Percée des islamistes en Egypte
4 décembre 2011Les islamistes en Egypte ont été officiellement proclamés vainqueurs du premier tour des élections post-Moubarak avec un total de 65% des voix. Selon la Haute commission électorale, le parti Liberté et Justice formé par la confrérie des Frères musulmans remporte 36,6% des voix. Ils devancent ainsi les salafistes du parti Al-Nour avec 24,3% et le Bloc égyptien, c'est-à-dire les libéraux, avec 13%. Ces derniers sont les grands perdants de ce premier tour organisé lundi 28 novembre dans un tiers des gouvernorats, notamment au Caire et à Alexandrie. Une troisième liste islamiste, celle du Wassat, plus modéré, remporte 4,3% des suffrages. Les islamistes espèrent bien améliorer leurs scores lors du deuxième tour prévu lundi 5 décembre pour renforcer leur domination dans le futur Parlement.
"Un islam modéré"
La grande surprise de ce scrutin reste la percée des salafistes, ces fondamentalistes musulmans, desquels les Frères musulmans entendent se démarquer. Forts de leur succès dans les urnes, les salafistes ont en effet multiplié les déclarations en faveur d'un islam rigoriste : mise en valeur du port du voile, condamnation de l'alcool et de la mixité au travail, etc. La confrérie des Frères musulmans a de son côté cherché à rassurer qu'elle se réclamait d'un islam centriste et modéré. Le porte-parole officiel des Frères musulmans, Essam Al Eryan, a promis qu'il « coopérerait avec le Parlement, le gouvernement, le peuple, les militaires et la police ». « Notre objectif est de reconstruire ce pays », a-t-il ajouté. La confrérie a pour l'instant refusé de s'exprimer sur une possible alliance avec les salafistes.
Une victoire qui fait peur
Pour l'instant, l'objectif est de rassurer les militants démocrates de la place Tahrir, comme ce manifestant qui a déclaré : « Une chose est sûre : ils ont gagné ! Mais nous avons peur que les islamistes ne veulent en réalité pas de démocratie. » Les manifestants démocrates continuent d'ailleurs de se rassembler au Caire pour réclamer le départ du pouvoir militaire. Ils contestent toujours le nouveau Premier ministre Kamal el-Ganzouri. Celui-ci a annoncé que le nouveau gouvernement de transition pourrait être investi d'ici à mercredi.
Dans les pays voisins, le Hamas palestinien, au pouvoir dans la bande de Gaza, s'est félicité de cette percée des islamistes égyptiens, alors que les dirigeants israéliens se sont déjà alarmés de cette vague islamiste, qui pourrait être lourde de menace pour la région.
Le taux de participation de ce premier tour des législatives est de 62% - un taux historique "jamais vu depuis les pharaons", selon Abdel Moez Ibrahim, président de la Haute commission électorale. Cette instance a précisé qu'elle n'annoncerait le nombre de sièges attribués à chaque liste qu'à la fin des élections de l'Assemblée du peuple le 10 janvier 2012. Le cycle électoral se poursuivra ensuite jusqu'en mars avec l'élection de la Choura, la chambre haute consultative.
Auteur : Cécile Leclerc avec AFP, Reuters, dpa
Edition : Moulay Abdel Aziz