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La portée politique du pèlerinage du Grand Magal au Sénégal

23 août 2024

C'est ce vendredi que s'achève à Touba le pèlerinage de la confrérie mouride, appelé le Grand Magal, qui signifie en wolof "rendre hommage" ou "magnifier".

Chaque année depuis 130 ans, des musulmans vont en pèlerinage à Touba
Des pèlerins senegalais à ToubaImage : Muhamadou Bittyae/AFP/Getty Images

Environ cinq millions de fidèles participent à la 130e édition de ce pèlerinage qui se tient chaque année en hommage au fondateur du mouridisme, Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké, qui s’est opposé à l’ancien colonisateur français. 

Quelle est la portée du Grand Magal pour les musulmans sénégalais ? 

Voici les explications de Bakary Sambe, professeur au Centre d'étude des religions de l'Université Gaston-Berger à Saint-Louis et président du Timbuktu Institute. 

L'interview de Bakary Sambe

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Bakary Sambe :  Le Magal représente le départ en exil en 1895 au Gabon du  fondateur du Mouridisme, Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké. Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké, pour les musulmans et les mourides est vu comme une personnalité marquante du debut du siècle sur le plan religieux. Mais aussi sur le plan sociopolitique au regard  du rôle qu'il a joué dans ce qu'on appelle la "Résistance culturelle" face à la politique d'assimilation coloniale française. Et sur ce point de vue là, en plus de son aura, sur le plan religieux, du nombre impressionnant de ces disciples au Senegal, dans la diaspora et à travers le monde, Cheikh Ahmadou Bamba Mback est une personnalité très importante dans cet imaginaire religieux sénégalais qui ne s'est jamais déconnecté en fait de l'imaginaire nationaliste du pays.

DW : Et quel rôle joue cette confrérie religieuse, le mouridisme au Sénégal ?

Bakary Sambe : Les confréries religieuses au Sénégal ont un rôle très important sur le plan sociopolitique. Ce rôle la, leur est dévolue pendant la période coloniale ou même l'administration coloniale française, malgré une forme de laïcité que l'on connaît de la France, faisait de ces marabouts, de ces confréries, des intermédiaires obligés par rapport à l'administration.  Il y a une tradition qui s'est institué entre le religieux et le politique dans le pays. C'était pareil pendant la période d'Abdou Diouf, au temps d'Abdoulaye Wade. Ca a connu son apothéose, au regard de son appartenance assumée et revendiquée au mouridisme. Au temps de Macky Sall, ça été aussi le cas et même pour les nouvelles autorités qui sont arrivées au pouvoir en avril 2024. En l'occurrence le président Bassirou Diomaye Faye.

DW : Faut-il forcément appartenir à l'une de ces confréries religieuses pour espérer prospérer en politique au Sénégal ?

Bakary Sambe : Je ne dirais pas de cette manière. Mais, de toutes les façons, les confréries religieuses font partie de l'attelage socio-politique,  de sorte qu'elles deviennent incontournables et que ce sont des identités remarquables: le paysage religieux et politique.

De ce fait, tous les leaders politiques, même s'ils n'appartiennent pas à  une confrérie et cela n'est pas encore arrivé, revendiquent une forme d'appartenance ou de proximité avec les confréries et s'affichent avec ces chefs de confrérie dans le cadre des campagnes électorales, mais aussi dans le cadre des affichages pour des raisons politiques avec ces leaders religieux que sont les chefs des confréries qui occupent une place centrale dans la vie socio politique sénégalaise.