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Le candidat du SPD : Peer Steinbrück

Wolfgang Dick, Antoine Mouteau9 septembre 2013

Le candidat des sociaux-démocrates à la chancellerie passe pour brillant orateur et un expert de la finance. Malgré des sondages défavorables, Peer Steinbrück a encore bon espoir de remporter les élections.

SPD Peer SteinbrückImage : picture-alliance/dpa

«Il le peut», disait en 2011 l'ancien chancelier allemand Helmut Schmidt en référence à son camarade du SPD Peer Steinbrück. Il ne louait pas seulement ses qualités au jeu d'échecs. Peer Streinbrück, 66 ans, est diplômé en économie et a été ministre des finances. Mais pour Helmut Schmidt, le fait qu'il a dû redoubler deux fois avant l'obtention de son baccalauréat et qu'il avait des mauvaises notes en maths ne joue aucun rôle. Aux yeux de l'ancien chancellier, seuls comptaient les résultats du travail fourni par Peer Steinbrück dans plusieurs administrations et ministères.

Allié en 2005 à Angela Merkel

En 2005 Peer Steinbrück a perdu contre la CDU aux élections régionales de Rhénanie-du-Nord-Westphalie. Mais pour pouvoir constituer un gouvernement majoritaire après les législatives nationales de cette même année 2005 , Angela Merkel est contrainte de s'allier à ses adversaires du parti social-démocrate. Avant de former une coalition, le SPD propose la candidature de Peer Steinbrück au poste de ministre des finances. Angela Merkel et Peer Steinbrück allient alors leurs forces dans leur lutte contre la crise financière. Mais lorsque cette dernière s'intensifie en 2009, les épargnants allemands menacent d'affluer dans les banques pour récupérer leur argent. Dans un discours commun, les deux dirigeants politiques parviennent à rassurer les Allemands : chaque compte d'épargne hébergé par une banque allemande serait en sécurité.

Avant que la crise n'éclate, Peer Steinbrück s'est engagé en faveur d'instruments financiers qui seront plus tard très controversés. Le social-démocrate a notamment défendu la possibilité pour les investisseurs immobiliers de regrouper des crédits immobiliers et de les revendre.

Peer Steinbrück sûr de lui, à la fête des 150 ans du SPDImage : DW/W. Dick

Handicaps politiques

Peer Steinbrück dit souvent ce qu'il pense et de manière très directe. Cette façon d'agir lui vaut de nombreuses critiques. Son style politique est souvent qualifié de grossier, moralisateur et peu diplomatique. Ses compagnons de route le décrivent comme un homme particulièrement intransigeant. Alors qu'il tentait d'endiguer l'évasion fiscale, la Suisse, très appréciée des fraudeurs pour y cacher leur argent, a refusé de conclure un accord fiscal. Mais sa réaction est immédiate… Pour convaincre la Suisse de faire machine arrière, il menace de l'y obliger par des mesures coercitives. De cet épisode est resté une expression bien à lui : « envoyer la cavalerie sur la Suisse ».

Carrière politique

Lorsqu'il était ministre régional des Finances et Ministre-Président de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, Peer Steinbrück soutenait déjà l'agenda 2010 du chancelier social-démocrate de l'époque, Gerhard Schröder. Ces réformes devaient permettre de réhabiliter le marché du travail et d'endiguer le chômage. Pour tenter de réduire les frais de l'Etat, le gouvernement a encouragé la mise en place d'un secteur d'emplois à bas salaires et favorisé le travail intérimaire. L'idée séduit Peer Steinbrück. On a en effet bel et bien assisté à une sorte de miracle allemand de l'emploi qui profite aujourd'hui encore au gouvernement d'Angela Merkel, mais pas à Peer Steinbrück. De nombreuses règles sont exploitées par les patrons. Aujourd'hui, environ 20% des salariés allemands gagnent des salaires qui leur permettent à peine de vivre.

En tant que candidat social-démocrate à la chancellerie, Peer Steinbrück admet désormais les erreurs du SPD. « Il y a quelque chose qui n'a pas fonctionné. La société menace d'éclater ». Peer Steinbrück prône un économie de marché sociale, qui remettrait l'intérêt général au centre. De nombreux détracteurs de Peer Steinbrück considèrent que ce changement brutal d'orientation politique est peu crédible, tout comme son engagement à instaurer un salaire minimum. Selon les observateurs, le manque de crédibilité de Peer Steinbrück sur ces questions est étroitement lié aux origines sociales de Peer Steinbrück. Le candidat vient d'une d'une famille de commerçants très aisée.

Passionné, son ton peut être durImage : picture-alliance/dpa

Une mauvaise entrée en campagne

Lors des législatives de 2009, Angela Merkel, avec la CDU/CSU et les libéraux du FDP ont obtenu suffisamment de voix, pour pouvoir gouverner sans le SPD. Peer Steinbrück redevient alors un simple député et annonce son retrait de la politique nationale. Il écrit un livre couronné de succès sur la période qu'il a passée au gouvernement et enseigne dans des universités. A l'époque, Peer Steinbrück n'aurait pu imaginer une seconde qu'il se retrouverait à nouveau au centre de la scène politique allemande. L'histoire lui donnera tort…

C'est avec près de 94% des voix que Peer Steinbrück est élu candidat de son parti à la chancellerie lors d'un congrès extraordinaire du SPD. Mais l'euphorie est de courte durée. Quelques jours après sa désignation, le prétendant à la chancellerie est rapidement rattrapé par un scandale d'argent. Les médias allemands révèlent qu'il a donné 89 conférences rémunérées plus d'un million d'euros. Avant de tout avouer au public, il a préféré se taire, considérant qu'il s'agissait là d'une affaire privée. Le rapport de Peer Steinbrück avec l'argent s'est parfois révélé une véritable épine dans le pied des sociaux-démocrates. Ce fut notamment le cas lorsqu'il a osé déclarer qu'un chancelier ne gagnait pas assez d'argent.

Celle avec qui Peer Steinbrück aimerait faire coalition, l'écologiste Katrin Göring-EckardtImage : Reuters

Les sondages ne laissent rien présager de bon pour le candidat social-démocrate. L'écart creusé par Angela Merkel semble insurmontable. Mais Peer Steinbrück est loin de se laisser abattre. « En 2005, avant les élections, la situation pour le SPD était même pire qu'aujourd'hui. Mais ça s'est arrangé un peu plus tard », a-t-il déclaré.

Les grandes lignes du programme

Ces dernières semaines, le candidat du SPD a sobrement défendu son programme. Avec des hausses d'impôts, il espère surtout remédier aux injustices sociales dans le pays.

Peer Steinbrück dit aussi vouloir soutenir les femmes qui exercent une activité professionnelle. Il souhaite qu'elles obtiennent le même salaire que les hommes, plus de facilités pour la garde des enfants et une meilleure prévoyance vieillesse. Pour ses partisans, Peer Steinbrück a encore une carte à jouer s'il souhaite être élu. D'après eux, le candidat à la chancellerie est, dans la vie de tous les jours, un homme fiable et authentique. Marié depuis 38 ans à une professeure de biologie et de sciences politiques, il est également le père de trois enfants, désormais adultes.

Aujourd'hui, Peer Steinbrück ne voit plus la CDU et Angela Merkel comme des partenaires politiques. Selon lui, la chancelière sortante se contente d'administrer l'Allemagne au lieu de la façonner. Le rêve de Peer Steinbrück : une coalition avec les Verts.