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Le "vol" d'une oeuvre africaine spoliée devant la justice

30 septembre 2020

L'activiste congolais Emery Mwazulu Diyabanza et quatre autres personnes encourent des amendes pour avoir tenté de s'emparer d'une oeuvre du Tchad exposée au Musée du Quai Branly à Paris, en juin 2020.

Emery Mwazulu Diyabanza devant la justice
Emery Mwazulu Diyabanza devant la justice à Paris ce 30 septembreImage : Thibault Camus/AP/picture alliance

Ils souhaitaient faire de leur procès, ce mercredi au Tribunal de grande instance de Paris, une tribune médiatique pour dénoncer le "pillage de l'Afrique". L'activiste congolais Emery Mwazulu Diyabanza et quatre autres personnes ont comparu pour répondre de "tentative de vol en réunion d'un objet mobilier classé", dans le musée parisien du Quai Branly, en juin dernier. Pour avoir tenté de s'emparer d'un poteau funéraire Sara du Tchad du XIXe siècle, les cinq prévenus devraient s'en tirer, au pire, avec des amendes.

La violence du passé colonial s'étend jusqu'au domaine de la cultureImage : picture-alliance/akg-images

Infraction ou Histoire

"Nous sommes ici pour juger une infraction pas pour juger l'Histoire", a rappelé d'emblée le président du tribunal. Emery Mwazulu Diyabanza et ses compagnons voient la chose autrement. Ils se sentent en effet investis d'une mission de taille : récupérer, dans des musées européens, des œuvres pillées en Afrique durant l'ère coloniale, symboles du "colonialisme et de l'esclavagisme".

Des dizaines de milliers d'oeuvres pillées sont exposées dans les musées européens. Ici, des sculptures du Bénin dans une vitrine à HambourgImage : picture-alliance/dpa/D. Bockwoldt

Qui est le "véritable voleur" ?

Leur objectif, ils le clament : que ces œuvres "rentrent à la maison". C'est ce qu'explique l'avocat d'Emery Mwazulu Diyabanza, Calvin Job : "Le vrai voleur, ce ne sont pas mes clients et nous sommes ici pour le prouver. La vraie question ici est celle de la colonisation parce que tout cela découle de là. Nous sommes ici car il y a des œuvres d'art qui ont été pillées, volées pendant les guerres coloniales et qu'on les retrouve dans les musées français. "

Emery Mwazulu Diyabanza sait comment s'y prendre pour rendre ses actions visibles : il les filme et les poste sur les réseaux sociaux, comme cette vidéo du 12 juin qui le montre en train de tenter de s'emparer du poteau funéraire au Musée du Quai Branly.

Les soutiens des prévenus se sont mobilisés devant la salle d'audience parisienne pour réclamer davantage de restitutions que celles auxquelles s'est déjà engagée la France pour des œuvres du Sénégal et du Bénin.

Un débat qui ne fait que commencer...

L'avocat du musée a reconnu que le débat sur la restitution était ouvert mais il estime que le geste des cinq prévenus risquait d'être "contre-productif" en portant atteinte aux discussions en cours avec plusieurs Etats en Afrique. Les prévenus risquaient jusqu'à dix ans d'emprisonnement et 150.000 euros d'amende. Le parquet a requis 1.000 euros d'amende contre Emery Mwazulu Diyabanza et 500 avec sursis pour ses quatre coprévenus. Le jugement sera rendu le 14 octobre.

Felwine Sarr et Bénédicte Savoy: leur rapport est loin d'avoir été suivi en intégralitéImage : Getty Images/AFP/A. Jocard

En 2017, Emmanuel Macron avait tenu un discours à Ouagadougou dans lequel il avait évoqué la nécessité pour la jeunesse africaine d'avoir accès à son patrimoine.

En novembre 2018, les chercheurs Bénédicte Savoy et Felwine Sarr avaient remis un rapport au président français dans lequel ils dressaient un calendrier des restitutions, ainsi que l'inventaire de dizaines de milliers d'œuvres africaines spoliées durant la colonisation. Jusqu'à présent, seul un sabre a été rendu au Sénégal et 26 objets devraient retourner au Bénin d'ici l'année prochaine.

>>> Pour en savoir plus, regardez cette vidéo :

La question de la restitution des objets d'art africains fait débat

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