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L'affaire Demjanjuk et le besoin de savoir

13 mai 2009

A la Une de la plupart des quotidiens: la livraison à l'Allemagne du nazi présumé John Demjanjuk, accusé d'avoir contribué au meurtre de 29.000 juifs pendant la Seconde guerre mondiale et la visite du pape à Yad Vashem.

Monument à la mémoire des 250.000 personnes exterminées au camp de Sobibor, à l'est de la Pologne.Image : AP

Au printemps 1942, écrit la Berliner Zeitung, Demjanjuk ne s'appelait pas encore John, mais Ivan. Il n'était pas encore gardien du camp d'extermination de Sobibor, mais conducteur de tracteur ukrainien puis soldat fait prisonnier par les Allemands. Les détenus slaves avaient le choix entre mourir dans d'atroces souffrances ou se porter volontaire pour aider les tortionnaires dans les camps de concentration. Ivan Demjanjuk, poursuit le journal, a échappé à la mort en se rendant complice de meurtre. Il a été à la fois victime et acteur des crimes allemands. Ce fut son malheur, mais cela ne l'excuse pas.

Le procès de John Demjanjuk risque d'être le dernier des procès nazis, estime la Süddeutsche Zeitung. Ces procès ont été et sont encore terribles parce que la justice allemande a été, dans le passé, terriblement indulgente. La procédure engagée contre le vieux Demjanjuk est-elle une tentative de rattraper les erreurs du passé ? Si c'était le cas, ce serait malvenu : la faute de la justice de l'après-guerre n'est pas rattrapable. Mais la justice d'aujourd'hui peut au moins établir la responsabilité d'un Demjanjuk dans le meurtre de milliers de personnes. C'est de cela qu'il s'agit, et non de punition.

Une idée également développée dans la tageszeitung : il ne s'agit pas de vengeance, mais avant tout d'un besoin de savoir. Seul le criminel présumé sait réellement ce qui s'est passé dans le camp de Sobibor et ce qu'y ont fait les "volontaires" ukrainiens. Un procès pourrait donc, de l'avis du journal, contribuer à répondre au besoin collectif de vérité, dans le bon sens du terme.

Visite du pape au mémorial de Yad VashemImage : AP

Die Welt

revient sur les critiques qui ont entouré la tournée du pape au Proche-Orient. Benoît XVI a-t-il trouvé les mots adéquats lors de sa visite au mémorial de Yad Vashem ? Ses détracteurs ont relevé en tout cas ce qu'il aurait dû évoquer : le pape aurait dû, selon eux, s'excuser au nom de l'Eglise catholique pour l'Holocauste, condamner l'antisémitisme, rappeler le nombre exact de juifs assassinés, s'exprimer sur le rôle controversé du pape Pie XII. Il aurait également dû évoquer son passage dans les jeunesses hitlériennes et parler des juifs "assassinés" et non "tués". Mais Benoît XVI a ignoré toutes ces attentes. Aurait-il dû se douter que sa condamnation sans équivoque de l'antisémitisme du lundi matin serait tombée aux oubliettes dès le lundi après-midi ?

Peut-être, écrit la Frankfurter Allgemeine Zeitung, le pape aurait-il dû répéter dans ce lieu symbolique les paroles prononcées le matin même, ou tout au moins montrer par un geste ou un signe qu'il n'était pas seulement pape mais aussi allemand. Mais apparemment, ce qui lui importait avant tout à Yad Vashem est une chose qu'on ne trouve peut-être qu'à cet endroit : ne pas parler en tant qu'Allemand ou pape, mais rester muet en tant qu'homme pour percevoir, dans l'écho des cris de millions de victimes de la Shoah, l'espoir que la justice et la paix n'existent pas seulement dans l'au-delà.