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Les migrants de Lesbos, épuisés et sans illusions

16 septembre 2020

Les demandeurs d'asile de Moria sont les victimes des années d'errance du dispositif d'asile européen. Reportage à Lesbos.

A Lesbos, les 12.000 migrants du camp dévasté de Moria dorment dans la rue depuis plusieurs jours
A Lesbos, les 12.000 migrants du camp dévasté de Moria dorment dans la rue depuis plusieurs joursImage : DW/M. Karakoulaki

Plus de 12.000 demandeurs d’asile vivent encore dans la rue à Lesbos après les cinq incendies successifs qui ont dévasté le camp de Moria, le plus grand camp de migrants d’Europe.

Plus qu’un camp c’était un cloaque ou les êtres humains, dont plus de 4.000 enfants, vivaient au milieu des rats et des serpents entourés d’ordures. La violence et les échauffourées étaient quotidiennes et l’incendie n’a été que l’aboutissement d’une catastrophe annoncée.

A lire également : L'Allemagne ouvre ses bras aux migrants de la Grèce

Pour autant, le gouvernement grec, soutenu par l’Union européenne qui fait en sorte que les demandeurs d’asile ne traversent pas les frontières grecques, continue sa politique répressive et de non intégration des migrants avec un seul message : restez ou vous êtes, rien de bon ne vous attend en Europe.

Sans avenir à Lesbos : écoutez le reportage de notre correspondant

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Joint par téléphone, Rais, syrien, est le porte-parole de sa communauté à Moria :

"Avant, on nous donnait trois repas par jour, maintenant on n’en a plus qu’un seul. Il n’y a ni douches ni toilettes, on va dans les buissons. On dort tous à la rue, on s’en remet à Dieu et à notre foi."

A même le bitume

Totalement épuisé et sans aucune illusion, Rais explique qu’il passe son temps à calmer la colère des demandeurs d’asile qui en sont pour la plupart à leur huitième nuit à dormir dehors, à même le bitume.

Cette colère est entretenue par la politique de plus en plus restrictive du gouvernement  grec et sur laquelle l’Europe ferme les yeux, comme le soutient Konstantinos Markidis de l’ONG ARSIS :

"Si ces gens avaient été sociabilisés et que leur situation était une situation humaine, cela aurait réduit drastiquement la peur des Européens et on aurait pu parler d’une répartition équitable de leur relocalisation. Maintenant quand le citoyen allemand voit ces images de Moria et qu’on lui dit : Tu dois prendre une partie de cela, il dit non, je ne veux pas. Pourquoi en voudrait-il ? Cela fait peur. Mais la vrai question est pourquoi Moria existe ?"

Athènes reste ferme

De fait, la priorité du gouvernement grec n’est ni à l’intégration ni à l’amélioration des conditions de vie des migrants mais à prévenir tout nouvel incendie dans les différents camps du pays, d’où la fermeté du porte-parole du gouvernement, Stelios Petsas :

"Certains ne respectent pas le pays qui les accueille. C’est pourquoi ils ont mis le feu une deuxième fois, ce qui a détruit la plus grande partie du camp. Ils l’ont fait car ils ont cru que s’ils brûlaient Moria, ils pourraient partir plus facilement. On leur dit qu’ils n’ont pas bien compris. Seul les mineurs non accompagnés partiront et ils sont déjà évacués".

Si un peu moins de 2.000 réfugiés aux statut reconnu vont être relocalisés en Europe, les autres devront, selon le premier ministre, intégrer, de gré ou de force, le nouveau camp de Moria, interdit à la presse et aux ONG.

L’intégration dans ce camp n’est pas facultatif, a martelé le premier ministre Kiriakos Mitotakis, mais obligatoire.

Huit unités de forces anti-émeute ont été envoyées à Moria pour parer à tout affrontement.

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