Le Mali, phare de la musique africaine
22 novembre 2010Les artistes maliens tels que Habib Koïté, Oumou Sangaré ou le bluesman Ali Farka Touré, décédé en 2006, inspirent les musiciens européens et américains. Dee Dee Bridgwater ou Ry Cooder viennent se ressourcer à Bamako. Reportage.
Un lieu mythique : le Studio Bogolan
Morissanda et ses amis discutent des nouvelles techniques d'enregistrement à Quinzanbougou, l'un des quartiers de Bamako. Nous sommes au Studio Bogolan, fondé il y a plus de dix ans par Ali Farka Touré.
Morissanda Kamissoko travaille à son premier album solo „Mogosobeba“ qui devrait être prêt prochainement :
"Le Studio Bogolan a apporté beaucoup de choses aux musiciens maliens. Si tu fais ton mixage au Bogolan, tu sais qu'il sera bien fait."
Le Studio Bogolan est l'un des cinq studios professionnels de Bamako – une ville qui compte sinon plusieurs dizaines de petites structures d'enregistrements. Car le Mali est le pays de la musique en Afrique de l'Ouest. Et Eliezer Oubda, ingénieur du son au Bogolan en a vu passer des stars :
"Il y a de grandes voix ici. C'est indéniable. On peut citer par exemple Oumou Sangaré ou Salif Keita. Je pense que notre succès est à relier à la diversité de notre musique et de nos instruments. Ça sonne très rock, très blues. A mon avis, c'est ce qui impressionne les gens. A partir d'instruments traditionnels, on arrive à faire de la musique, disons, contemporaine."
Tradition et modernité
Mêler traditions et modernité, c'est notamment ce que fait l'un des plus grands artistes maliens Habib Koïté – qui s'est déjà produit sur les plus grandes scènes internationales. Mais attention dit-il. La situation est dangereuse actuellement au Mali - et plus généralement en Afrique. Aucune institution ne défend en effet sérieusement les droits d'auteurs. Et Habib Koïté s'inquiète :
"La situation actuelle est pourrie. On écoutait à l'instant de la musique, dehors. C'était mon boy qui écoutait un morceau de moi sur son téléphone portable. L'autre jour, je lui ai demandé : "C'est une radio que tu as là?" Il m'a répondu : "Non, c'est mon téléphone". Je lui ai dit : "Ah bon. Et qui t'a mis la musiuqe là-dedans? Il m'a répondu que c'était quelqu'un au marché, et que cela lui avait coûté 100 francs CFA. "
100 francs CFA pour un morceau d'Habib Koïté au marché d'à côté. Mais le seul qui gagne dans cette affaire, c'est celui qui télécharge illégalement la musique et la revend au plus offrant. Habib Koité souhaite la création d'une institution comme la SACEM qui lui reverserait un pourcentage sur les gains dus au téléchargement. Il réinvestirait en partie cet argent, comme il le fait avec ses gages, dans la construction d'écoles et d'hôpitaux.
Auteur : Carine Debrabandère
Edition : Audrey Parmentier