Noir et jaune, les nouvelles couleurs de l'Allemagne
28 septembre 2009
C'est une chancelière comblée qui a pris la parole à la centrale de la CDU, à Berlin, pour annoncer sa victoire et la formation prochaine d'une coalition avec le FDP :
« Vous êtes heureux, je le suis aussi. Nous avons réussi quelque chose de formidable : atteindre notre objectif électoral et obtenir une majorité stable en Allemagne pour former un nouveau gouvernement avec la CDU, la CSU et le FDP. Mais je veux dire quelque chose à toute la population. Je souhaite être la chancelière de tous les Allemands, pour que notre pays aille mieux. »
Le résultat estimé de la CDU/CSU (selon ARD, 22h45) s'élève à 33,9% des suffrages, pas vraiment de quoi fanfaronner quand on sait que c'est le pire score depuis 60 ans. Mais grâce au succès des libéraux, les conservateurs pourront disposer d'une majorité confortable au Bundestag : à eux deux, les partis de la coalition noire-jaune obtiendraient jusqu'à 334 sièges sur 625 au Bundestag. Ils ont également la majorité au Bundesrat, la chambre haute du Parlement.
Le FDP, grand vainqueur du scrutin
Guido Westerwelle est donc le grand gagnant de la soirée. Le FDP réalise le meilleur score de son histoire, avec 14,6%, et enregistre une hausse de cinq points par rapport aux dernières législatives de 2005. Avec une campagne centrée sur les libertés individuelles et la refonte du système fiscal, Guido Westerwelle a su jouer sur son charisme pour convaincre les électeurs. A l'annonce des sondages de sortie des urnes, le chef de file libéral a souligné que ce résultat représentait une responsabilité pour le FDP :
« Nous voulons assumer cette responsabilité. Nous voulons faire partie du gouvernement allemand, car nous devons faire en sorte qu’il y ait un système fiscal juste, de meilleures chances d’éducation et que les libertés civiles soient enfin à nouveau respectées. »
Selon toute vraissemblance, Guido Westerwelle sera le prochain vice-chancelier et ministre des Affaires étrangères d'Allemagne. Au Bundestag, la coalition noire-jaune devrait disposer d'une confortable majorité, même sans compter les mandats supplémentaires qui ont, dans le passé, joué un rôle décisif dans le résultat final.
La débâcle du SPD
Le SPD est le grand perdant de ce scrutin et Frank-Walter Steinmeier, son candidat, a reconnu une « défaite amère ». Avec environ 23% des voix, le parti social-démocrate enregistre le plus mauvais score de son histoire :
« Les électeurs ont fait leur choix. Le résultat est un jour amer pour les sociaux-démocrates. C’est une défaite amère. Après une campagne menée avec un grand engagement, je trouve cela formidable que beaucoup m’aient soutenu, merci à tous, surtout les jeunes du SPD qui ont combattu jusqu’au bout, je leur dit : vous êtes l’avenir du SPD. Continuez-comme cela ! »
Frank-Walter Steinmeier a promis que son parti constituerait une « opposition forte » au Bundestag, il a annoncé son intention de briguer la présidence du groupe parlementaire SPD et de devenir ainsi leader de l'opposition.
Quid de Die Linke et des Verts ?
« C’est un grand jour pour Die Linke », a déclaré Oskar Lafontaine, le président du parti de la gauche radicale. Selon les estimations, Die Linke obtient environ 12% des voix, devant les Verts qui enregistrent 10,5%. Oskar Lafontaine a annoncé que l’opposition donnerait du fil à retordre au gouvernement.
Chez les Verts, on se félicite des progrès du parti, mais on aurait espéré mieux. Le chef du groupe parlementaire, Fritz Kuhn, a souligné que les Verts avaient à présent un score à deux chiffres, c’est pourquoi il n’était pas insatisfait du résultat. Selon lui, les quatre prochaines années seront certainement très intéressantes.
Autre particularité de ce scrutin 2009 : une abstention record. Avec 72%, le taux de participation est encore plus faible qu'en 2005, où il avait atteint 77,7%.
Quel avenir pour les quatre prochaines années ?
L’heure de la victoire a certes sonné pour la CDU, la CSU et le FDP, mais il s’agit à présent pour les conservateurs et les libéraux de s’entendre sur les grandes lignes du prochain gouvernement. Et les négociations de coalition pourraient bien buter sur certains points.
La CDU-CSU comme le FDP ont promis lors de la campagne une baisse des impôts. Mais le camp d’Angela Merkel s’est moins avancé sur la question que celui de Guido Westerwelle, qui exige une réforme profonde du système fiscal en Allemagne. Thème central de la campagne électorale du parti, le concept du FDP prévoit un allègement fiscal d’environ 35 milliards d’euros. Ce que les conservateurs ont qualifié de « non sérieux ». Seulement voilà, le FDP a d’ores et déjà prévenu qu’il ne signerait de traité de coalition que si celui-ci prévoyait un nouveau système fiscal « équitable ».
D’autres discordes s’annoncent dans le domaine de l’emploi, de la santé, de la défense et de la protection des données. Après la lune de miel de la soirée électorale, le retour à la réalité du quotidien au sein d’un gouvernement de coalition pourrait s’avérer difficile.