel)
DW : Quelles crises vous ont le plus marquée durant ses seize années passées comme chancelière?
Angela Merkel: D'abord les arrivées massives de migrants – je n'aime pas en parler comme d'une "crise" car ces personnes sont des êtres humains - ce qui les a poussés à l'exil depuis la Syrie ou les pays voisins. Et puis la pandémie actuelle de coronavirus.
Ce sont peut-être les deux où l'on a le plus remarqué qu'elles avaient un impact direct sur les gens, sur les destins d'êtres humains. Pour moi, c'étaient les plus grands défis. (…) J'ai aussi connu l'émergence du G20 après la crise financière. C'est un cadre important de mon point de vue pour montrer que les problèmes ne peuvent se régler que par la concertation.
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DW : Revenons-en à l'arrivée de près d'un million de réfugiés et de migrants en 2015. A l'époque, vous avez prononcé une phrase devenue culte : "Wir schaffen das", "Nous y arriverons", qui a fait le tour du monde. Pensez-vous qu'on y soit vraiment "arrivé"?
A.M. : Oui, nous y sommes arrivés. Mais il y a eu vraiment beaucoup, beaucoup de gens en Allemagne, qui ont aidé, des maires, de nombreux bénévoles qui assument encore aujourd'hui des parrainages.
Bien sûr, nous avons vu que tout ne se déroulait pas toujours de façon idéale. Et il faut encore améliorer l'aide au développement et agir en faveur de l'immigration légale. (…)
Quel avenir pour les relations germano-africaines après Angela Merkel ?
03:36
DW : A propos des pays d'origine [des migrants], on a l'impression – et corrigez-moi si cette impression n'est pas juste – que vous avez découvert votre intérêt pour l'Afrique à partir de 2015. Plusieurs pays du continent sont des pays d'émigration et vous y avez multiplié les visites, non ?
A.M. :Pas tout-à-fait. Je m'intéressais déjà avant beaucoup à l'Afrique. […] Mais c'est ce que je me disais encore aujourd‘hui, l'intérêt de l'Allemagne pour l'Afrique s'est un peu déplacé de l'Afrique de l'Est, l'Ethiopie, le Kenya – des pays qui étaient au premier plan de nos préoccupations – en direction de l'Afrique de l'Ouest. Pas seulement à cause de l'émigration, mais à cause des défis liés au terrorisme. En fait, depuis la Libye.
C'était une situation dans laquelle l'Allemagne s'est abstenue au sein du vote de l'Otan [pour ou contre une intervention militaire en Libye, en 2011 ].
Angela Merkel : 16 ans en images
Angela Merkel est chancelière depuis 2005. 16 ans plus tard, elle est plus appréciée que jamais. Retour sur ses années au pouvoir et la transformation d'un pays.
Image : picture-alliance/dpa
De l’ombre de Helmut Kohl à la lumière
L’ancien chancelier Helmut Kohl la surnommait "das Mädchen" (la jeune fille). Mais en 2001, lorsque Angela Merkel est à la tête du parti CDU tombé dans l’opposition, elle est depuis longtemps sorti de l’ombre de son mentor, en attendant son heure de gloire en 2005.
Image : picture-alliance/dpa/M. Jung
Victoire sur le fil
Élections législatives de 2005 : la CDU/CSU remporte le scrutin de peu face au SPD de Gerhard Schröder. Le parti CDU s’est présenté avec Angela Merkel comme candidate à la chancellerie. Angela Merkel l’emporte avec le plus mauvais résultat de son parti aux élections du Bundestag depuis 1949.
Image : Stefan Sauer/dpa/picture alliance
La nouvelle chancelière
Angela Merkel se retrouve à la tête d’un gouvernement de grande coalition formée avec les sociaux-démocrates du SPD. Le 22 novembre 2005, elle devient la première femme chancelière de l’Allemagne. Elle devient aussi la plus jeune chancelière et la première Allemande de l’ex-RDA à accéder à ce poste.
Image : picture-alliance/AP Photo/F. Reiss
Une hôte de qualité
Angela Merkel prend rapidement ses marques et gagne en notoriété. Lors du sommet du G8 elle accueille les dirigeants des pays les plus industrialisés à Heiligendamm. Dans une ambiance bon enfant, elle plaisante avec le président russe Vladimir Poutine et son homologue américain George Bush. A cette époque, les relations géopolitiques étaient bien moins tendues.
Image : Toshifumi Kitamura/AFP/Getty Images
Haute en couleurs
Si ses pantalons restent généralement sobres et dans des tonalités foncées, les nombreuses vestes de différentes couleurs deviennent la marque de fabrique d’Angela Merkel. Certains disent que l’on peut déterminer l’humeur de la chancelière ou le message qu’elle souhaite faire passer à la couleur de sa veste.
Image : picture-alliance/AP Photo/M. Schreiber
Une femme dans un monde d’hommes
Politique européenne, automne 2008 : Angela Merkel n’a que peu d’affection pour les deux machos de la scène européenne, à savoir le Français Nicolas Sarkozy et le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi. C’est pourtant elle qui va rapidement se poser en numéro un en Europe lors de la crise financière.
Image : Getty Images/AFP/G. Cerles
La carotte et le bâton
Les dettes de nombreux Etats européens explosent, l’euro est en danger. En contrepartie de plans de sauvetage, Angela Merkel exige des mesures d'austérité dans les pays touchés. En Grèce, face au désarroi de la population, les journaux vont jusqu’à faire un parallèle avec l'occupation allemande pendant la Seconde Guerre mondiale.
Image : picture-alliance/dpa/O. Panagiotou
Pas de grands discours
Ses qualités d’oratrices sont limitées. Elle n’est guère faite pour les bains de foule. Son ton est souvent cassant et elle justifie rarement ses politiques. Mais l’attitude sobre et l’approche pragmatique d’Angela Merkel semblent plaire à une majorité d’Allemands.
Image : Annegret Hilse/REUTERS
Mutti
"Mutti", la "maman" de la nation, deviendra le surnom d’Angela Merkel. Un surnom chargé d’un double sens. Elle est celle qui s’occupe de tout et avec Mutti tout ira bien. Mais sous son autorité, les citoyens qu’elle gouverne restent à tout jamais des enfants.
Image : picture-alliance/dpa/U. Anspach
"Wir schaffen das"
Le fameux "Wir schaffen das" ("Nous y arriverons") est certainement la phrase d’Angela Mekel qui aura le plus divisé la société allemande. Sa décision de ne pas fermer les frontières de l’Allemagne lors de la crise des réfugiés de 2015-2016 va en faire une héroïne pour les uns, une traître pour les autres. Cette division face à sa politique migratoire est aujourd’hui encore un sujet d’actualité.
Image : Anas Modamani
"Personnalité de l’année" en 2015
Time magazine désigne Angela Merkel "personnalité de l’année" en 2015. Le magazine américain va jusqu’à la qualifier de "chancelière du monde libre", pour saluer sa gestion des crises.
Image : picture-alliance/AP Photo/Time Magazine
Entre femmes
Elle est la première femme chancelière, mais n’en a jamais fait une marque politique. Angela Merkel a toutefois boosté la carrière politique de plusieurs femmes, dont Annegret Kramp-Karrenbauer (ancienne cheffe de la CDU et ministre de la Défense), Ursula von der Leyen (présidente de la Commission européenne) ou encore Julia Klöckner (ministre de l’Agriculture).
Image : picture-alliance/M. Schreiber
Raison d’Etat
Angela Merkel ne dit pas tout haut ce qu’elle pense peut-être tout bas. Elle garde secret ses opinions sur les autres dirigeants de ce monde, que ce soit sur un plan politique ou personnel. Tout au plus exprime-t-elle son sentiment de manière très alambiquée afin de faire primer l’intérêt de l’Etat.
Image : picture-alliance/C. Hartmann
Proche du peuple
Elle sait ce que coûte un litre de lait et semble avoir gardé les pieds sur terre, même après autant d’années à la tête du gouvernement. Ici, Angela Merkel visite un supermarché berlinois en 2014 avec le Premier ministre chinois Li Keqiang. Elle a également été vue seule en train de faire du shopping.
Image : picture alliance/dpa/L.Schulze
Le losange de Merkel
On ne sait pas exactement d'où vient la fameuse position des mains en losange d’Angela Merkel. Elle assure que cela l’aide simplement à se tenir droit. Les stratèges du parti CDU ont toutefois utilisé l’image de ce losange comme un symbole de sérénité et de confiance lors de la campagne pour les élections législatives en 2013.
Image : picture-alliance/dpa/S. Simon
Merkel en privé
On ne sait quasiment rien de la vie privée d’Angela Merkel, dont elle ne parle presque jamais. Parmi les rares informations, on sait qu’elle et son mari Joachim Sauer, également diplômé en physique, passent depuis des années les fêtes de Pâques sur l'île italienne d'Ischia
Image : picture-alliance/ANSA/R. Olimpio
Puis arriva la pandémie
L’approche stricte mais aussi le ton parfois émotionnel employé par Angela Merkel pendant la crise sanitaire du coronavirus n’ont pas manqué d’être critiqués. Sa gestion de la pandémie lui a toutefois aussi valu des sondages d’opinion favorables record.
Image : Johanna Geron/Reuters
La fin approche
Cela faisait longtemps qu’Angela Merkel avait annoncé son intention de ne pas briguer un nouveau mandat après l’élection de 2021. Officiellement, elle reste chancelière jusqu’à la formation d’un nouveau gouvernement et l’élection d’un successeur. Si elle est encore en poste mi-décembre, elle battrait le record de longévité de Helmut Kohl.
Image : picture-alliance/dpa
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J'ai été très critiquée pour cela à l'époque. Mais j'étais très, très préoccupée par ce qui allait suivre l'ère Kadhafi, est-ce que ce serait vraiment mieux ? Depuis, il s'est avéré que cela représentait un énorme problème pour la communauté internationale. Et ce sont surtout les pays voisins qui paient les pots cassés, ceux du sud de la Libye, parce que des quantités incroyables d'armes sont tombées entre les mains d'organisations terroristes ce qui provoque une grande déstabilisation de toute la région.
C'est pourquoi il est important de restaurer l'Etat de droit en Libye et d'aider à ce que la Libye appartienne aux Libyens, tout en stabilisant les autres pays. Cela n'a pas directement de lien avec l'émigration. Ce n'est pas du Mali ou du Niger que viennent la plupart des demandeurs d'asile africains. Cela m'a fait découvrir une nouvelle partie de l'Afrique dont l'Allemagne ne s'était pas trop préoccupée durant les décennies précédentes car la France y était très présente.