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Où en est le procès Murwanashyaka ?

1 mai 2012

Depuis le 4 mai 2011, le président des Forces démocratique de Libération du Rwanda et son vice-président Straton Musoni, sont devant la justice allemande. Ils doivent répondre de crimes commis par les rebelles en RDC.

Die wegen Verbrechen gegen die Menschlichkeit und Kriegsverbrechen im Ostkongo angeklagten Ignace M. (r.), Praesident der ruandischen Miliz "Forces Democratiques de Liberation du Rwanda (FDLR)", und Straton M. (l.), Vizepraesident der FDLR, stehen am Mittwoch (04.05.11) in Stuttgart in einem Gerichtsaal des Oberlandesgerichts. Die beiden ruandische Staatsbuerger muessen sich seit Mittwoch in Stuttgart wegen Verbrechen gegen die Menschlichkeit und Kriegsverbrechen im Ostkongo verantworten. Zu Beginn des Prozesses beantragte die Verteidigung die Aussetzung des Verfahrens. Der Prozess ist bundesweit der erste nach dem seit dem 30. Juni 2002 geltenden Voelkerstrafgesetzbuch. (zu dapd-Text) Foto: Daniel Maurer/dapd
Deutschland Kongo Ruanda Kriegsverbrecher Prozeß in StuttgartImage : dapd

Le groupe rebelle armé est l'héritier des Forces armées rwandaises et de diverses milices hutues considérées comme responsables du génocide de 1994 au Rwanda. Son objectif est de renverser le régime du président rwandais Paul Kagame. Les accusés doivent répondre de 26 crimes contre l'humanité et 39 crimes de guerre.

Murwanashyaka « le grand patron »

M., ancien membre des FDLR, a beaucoup de choses à raconter. À tel point que la cour l'a fait revenir à Stuttgart pour deux séances supplémentaires, après ses témoignages en février et mars. Lors de son premier passage à la barre, le combattant démobilisé depuis 2010 a décrit avec précision l'organisation du Quartier général des FDLR dans la province congolaise du Nord-Kivu. Il a également confirmé qu'Ignace Murwanashyaka, le principal accusé, envoyait régulièrement des « messages » au général Sylvestre Mudacumura et ses combattants. Et surtout, qu'il était bien considéré comme le « grand patron » de la milice. Son témoignage est précieux : il doit aider les juges à établir la culpabilité d'Ignace Murwanashyaka et de son bras droit Straton Musoni. « Il faut prouver qu'il avait vraiment de l'influence sur le grand commandant des FDLR en RDC», explique Tina Jongkind, observatrice du procès pour l'organisation Amnesty International. On pourrait en effet aussi dire que celui-ci a agi de son propre chef et qu'Ignace Murwanashyaka n'en savait rien. « Ceci dit, ajoute-t-elle, on pourrait aussi condamner Ignace Murwanashyaka s'il était au courant des projets de la milice et n'avait rien fait pour les empêcher. »

Ignace Murwanashyaka avait déclaré savoir "tout ce qui se passe" dans une interview à la télévision allemande en 2008Image : picture-alliance/ dpa

Les FDLR ont instauré un « régime de terreur »

Plus de 70 jours d'audience se sont déjà déroulés depuis l'ouverture du procès en mai 2011. « La cour a déjà entendu 26 témoins, analysé le contenu des messages téléphoniques, SMS et mails envoyés depuis l'Allemagne », résume le porte-parole du tribunal de Stuttgart, Matthias Merz. Un expert des Grands Lacs a également expliqué l'histoire et le contexte dans lequel s'inscrivent les FDLR, que le parquet fédéral accuse d'avoir instauré un « régime de terreur » dans l'est de la RDC en menant des attaques brutales et ciblées contre les civils. Ces accusations, la défense les récuse en bloc. Les avocats d'Ignace Murwanashyaka estiment que les FDLR sont avant tout une force politique qui vise à reprendre le pouvoir à Kigali. Ils dénoncent d'ailleurs l'influence du régime du président rwandais Paul Kagamé dans cette affaire. Mais surtout, ils estiment qu'une cour allemande n'est pas en mesure de juger un tel cas. C'est en effet le premier procès du genre en Allemagne, qui peut depuis 2002 juger des crimes de guerre même si ces derniers ont été commis à l'étranger. Une mission qui incombe à la Cour pénale internationale de La Haye, estime Andrea Groß-Bölting, avocate de la défense : « Nous n'avons pas ici les moyens de juger de façon fondée de la crédibilité du témoin, de son contexte culturel. Nous ne sommes pas en mesure d'évaluer précisément la situation au Congo, ni où s'est déroulée la guerre. Nous ne connaissons rien à la géographie des lieux. Il y a tant de points d'interrogation que je suis d'avis qu'une telle affaire ne peut pas être jugée par un tribunal allemand. »

Le co-accusé, Straton Musoni, joue un rôle mineur dans le procèsImage : picture-alliance/dpa

« J'aurais tué ma propre femme »

Le « contexte culturel » est souvent mis en avant pour mettre en cause la crédibilité des témoins. Dans le cas de M., les avocats doutent de sa capacité à faire la différence entre ce qu'il a vu et ce qu'il a entendu. Le témoin contredit cette thèse en expliquant qu'il n'a pas assisté à des exactions, mais qu'il a vu de ses propres yeux les punitions infligées par le commandement FDLR aux criminels. Il précise que les hommes qui ont violé, pillé ou saccagé ont toujours agi « de leur propre chef » et qu'il n'a jamais entendu parler de « stratégie » visant à causer une « catastrophe humanitaire » parmi la population civile, telle que la décrit l'acte d'accusation. Sinon, poursuit-il, il n'aurait pas hésité à tuer sa propre femme, congolaise.

Des accusés parfaitement intégrés

Sur le banc des accusés, Ignace Murwanashyaka et Straton Musoni suivent l'audience avec attention. Ils ont l'air détendu et sourient même de temps à autre. La compréhension ne leur pose pas de problème puisqu'ils parlent parfaitement le kinyarwanda, langue dans laquelle est interrogé le témoin aidé d'un interprète, mais aussi l'allemand. Avant leur arrestation en novembre 2009, les deux hommes vivaient depuis longtemps en Allemagne et étaient parfaitement intégrés. Leur incarcération a porté un coup sévère aux miliciens dans les forêts congolaises. Selon Tina Jongkind, « des témoins ont déclaré que depuis que les accusés sont en prison, il y a eu de beaucoup plus de défections et de retours au Rwanda. Cela veut dire que de nombreux combattants ont quitté les FDLR et que leur motivation a été sévèrement entamée.»

Des rebelles repentis au camp rwandais de Mutobo, en 2011. Ils sont des milliers à avoir quitté la milice comme M.Image : Simone Schlindwein

Elle souligne toutefois que les FDLR sont encore actifs en RDC. Ceci explique pourquoi les dix victimes qui doivent encore témoigner, essentiellement des femmes violées, vont le faire anonymement et par vidéo interposée. Leur témoignage, ainsi que celui d'experts de l'Onu, sont attendus avec impatience. Ils pourraient apporter les pièces manquant au puzzle, à savoir si les FDLR ont employé les violences sexuelles comme arme de guerre et quel rôle les dirigeants politiques du mouvement ont joué dans cette stratégie. La défense requiert un non-lieu, le parquet fédéral la perpétuité.

Auteur : Anne Le Touzé
Edition : Sandrine Blanchard

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