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L'Ethiopie en guerre contre la région du Tigré

Sandrine Blanchard | Silja Fröhlich
5 novembre 2020

Le Premier ministre Abiy Ahmed a décrété l'état d'urgence pour six mois dans la région du Tigré, dans le nord. Des heurts ont été signalés entre l'armée et le TPLF au pouvoir dans cette région.

Abiy Ahmed à la télévision, le 4 novembre 2020
Abiy Ahmed à la télévision, le 4 novembre 2020Image : Ethiopia Broadcasting Corporation//REUTERS

En Ethiopie, les députés ont approuvé l'état d'urgence décrété pour six mois pour la région du Tigré. Le gouvernement fédéral accuse les autorités de cette région du nord, dirigée par le TPLF, d'avoir lancé des attaques contre des bases de l'armée nationale. Le premier ministre Abiy Ahmed entend contrer ces actes de dissidence et a annoncé le lancement d'opérations militaires contre les autorités régionales. Toutefois, ces bruits de botte en Ethiopie inquiètent à l'étranger. 

Ethiopie: région du Tigré (en anglais)

Abiy Ahmed, Prix Nobel de la paix 2019, envoie donc l'armée dans le Tigré. Dans une allocution télévisée, le premier ministre éthiopien s'est déjà félicité hier [mercredi] soir du succès de la première opération militaire lancée dans cette région du nord du pays, frontalière de l'Erythrée.

Une longue opposition 

Officiellement, cette opération est destinée à reprendre le contrôle de bases de l'armée fédérale attaquées par le Front de libération du peuple du Tigré (TPLF) au pouvoir dans cette région habitée par le quatrième groupe ethnique le plus important du pays.

Pour rappel, le TPLF marxiste-léniniste a été le parti dominant en Ethiopie et il s'oppose à la politique d'Abiy Ahmed.

Rassemblement de partisans du TPLF après les élections régionalesImage : Million Hailesilassie/DW

Redwan Hussein, porte-parole de la cellule de crise à Addis Abeba.

"Il ne s'agit pas là d'un conflit entre le peuple tigréen et les autres citoyens d'Ethiopie, ni entre la région du Tigré et le gouvernement fédéral. Il s'agit plutôt d'un conflit avec un tout petit groupe qui défend fortement ses propres intérêts et qui est déterminé à déstabiliser notre nation."

L'état d'urgence validé par les députés à Addis Abeba autorise le gouvernement fédéral à suspendre les droits politiques et démocratiques dans la région, soit six mois de restrictions dans les déplacements, dans les communications, de perquisitions sans mandats, d'arrestations préventives, de couvre-feu.

Etat d'urgence pour six mois

Toutes les liaisons téléphoniques et internet ont été coupés, ce qui rend la vérification des informations difficiles. Comme celle publiée par le TPLF qui prétend qu'une partie des soldats de l'armée d'Ethiopie aurait déserté pour rejoindre ses rangs et combattre le pouvoir central.

Des soldats éthiopiens (image d'archive picture alliance/AP Photo/ltomlinson)Image : picture alliance/AP Photo/ltomlinson

Il est difficile aussi d'estimer quelle est la puissance de résistance militaire réelle du TPLF face à l'armée fédérale.

D'après plusieurs agences de presse, les combats seraient surtout concentrés dans l'ouest du Tigré. Une douzaine de soldats fédéraux blessés auraient été admis dans un hôpital près de la frontière avec la région Amhara.

Depuis plusieurs mois, la tension montait entre Addis Abeba et les autorités régionales qui ont bravé l'avis des autorités fédérales et organisé des élections régionales considérées comme "illégales" par le gouvernement.

Des risques pour la sous-région

Les connaisseurs de la région comme William Davison, chercheur à l'International Crisis Group, craignent que cette reprise des affrontements ait des répercussions dans tout le pays mais aussi au-delà des frontières de l'Ethiopie : en Somalie, au Soudan, voire même au Yémen.

"C'est pourquoi il est primordial que la communauté internationale fasse tout son possible pour que les deux partis en lice revoient leur approche du problème et engagent un dialogue, afin d'éviter une escalade de ce conflit qui serait désastreuse."

Le Secrétaire général de l'Onu, Antonio Guterres, s'inquiète des combats dans le Tigré, il appelle à l'apaisement et à la résolution pacifique du différend.

Les Etats-Unis appellent à un cessez-le-feu immédiat pour "protéger les civils".

Mais pour l'heure, l'amorce d'un dialogue reste hautement improbable.

 

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