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Le "processus de Khartoum" critiqué

Katrin Matthei, Konstanze von Kotze10 septembre 2015

Dans le but de freiner l'afflux de réfugiés africains, l'Union européenne envisagerait de coopérer avec des régimes tels que celui de l'Erythrée et du Soudan. Les défenseurs des droits de l'homme dénoncent cette idée.

Le processus de Khartoum a été signé le 28 novembre 2014
Le processus de Khartoum a été signé le 28 novembre 2014Image : picture-alliance/dpa/Lupi

Le "processus de Khartoum" est un partenariat qui vise à lutter contre le trafic d'êtres humains dans la Corne de l'Afrique mais aussi, et surtout, à empêcher les migrants de rejoindre l'Europe, en les incitant à rester dans leur pays d'origine. Peu importe que ce pays soit l'Erythrée, le Soudan, ou la Libye. D'où la colère des militants des droits de l'Homme.

Mauvaise nouvelle pour les Erythréens

Parmi les réfugiés, il y a de nombreux Erythréens fuyant la répressionImage : DW/Yohannes G/Egziabher

Chaque mois, environ 5.000 Erythréens fuient leur pays selon les Nations unies. La plupart des réfugiés africains qui arrivent en Europe viennent d'Erythrée, la "Corée du Nord de l'Afrique" comme on la surnomme parfois. Violations des droits de l'homme, exécutions extra-judiciaires, torture, violences à l'encontre des femmes - le dernier rapport de la commission des droits de l'Homme de l'Onu est édifiant. Et pourtant, c'est bien avec Asmara que l'Union européenne veut coopérer, officiellement pour lutter contre le trafic d'êtres humains.

Une cause juste, bien-sûr, estime Barbara Lochbihler mais la politique européenne n'en reste pas moins paradoxale, dit la député des Verts qui siège au sein de la commission pour les droits de l'Homme de l'Union européenne :

«Le réfugié qui veut et qui est obligé de fuir doit être protégé. Normalement, cela devrait être dans l'intérêt de l'Union européenne. Mais ici, le réfugié est persécuté par un Etat avec lequel on collabore. C'est paradoxal. Biensûr qu'il faut lutter contre le crime organisé mais pas sur le dos de ceux qui ont besoin de protection.»

Un sujet tabou ?

L'Union européenne réfléchit à une répartition par quotas des réfugiésImage : picture-alliance/dpa/D. Kalker

L'Erythrée n'est qu'un exemple. La collaboration européenne avec le Soudan et le Soudan du Sud dans le but d'améliorer les contrôles aux frontières est également épinglée par les défenseurs des droits de l'Homme. Lotte Leicht travaille pour l'organisation Human Rights Watch : «Ce n'est pas compliqué : lorsque l'on passe un accord avec ce genre de pays, il ne faut pas s'attendre à ce que les personnes soient protégées. L'un des premiers objectifs du processus de Khartoum semble bien plus de permettre à l'Union européenne d'éloigner la réalité de ses frontières. De ne pas voir les réfugiés atteindre ses côtes. De ne pas les voir sauter des bâteaux. De faire en sorte qu'ils restent où ils sont. »

Le processus de Khartoum n'est pas le genre de texte sur lequel Bruxelles aime communiquer. Même le Parlement européen est mal informé. C'est assurément un bon moyen pour empêcher tout débat public sur le sujet.