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Au Niger, l’enregistrement des naissances est un défi majeur

Balkissa Sidi Ahmed
11 juillet 2024

Des millions d’enfants sont privés de leurs droits fondamentaux, une situation qui a des conséquences sur leur accès à l’éducation et à d’autres services essentiels.

Une femme et son enfant au Niger
Au Niger, une femme a en moyenne environ 6 enfants Image : DW/A. M. Amadou

Ce 11 juillet marque la Journée mondiale de la population, consacrée cette année à l’importance du recensement, notamment celle des communautés les plus marginalisées qui restent sous-représentées dans les données démographiques.

Au Niger, l’enregistrement des naissances demeure un défi majeur avec un taux de déclaration d’à peine 64%. Des millions d’enfants sont ainsi privés de leurs droits fondamentaux, une situation qui a notamment des conséquences sur leur accès à l’éducation et à d’autres services essentiels.

Face à cette situation, le gouvernement nigérien a lancé une campagne d’enregistrement mobile d’un million d’enfants d’ici la fin de l’année 2024. Mais ce processus devra passer par les femmes qui, dans les milieux les plus traditionnels, ne sont souvent pas autorisées à déclarer la naissance de leurs enfants.

"J’ai toujours voulu qu’il ait les même chances que ses camarades, mais je ne savais pas comment faire. C’est son père qui s’est chargé de la déclaration. Quand je lui ai proposé de retirer l’acte de naissance, il a fait tout un problème parce qu’il avait égaré le carnet de famille. Au moment où j’ai voulu l’inscrire à l’école, il n’avait en fait pas d’acte de naissance. Dites aux hommes de nous autoriser à faire les déclarations !", témoigne Gaika, mère de six enfants. Un cri de coeur partagé par beaucoup de mères au Niger.

Pas d'école, faute de pièce d'identité

L’un des fils Gaika, Djafarou, aujourd’hui adolescent, n’a pas la chance d’aller à l’école. C’est comme s’il n’existait pas aux yeux de la loi, faute d’acte de naissance. 

Une autre femme, mère de trois enfants, qui préfère garder l’anonymat, a eu pour sa part plus de chance, car son époux a effectué toutes les formalités nécessaires : "En ce qui me concerne, c’est leur papa qui a fait les déclarations dès la maternité et tout ce qui s’ensuit".

Ces deux témoignages illustrent un phénomène plus large : les hommes dominent les déclarations de naissances à cause du poids des traditions. 

Des millions d’enfants, en Afrique, sont privés de leurs droits pour manque d’enregistrement dès leur naissance. Image : AP

Au Centre de santé intégré de la ville Gaya, au sud du Niger et à la frontière avec le Bénin. Le responsable du centre, Ousmane Dan Lélé, dresse le bilan des deux derniers mois. "Pour le mois de mai, nous avons enregistré 70 accouchements avec 48 déclarations faites par des hommes et 16 autres par des femmes. Pour le mois de juin, 68 naissances, dont 44 ont été déclarées par des hommes", explique-t-il.

Cette situation contribue au faible taux d’enregistrement des naissances au Niger, surtout dans la commune rurale de Tounouga, située dans le département de Gaya. 

Campagne de recensement

Face à ce constat, les autorités nigériennes ont lancé une campagne d’enregistrement mobile des naissances. Selon le directeur départemental d’Etat civil des migrations et des réfugiés de Gaya, Mohamed Sani, un accent particulier est mis sur la mobilisation des femmes.

"Les principaux concernés sont les parents. Aujourd’hui, ils ont eu la chance d’avoir l’enregistrement mobile. Mais concernant toutes les naissances survenues, que ça soit à domicile ou dans les formations sanitaires et qui n’ont pas dépassé les soixante jours, les parents doivent tout faire pour les enregistrer, parce qu’après ça sera un peu difficile pour quelqu’un qui est dans un hameau" précise-t-il.

Certains hommes rencontrés n’hésitent pourtant pas à avouer que si les femmes s’occupaient de faire la déclaration dès la maternité, ça serait un fardeau de moins pour eux.