Quel avenir pour l'opposition politique dans l'AES ?
6 mai 2025
Dans les trois pays de l'AES, les activités des partis politiques sont soit suspendues soit menacées de suspension. C’est dans ce climat de tension politique que des centaines de personnes ont manifesté samedi et dimanche à Bamako à l’appel d’une coalition de partis politiques.
Elles entendaient dénoncer les menaces qui planent sur la vie politique et les libertés. Mais si l'opposition politique bouge au Mali, ce n'est pas le cas au Niger et au Burkina Faso, où les acteurs politiques semblent se retrancher dans une sorte de résignation et de peur.
L'opposition se réveille au Mali
Si au Mali, la coalition des partis politiques tente de faire face au pouvoir militaire, cela est en partie due à la transition militaire qui a duré plus longtemps dans ce pays. Car, cela fait plus de quatre ans qu'Assimi Goïta a pris le pouvoir par un coup d'État.
Ainsi, à Bamako, les mouvements de défiance se multiplient à l’égard des autorités militaires. Une centaine de partis politiques regroupés au sein de l'IPAC, l'initiative des partis politiques pour la charte, appelle d’ailleurs à une grande mobilisation ce vendredi à l'emblématique place de la Liberté.
Les organisateurs de la manifestation comptent se faire entendre à travers des messages allant dans le sens du respect de la constitution et du retour à l'ordre constitutionnel et donc la fin de la transition.
"Notre objectif est clair : affirmer notre attachement au respect de la Constitution, à la démocratie et aux libertés fondamentales. Cette mobilisation est nationale avec des actions simultanées prévues dans les régions, les cercles et les communes. Nous voulons interpeller les autorités sur des décisions unilatérales, notamment les procédures visant à dissoudre les partis politiques", explique Fouraba Samaké, du parti pour l'action civique et patriotique.
" C'est une manifestation bien organisée, encadrée, sans provocation, avec un message fort mais responsable. Nous exigeons un calendrier électoral des institutions légitimes, et le respect des droits des citoyens n'est pas une confrontation, mais c'est une exigence démocratique."
La terreur au Burkina Faso...
L’exigence du respect des droits des citoyens est devenue une quête dont on parle très peu ou du moins publiquement au sein des partis politiques et des organisations de la société civile opposés à la prolongation de la transition militaire au Burkina Faso. C'est du moins ce que nous explique ce Burkinabè qui a préféré s'exprimer sous anonymat.
"C'est certain qu'il y a des inquiétudes, nous déplorons la situation, mais bon, qu'est-ce qu'on peut faire, pour l'instant ? Aujourd'hui au Burkina, même au téléphone, les gens ne parlent plus", assure-t-il au micro de la DW.
"Moi, j'ai des connaissances qui ont été arrêtées depuis 2 ans, 3 ans, on ne sait pas où elles sont. C'est la méfiance totale, c'est vraiment assez complexe. Je ne pense pas qu'il y en ait beaucoup qui oseront donner leur avis sincère sur la situation."
...et au Niger
Au Niger également, depuis le coup d’État militaire, plusieurs organisations à caractère politique ont déjà été dissoutes et les activités des partis politiques suspendues.
Sahanine Mahamadou, ex-conseiller du président nigérien déchu Mohamed Bazoumrevient sur cette situation.
"C'est vrai, ça bouge beaucoup plus au Mali qu'au Niger. Mais pour le cas spécifique du Niger, la raison, c'est qu'au Niger, ce n'est pas un coup d'État, c'est un complot. C'est l'ancien président Issoufou Mahamadou qui est à la base de ce coup d'État", affirme-t-il.
"A Niamey, ceux qui ont soutenu le coup d'État, ce sont les militants de Lumana, traditionnellement partis opposés, l'opposition de notre mouvance."
Au Niger, au Burkina Faso et au Mali, les régimes militaires qui semblent s'installer durablement au pouvoir répriment les activités de tous les partis politiques qui s’opposent à leur maintien au pouvoir.
Selon le dernier rapport sur la liberté de presse de Reporters sans frontières (RSF), la liberté d'expression a fortement reculé dans ces trois pays.