L'Algérie inquiète face à la crise malienne
11 juin 2012À Alger, on commente la crise malienne avec beaucoup de précaution et on préfère miser sur l'essoufflement de la rébellion. Avec la chute du président Amadou Toumani Touré, le nord du Mali est tombé aux mains de la rébellion touarègue. Mais des groupes islamistes ont aussi pris le contrôle de plusieurs villes de l'Azawad, région frontalière de l'Algérie. Du coup, explique Rachid Allik, ex-journaliste spécialiste du Mali, la situation devient très inquiétante.
« Le Mujao [Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest, NDLR], un groupe dont on ne connaît pas très bien les contours a réussi à s’infiltrer jusqu’à Tamanrasset. Il y a quelques semaines de cela, il a commis l’attentat le plus important de l’histoire à Tamanrasset. Le Mujao serait responsable aussi de l’enlèvement à Tindouf en zone sahraouie de deux expatriés. D’une autre manière, je ne pense pas que les Touaregs algériens puissent être gagnés par une sorte de mouvement autonomiste. Les Touaregs algériens se considèrent comme algériens. »
Pour l'Algérie, la menace est essentiellement islamiste. Les groupes actifs dans la région profitent surtout du désordre. Ce qu'Alger craint par-dessus tout, c'est une partition du Mali qui va renforcer ces groupes. Pour Nouredine Ben Brahem, président de l'ONG Adewaaright, la reconstruction démocratique du Mali devient donc la priorité.
« Le plus important pour les citoyens algériens et la société civile est la reconstruction démocratique de l’État du Mali pour préserver l’unité de ce pays. Le contraire entrainerait certainement des problèmes de voisinage. Il existe plusieurs dangers : l’extension des réseaux terroristes, une instabilité en matière de commerce et des formes de banditisme qui peuvent toucher non seulement l’Algérie, mais aussi tous les pays voisins. »
Partition, désordre, islamistes ; des mots qui font peur aujourd'hui à Alger. Ses voisins pressent l'Algérie d'intervenir militairement. Mais leurs appels ont peu de chance d'être entendus. Alger refuse le principe d'ingérence et préfère employer d'autres moyens pour peser sur la situation.
Auteur : Tarek Draoui (Alger)
Édition : Marie-Ange Pioerron