Au Mali, le couvre-feu fait des mécontents
4 juillet 2025
Le couvre-feu est en vigueur à Kayes, dans l’ouest du pays, depuis la nuit dernière et débute à 21 heures pour s’achever à 06 heures . Il s’étendra sur une période de 30 jours, reconductible.
Une mesure contraignante selon Ousmane, soudeur dans la ville de Kayes :
"La principale difficulté pour nous, c’est le délai de livraison des produits qui va s’allonger avec le couvre-feu. Sinon autrement, à mon avis, côté gain, on ne devrait pas avoir de problèmes. Mais avec les clients, certainement oui. Car, nous n’allons plus pouvoir travailler la nuit et avec les coupures d’électricité, cela constitue un handicap. Mais le couvre-feu, c’est pour notre sécurité aussi", avoue ce soudeur.
Les habitants de Ségou (dans le centre du pays) sont sous couvre-feu depuis le 04 juin dernier. Les activités cessent donc dès le coucher du soleil.
Kany, vendeuse de fruits et légumes estime que cela affecte grandement son activité :
"La mévente nous préoccupe actuellement. Parce que lorsqu’on ne peut pas écouler nos produits à une certaine heure de la nuit, c’est un casse-tête. Nos fruits et légumes pourrissent vite et c’est une grande perte pour nous", confie-t-elle, amère.
"En gros, c’est la salade, la pomme de terre, les concombres, la banane entre autres. Avant le couvre-feu, on débutait la vente à 16H pour finir à 23h, mais maintenant, c’est de 16H à 19H. Du coup, nous perdons la moitié de nos clients."
Amadou Ntigui Konaré, enseignant chercheur et économiste à l’université de Bamako, reconnaît pour sa part que le couvre-feu peut contribuer à empêcher les braquages et les regroupements suspects la nuit. Celui-ci affirme toutefois que les impacts de cette mesure restrictive peuvent être négatifs pour les citoyens :
"Ce sont les petits commerçants, les vendeurs de rue, les chauffeurs de taxi auto ou moto entre autres, qui en paient le prix fort. Beaucoup d’entre eux exercent leurs activités le soir. Le couvre-feu les prive ainsi de revenus substantiels à leur survie ainsi qu’à celle de leurs familles respectives. Il y a aussi les difficultés d’accès aux soins, en particulier les urgences médicales", explique l'universitaire.
"Se rendre à l’hôpital devient un parcours du combattant exposant les malades à des risques inutiles. Cela a également des effets sur les élèves et les étudiants, notamment lorsqu’il fait chaud ou quand il y a la coupure d’électricité durant la journée. Cette contrainte horaire limite leur temps de réflexion et nuit à leur rendement."
A Tombouctou, dans le nord du pays, sur décision du gouverneur, le couvre-feu est de nouveau ramené à 23 heure pour prendre fin à 06 heure du matin. Un allégement qui avait été réclamé par les populations de la région.