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"La moitié de la population centrafricaine a besoin d'aide"

Jean-Fernand Koena
12 janvier 2021

Rosaria Bruno, responsable du bureau Ocha en République centrafricaine revient sur les conditions de vie difficiles de la population alors que la pays est classé en zone rouge.

Hôpital de la République centrafricaine à Boali
Les besoins en soins, en eau ou en nourriture sont importants dans tout le paysImage : Getty Images/AFP/F. Vergnes

Les alertes de la communauté internationales se multiplient depuis plusieurs semaines en Centrafrique. Alertes après de nouveaux combats en décembre dans le pays. Un pays déjà ravagé par huit années de guerre civile, dans lequel, dix jours avant la présidentielle du 27 décembre, les plus puissants des groupes armés qui se partagent deux tiers du territoire ont lancé une offensive contre le régime du président Faustin Archange Touadéra. 

Une situation toujours plus difficile pour les habitants. En effet, 2,3 millions de personnes sont en insécurité alimentaire et 2,8 millions ont besoin d'une assistance humanitaire. Mais dans ces conditions, il n'est pas facile de venir en aide aux populations pour les organisations internationales. Ce mardi 12 février, dans la matinale info de la DW, Rosaria Bruno, la responsable du bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'Onu sur place, évoque une situation "très, très grave, avec plus de la moitié de la population qui a besoin de protection et de l'aide humanitaire". 

"La survie de certaines personnes civiles est menacée"

DW : La situation sécuritaire est préoccupante en Centrafrique. Qu'en est-il de la situation humanitaire ?

Bruno Rosaria : La situation humanitaire en Centrafrique reste très, très grave. On n'a plus de la moitié de la population qui a besoin de protection et d'aide humanitaire. C'est une crise profonde et il y a plusieurs facteurs qui ont contribué à des besoins humanitaires aigus. Il y a évidemment la pandémie de Covid-19, mais aussi le manque d'infrastructures et des services sociaux de base plutôt limités. Et surtout, récemment : l'insécurité. On a vraiment des personnes dont la survie est menacée, on a 2,3 millions en insécurité alimentaire et chaque fois qu'il y a l'insécurité, ce sont des civils qui souffrent des problèmes pour la population pour accéder au champ et au travail.

La Centrafrique est un petit pays en termes de population, mais, je le répète, la situation humanitaire est sévère et mérite une attention particulière. Parce que la réponse  humanitaire et l'aide que nous fournissons chaque fois permettent aux personnes affectées d'avoir un futur meilleur. 

Je suis rentrée de Bangassou samedi. On a vu des déplacés en ville et dans l'enceinte de l'hôpital. Ils ont besoin d'eau, de nourriture et d'un toit. Ce sont des choses basiques. On a une assistance qui se mobilise.

Situation dégradée dans de nombreuses régions

DW :  Plusieurs zones entre temps classées "vertes" sont désormais zones d'urgence du fait de la résurgence du conflit. Combien sont concernées exactement ?

Bruno Rosaria : On a vu une résurgence de la violence et du conflit armé dans plusieurs parties du pays à l'ouest, au centre au sud-est et aussi dans les zones qui étaient tranquilles, surtout au cours du dernier mois. Si on regarde à Bouar, la situation était vraiment tendue. On a fait une évaluation en tant avec l'Onu : on estime qu'environ 5.200 personnes ont cherché un abri, dans des églises et dans des écoles.

Après une amélioration, la situation s'est a nouveau dégradée à BouarImage : Camille Laffont/AFP/Getty Images

Bouar, était une zone tranquille. Mais la violence tout au long de l'autoroute principale avec le Cameroun est en train de causer en ce moment une interruption du trafic commercial, une interruption de l'entraide humanitaire avec déjà une hausse de prix. À Bangassou, suite aux attaques qui ont lieu le 3 janvier, on a retrouvé de nouveau des déplacés dans la ville et sur les axes et on est dans un contexte volatile où le besoin augmente. 

La semaine dernière on était à Dekoa avec un mission inter-agence, on appui les hôpitaux et on a fait de la réponse multisectorielle parce que à nouveau, nous avons de nouveaux besoins.

Aide de la Minusca

"Les gens ont besoin d'eau, d'un toit, des choses basiques" - Rosaria Bruno

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DW : De tout ce qui précède au regard du tableau que vous brossez ici, tant au niveau de l'évaluation et de la mobilisation qui se mettent en place, croyez vous en la capacité de votre organisation à faire face à la crise ?

Bruno Rosaria : La situation est difficile pour les partenaires humanitaires qui sont sur le terrain. Néanmoins, on a en Centrafrique environ 183 partenaires humanitaires qui travaillent avec beaucoup de dédouanement et qui n'ont pas abandonné la population. Ils sont dans les hôpitaux qui fournissent de l'eau, distribuent de la nourriture. Certes, les préoccupations sont les attaques contre les humanitaires, on a vu le nombre d'incident augmenter.

DW : Qu'attendez vous des protagonistes, du gouvernement et plus précisément de la Minusca censée vous protéger dans l'exercice de votre mission ?

Bruno Rosaria : La Minusca continue à nous aider dans ces jours très difficile. Et je vous donne des exemples : dans plusieurs zones, ils ont sécurisés les staffs humanitaires. Ils ont sécurisé les pistes d'atterrissage.

La manière dont nous travaillons avec la Minusca c'est à travers des lignes dites de coordination civilo-militaires. Il y a un bon dialogue et une bonne compréhension sur les priorités et les jours à venir. 

Moi je suis une humanitaire par vocation et pour moi ce qui est au cœur dans mes approches, c'est la population affectée. Il y a eu trop de souffrance en Centrafrique, la solution n'est jamais les armes. J'espère que dans les jours à venir qu'on puisse avoir un espace opérationnel plus sûr pour continuer à faire notre travail.

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