1. Aller au contenu
  2. Aller au menu principal
  3. Voir les autres sites DW

La vente d'armes allemandes dans des zones de conflit

Teyana Klug | Sandrine Blanchard
9 février 2022

L'Allemagne refuse de vendre des armes à l'Ukraine au prétexte qu'elle se trouve dans une "zone de crise". Mais Berlin a déjà fait plusieurs entorses à ses principes.

Le commerce des armes est parfois opaque
Le commerce des armes est parfois opaqueImage : picture alliance/dpa

Les pourparlers continuent pour éviter une guerre ouverte en Ukraine. Les occidentaux affirment, images satellites à l'appui, que la Russie aurait déployé 100.000 soldats prêts à envahir le pays, ce que Moscou dément. L'Ukraine réclame à ses alliés de lui livrer des armes et du matériel militaire pour faire face à cette menace.

>>> Lire aussi : L'Allemagne mise à l'épreuve dans la crise ukrainienne

L'Allemagne, qui a déjà acheminé 5.000 casques sur place, se refuse pour l'instant à livrer des armes. Le chancelier Olaf Scholz et sa ministre des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, affirme que cela serait en contradiction avec la ligne gouvernementale qui interdit la vente d'armes à des zones de crise, "sauf cas exceptionnel"… cette position de principe est pourtant loin d'être suivie à la lettre.

Protection des civils

Officiellement, l'Allemagne ne veut pas fournir des armes à un pays susceptible de les utiliser contre des civils.

Pieter Wiezeman, de l'Institut de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), confirme que des exportations de matériels militaires allemands ont bien eu lieu par le passé, y compris vers des pays en crise ou peu démocratiques. Dans une interview à la DW, il déclare qu'""il n'est évidemment pas vrai que l'Allemagne n'a pas fourni d'armes à des pays ou des acteurs en conflit."

G36 de Heckler und Koch Image : Bernd Weißbrod/dpa/picture alliance

Des pays acheteurs parfois gênants

L'Allemagne a pourtant fourni en 2021 pour plus de quatre milliards d'euros de matériel à l'Egypte, le cinquième pays acheteur d'armes allemandes : des systèmes de défense aérienne et des frégates. Or, ces navires peuvent être utilisés dans des guerres comme celle qui a cours au Yémen, où les blocus navals sont utilisés par les belligérants.

Certaines livraisons d'armes ont défrayé la chronique en Allemagne, comme les contrats passés avec le Qatar, les Emirats arabes unis, la Turquie ou l'Arabie saoudite pour des patrouilleurs. Ces derniers contrats ont été suspendus car très critiqués par l'opinion publique, surtout après l'assassinat de Jamal Khashoggi au consulat saoudien à Istanbul.

Exportations d'armes allemandes vers l'Arabie Saoudite de 2002 à 2019, en millions d'euros

Mais l'Allemagne fait des entorses à son embargo et continue de vendre à Riyad des avions de combat pour ses opérations en collaboration avec l'Otan.

Pieter Wiezemann rappelle aussi que "l'Allemagne a également fourni des armes, par exemple, à la Corée du Sud qui, sur le papier, est toujours en guerre avec la Corée du Nord. Et bien sûr, elle le fait dans l'idée d'aider la Corée du Sud à se défendre contre une éventuelle agression de la Corée du Nord". Suivant cette logique, le chercheur du SIPRI se demande : "Alors, pourquoi ne pas fournir également des armes à l'Ukraine ?"

>>> Lire aussi : L'Allemagne toujours contre l'option militaire en Ukraine

Changements en vue

L'Allemagne ne dispose actuellement d'aucun indice systématique des Etats tiers pour jauger de l'opportunité ou non de leur vendre des armes. Ni de cadre juridique pour encadrer ce commerce.

Les Verts, présents au gouvernement, sont sur le point de soumettre un projet de loi pour rendre les règles qui s'appliquent coercitive.