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Au Niger, les raisons de la libération de Salem Bazoum

Mahamadou Abdoulkarim | Carole Assignon
10 janvier 2024

La liberté provisoire accordée à Salem Bazoum pourrait ouvrir la porte à la libération de son père, alors que la junte veut une reconnaissance du régime militaire.

Le chef de la diplomatie togolaise Robert Dussey durant une interview
Le Togo reste trés impliqué dans la médiation pour la résolution de la crise au NigerImage : DW

Salem Bazoum, 22 ans, était retenu par les militaires depuis le 26 juillet dernier avec ses parents à la résidence présidentielle. Sa remise en liberté est présentée comme un geste " humanitaire" et "d'apaisement". 

Si Salem Bazoum est désormais un homme libre, c'est grâce à la médiation de pays comme le Togo, désigné médiateur avec la Sierra Leone, le Bénin et le Nigéria par les chefs d'État de la Cédéao, pour rechercher une solution négociée à la crise politique au Niger à la suite du coup d'État du 26 juillet.

"C'est une libération naturelle. C'est dans le cadre du fonctionnement régulier de la justice que Salem a retrouvé sa liberté", explique à la DW le ministre nigérien de la Justice, Alio Daouda.

Selon lui, si la médiation a joué un rôle dans la remise en liberté provisoire de Salem Bazoum, le statut d'étudiant du jeune homme a visiblement aussi été pris en compte "étant entendu qu'il a été inculpé et laissé en liberté par le juge d'instruction qui n'a pas jugé nécessaire de le laisser en détention au regard du contexte. Puisque Salem est un étudiant, on a procédé ainsi pour qu'il puisse aller vaquer à ses occupations (…). Le gouvernement togolais sait qu'il a un statut de quelqu'un qui a été inculpé, ils ont pris un engagement pour l'encadrer et ne pas permettre qu'il fasse quoi que ce soit qui soit de nature à troubler l'ordre public nigérien."

Salem Bazoum reste en effet toujours sous le coup d'une inculpation pour "complot ayant pour but de porter atteinte à l'autorité ou à la sûreté de l'État".

"Les autorités ouvrent la porte à des sujets de discussions"

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"Au mauvais endroit au mauvais moment"

Selon le journaliste togolais Crédo Tetteh, Salem Bazoum qui se trouve désormais au Togo, était juste au mauvais endroit au mauvais moment. "Lorsqu'il y a renversement du chef de l'État, tous ceux qui sont dans l'entourage immédiat sont retenus et je crois que c'est ce qui est arrivé à Salem Bazoum", explique-t-il.

Avec sa libération provisoire, on s'interroge désormais sur la suite de la médiation du Togo et de la Sierra Leone dans ce dossier nigerien. 

"Aujourd'hui, avec la libération provisoire de Salem Bazoum, les autorités ouvrent la porte à des sujets de discussions", estime Crédo Tetteh qui n'exclut pas une éventuelle obtention, par la médiation, de la libération du président déchu Mohamed Bazoum.

"Une situation d'otages et de demande de rançon"

Selon le président de l'institut Tamberma pour la gouvernance, Paul Amegapko, la privation de liberté de Salem Bazoum ne reposait sur aucune base juridique. Pour lui "même s'il (Salem Bazoum, ndlr) a commis des fautes, on attendrait les preuves pour étayer cette inculpation. Nous pensons que la procédure n'est pas régulière pour que l'on comprenne le bien fondé des griefs qui sont portés à l'encontre de la famille Bazoum. Sa libération est salutaire parce que sa place n'a jamais été en prison." 

"C'est une situation d'otages et de demande de rançon"

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L'expert en gouvernance se montre par ailleurs critique envers la stratégie des militaires au pouvoir au Niger et explique que "nous sommes dans une situation d'otages et de demande de rançon, qui serait la reconnaissance du régime de fait du Niger. Et en contrepartie, le régime procéderait par des libérations étape par étape."

Le président déchu Mohamed Bazoum et son épouse restent pour l'heure eux, toujours séquestrés dans la résidence présidentielle, depuis le coup d'état qui a porté au pouvoir le général Abdourahamane Tiani. Plusieurs anciens responsables du gouvernement renversé sont aussi en détention et d'autres en exil.