Iran : le coeur du pouvoir secoué par les manifestations
2 janvier 2018Selon les organisateurs des manifestations, 25% des jeunes diplômés des universités du pays seraient sans emploi. Des estimations qui contredisent les chiffres officiels, deux fois moins importants. Les mêmes sources indiquent qu'une grande partie du budget national de 2017 est attribuée à l'armée et aux structures religieuses - sous le contrôle du guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei.
Ce dernier d'ailleurs est sorti de son silence ce mardi pour accuser ce qu'il qualifie les "ennemis" de l'Iran de s'être unis pour porter atteinte au régime de Hassan Rohani, considéré comme un libéral par les capitales occidentales.
Hassan Rohani face à la contestation
"On parle de lui comme d'un modéré. Mais il faut savoir qu'il en est à son deuxième mandat et donc les promesses électorales n'ont pas été réalisées. Il y a le chômage et il y une situation économique très très grave" déclare Irène Ansari, militante de la Ligue des femmes Iraniennes pour la Démocratie, qui estime que l'actuel président a certes pu arracher un accord sur le programme nucléaire iranien. En revanche, Hassan Rohani a été incapable de réaliser ses promesses électorales.
Face au mouvement de contestation, les autorités ont déployé l'armée et la police. Bilan : 21 morts dont une dizaine de personnes tuées dans la nuit de lundi à mardi. Jusque là, la capitale iranienne Téhéran est globalement moins touchée par les protestations que les villes petites et moyennes même si 450 personnes y ont été arrêtées depuis samedi, selon les autorités.
Dans un discours télévisé, le président iranien Hassan Rohani " demande à toutes les forces de sécurité, les forces de police qui ne se sont pas comportées de manière violente envers les gens, de faire preuve de retenue pour que personne ne soit blessé" avant d'ajouter que "cependant, en même temps, afin de préserver le pays, la nation, la tranquillité et la paix - pour tout cela, les forces de l'ordre resteront fermes et agiront de manière décisive."
Réactions internes et externes
De son côté, l'ancien président, le réformateur Mohammad Khatami, a condamné les violences de ces derniers jours, mais il a aussi dénoncé la "profonde duperie" des Etats-Unis. Il appelle les forces de sécurité à la retenue mais assure que le gouvernement est déterminé à "régler les problèmes de la population".
"Depuis presque 40 ans, ce sont les ayatollahs, les islamistes qui sont au pouvoir en Iran. Et d'ailleurs, c'est une sorte d'Etat islamique. On n'a jamais eu une vraie République en Iran. Le type de pouvoir politique en Iran, même si il y a des élections, ce sont une poignée d'ayatollahs qui le décident", regrette pour sa part Irène Ansari de la Ligue des femmes Iraniennes pour la Démocratie. Elle dénonce également les discrimations à l'égard des femmes votées au parlement iranien.
Mobilisations en sous-main
Les manifestations en Iran auraient été initiées en sous-main par les conservateurs qui contestent la politique libérale du président Hassan Rohani. Mais très vite elles ont échappé à tout contrôle pour déboucher sur des revendications économiques et politiques qui visent le cœur du pouvoir iranien. Ce qui laisse redouter une répression sanglante.