Pied de nez des électeurs à Beni
30 décembre 2018La ville de Beni, dans le Nord-Kivu, fait partie de celles où le vote a été repoussé au mois de mars. Officiellement à cause de l'épidémie d'Ebola qui sévit dans la région. Mais les habitants n'ont pas apprécié ce traitement différent de celui des autres localités et plusieurs milliers d'entre eux ont fait la queue, aujourd'hui, pour participer à un vote fictif: des urnes ont été placées dans des stades de football et les bulletins compilés parfois dans de gros sacs à fufu.
Notre correspondant à Beni, John Kanyunyu, a tendu son micro à plusieurs de ces électeurs zélés pour leur demander pourquoi ils attendaient là.
Un homme répond : "Nous sommes venus pour voter le candidat qui pourra nous aider à ramener la paix dans notre ville de Beni. Parce que nous avons été massacrés depuis 2014. Nous n'avons pas la capacité de nous défendre. Alors nous devons choisir le candidat qui ramènera la paix. Nous avons assez souffert."
Un autre confirme : "Nous sommes Congolais de nature, de sang. C'est pour ça que nous sommes ici : nous ne voyons pas de raison valable de dire que Beni et Butembo ne doivent pas voter. Nous, nous sommes prêts. C'est pourquoi nous sommes ici."
Un acte de résistance pacifique
Une femme en colère s'écrie: "Nous, on ne veut pas de report en mars. Nous avons voté aujourd'hui comme tous les autres Congolais. La date était prévue le 30 décembre, alors on a voté aussi. Bravo aux organisateurs pour l'ordre spécial qui a régné aujourd'hui."
Un autre homme abonde, il voit dans ce vote fictif un acte de résistance : "Kabila a voulu nous priver de notre droit comme Congolais. Alors que nous le sommes et le resterons. Nous voulons un changement à tout dans notre pays. Pourquoi ne pas attendre mars ? Parce que c'était d'abord en 2016, puis le 23 décembre 2018, puis le 30 puis encore en mars… trop c'est trop ! Si les résultats ne sont pas acheminés à Kinshasa, nous allons continuer à lutter dans la paix, dans la non-violence, des manifestations bien organisées, pas dans la casse, pas dans le trouble, pas dans le désordre."
A Butembo aussi, un "vote fictif" comparable a été organisé en dépit du report.