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Nancy Pelosi à Taïwan, une visite opportune ?

Marco Wolter | Avec agences
5 août 2022

Alors que les manœuvres militaires se poursuivent, les conséquences de la visite de Nancy Pelosi à Taipei sont aussi discutées et critiquées aux Etats-Unis.

Nancy Pelosi lors de sa conférence de Presse à Tokyo
En visite à Tokyo, Nancy Pelosi a réaffirmé son droit à visiter librement TaïwanImage : Issei Kato/REUTERS

Les grandes manœuvres de l’armée chinoise se poursuivent dans le détroit de Taïwan, à seulement une vingtaine de kilomètres de l’île, en réponse à la visite cette semaine de la cheffe des députés américains Nancy Pelosi. Selon Taipei, des dizaines d’avions et de navires de guerre chinois sont entrés dans la zone de défense taiwanaise. Des missiles se sont aussi abattus dans une zone réservée au Japon. 

Le pouvoir chinois diffuse des images de ses manoeuvres militaires au large de TaïwanImage : Xinhua/AP/picture alliance

Dans le même temps, l’escalade se poursuit entre la Chine et les Etats-Unis. Pékin a suspendu aujourd’hui une série de programmes de coopération avec Washington, notamment les négociations sur le changement climatique. La Chine a aussi décidé de prendre des sanctions contre Nancy Pelosi, considérée depuis des années comme une fauteuse de troubles par le pouvoir communiste. 

Tienanmen et JO 

Nancy Pelosi a elle-même rappelé que son bras de fer avec la Chine ne date pas d’hier, en publiant sur son compte Twitter une vidéo dans laquelle on la voit, en 1991, sur la place Tienanmen pour rendre hommage aux victimes du massacre de manifestants prodémocratie qui s’était produit deux ans plus tôt.   

Un événement que le parti communiste chinois tente depuis toujours d’effacer de la mémoire du pays. 

En 1991, Nancy Pelosi avait provoqué l'ire de Pékin en se rendant sur la Place Tienanmen avec une banderole "à ceux qui se sont morts pour la démocratie"Image : AP Photo/picture alliance

D’autres épisodes de confrontation avec le pouvoir chinois sont les lettres adressées par la responsable démocrate à l’ancien président Hu Jintao, lui demandant de libérer les prisonniers politiques en Chine et au Tibet.    

Enfin, depuis toujours, Nancy Pelosi appelle au boycott des Jeux Olympiques en Chine, que ce soit en 2008 pour les jeux d’été, ou cette année lors des jeux d’hiver, et ce au nom des droits de l’homme.   

Prioriser l’Ukraine   

Dans un éditorial très critique de cette visite à Taïwan, le Washington Post parle des "dommages" causées par Nancy Pelosi qui a choisi le mauvais moment pour défier la Chine, soutenant même qu’elle a voulu se payer une tribune avant les élections de mi-mandat à l’automne aux Etats-Unis, où elle pourrait perdre son poste de cheffe de la Chambre des représentants.    

 

La visite de Nancy Pelosi est vue comme une violation de la souveraineté chinoise par PékinImage : Kin Cheung/AP Photo/picture alliance

Bien que le journal soutienne sa solidarité vis-à-vis de Taipei, les éditorialistes trouvent que "la situation géopolitique est déjà suffisamment instable" dans le monde pour ne pas en rajouter, et que la guerre en Ukraine devrait être la priorité diplomatique.   

L’autre grand quotidien américain, le New York Times, parle dans une analyse d’une Asie qui constate un "environnement plus instable et dangereux" depuis la visite de Pelosi.   

Course à l’armement   

Le journal rappelle que la région est dans une course à l’armement et explique que "les Etats-Unis veulent lourdement armer Taïwan, transférer des technologies pour la propulsion de sous-marins nucléaires à l’Australie et certainement installer de nouvelles bases de tirs de missiles dans la région". Le tout pour faire face à une Chine qui ne cesse de renforcer ses capacités militaires.    

Les exercices militaires chinois se déroulent à seulement une vingtaine de kilomètres des côtes taïwanaisesImage : Hector Retamal/AFP

Les manœuvres opérées depuis hier en sont une preuve grandeur nature, selon un chef des opérations de renseignement dans le Pacifique et ancien capitaine de la marine américaine. Cité par la chaine CNN, Carl Schuster estime qu’en entourant militairement Taïwan, "le signal géopolitique envoyé par la Chine est de montrer qu’elle peut à tout moment fermer l’accès aérien et maritime à l’île."   

Le ministre de la Défense taïwanais parle lui aussi d’un “blocage maritime et aérien”.   

Conséquences à long terme   

Ces manœuvres doivent se terminer dimanche. Reste à voir quelles seront les conséquences à long terme de cette visite. Au-delà de la démonstration de force, la Chine a déjà annoncé suspendre des importations de fruits et de poisson depuis l’île.  Pékin bloque aussi les exportations de certains produits.   

Comme le précise la radio publique américaine NPR, la dernière grande crise entre la Chine et Taïwan, au milieu des années 90, avait éclaté parce que le président taiwanais d’alors s’était rendu dans une université américaine pour un discours. La Chine avait répondu par plusieurs mois d’opérations militaires.   

Comme pour la visite actuelle de Pelosi à Taïwan, "Pékin estimait que les Etats-Unis affaiblissent progressivement la politique d'une seule Chine". 

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