Les journalistes Maria Ressa et Russe Dimitri Mouratov, tous deux des critiques du pouvoir dans leur pays, ont été récompensés par le comité norvégien.
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Jamais en 120 ans d’histoire, le prix Nobel de la paix avait récompensé la liberté d'information en tant que telle. La journaliste philippine Maria Ressa, critique du président Duterte et de sa guerre sanguinaire contre la drogue, ainsi que le journaliste Russe Dimitri Mouratov, bête noire du Kremlin, ont tous les deux été récompensés ce vendredi (08.10) par le prix Nobel de la paix.
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Déjà une vingtaine de lauréats africains du prix Nobel
Jusqu’ici, 80% des lauréats du prix Nobel étaient européens ou américains. Mais l'Afrique est de plus en plus honorée par le comité du prestigieux prix.
Le Nobel de littérature a été décerné le 7 octobre 2021 au romancier Abdulrazak Gurnah, né à Zanzibar mais en exil au Royaume-Uni depuis un demi-siècle. Lors de sa première interview à la Fondation Nobel, le lauréat a dit sa "surprise" et appelé l'Europe à changer son regard sur les réfugiés d'Afrique et la crise migratoire.
Image : Jerzy Dabrowski/ZUMAPRESS/picture alliance
Abiy Ahmed, des éloges à la guerre
En 2019, le comité norvégien a distingué le Premier ministre éthiopien en lui décernant le prix Nobel de la paix pour ses efforts de paix, surtout avec l'Erythrée. Mais son offensive contre le Tigré, un an plus tard, lui a attiré des critiques. Le prix Nobel de la paix avait annoncé une victoire rapide mais le conflit s'est enlisé, plongeant la région dans une grave crise humanitaire.
Image : picture alliance/AP Photo/NTB scanpix/H. M. Larsen
Denis Mukwege, le "réparateur" des femmes
Le médecin congolais a reçu le prix Nobel de la paix en 2018, conjointement avec l'activiste irakienne Nadia Murad. Tout deux ont été salués pour leurs efforts en vue de mettre fin aux violences sexuelles comme armes de guerre. Denis Mukwege a récemment demandé au président de la République démocratique du Congo, Félix Tshisekedi, d'agir contre l'impunité des auteurs présumés de crimes.
Image : NTB Scanpix/Haakon Mosvold Larsen/Reuters
Le quartet du dialogue national en Tunisie
Composé de l'UGTT, syndicat historique en Tunisie et fer de lance de son indépendance, du patronat (UTICA), de la Ligue tunisienne des droits de l'Homme (LTDH) et de l'Ordre des avocats, le quartet s'est vu remettre le prix Nobel de la paix en 2015 "pour sa contribution décisive à la construction d'une démocratie pluraliste à la suite de la Révolution du jasmin de 2011".
Image : Reuters/NTB scanpix/C. Poppe
Ellen Johnson Sirleaf, lauréate en pleine campagne
Le prix Nobel de la paix a été attribué en 2011 à la présidente du Liberia, Ellen Johnson Sirleaf, alors qu'elle briguait un second mandat à la tête du Liberia. Elle partageait ce prix avec la militante libérienne Leymah Gbowee et la Yéménite Tawakkol Karman. Elle a été récompensée pour son travail de reconstruction d'un pays déchiré par la guerre.
Image : AP
Wangari Maathai, l'activiste
Surnommée "The Tree woman", elle a fondé en 1977 le Mouvement de la ceinture verte. Wangari Maathai fut la première Est-Africaine à obtenir son doctorat, la première à enseigner à l'université dans son pays le Kenya, puis à diriger un département universitaire. La lauréate du prix Nobel de la paix est décédée en 2011 à l'âge de 71 ans des suites d'un cancer.
Image : Getty Images/AFP/T. Bendiksby
Mohammed el-Baradei le révolutionnaire
C'est en 2003 que cet ancien diplomate de haut rang est apparu sur le devant de la scène, s'employant à convaincre la communauté internationale que l'Irak avait bien abandonné son programme de fabrication d'armes nucléaires. Il s'est vu attribuer le prix Nobel de la paix en 2005. Il est né au Caire, en 1942, dans une famille de juristes.
Image : picture-alliance/dpa
John Maxwell Coetzee, l'esprit critique
Le Sud-Africain John Maxwell Coetzee a reçu le prix Nobel de littérature en 2003. Il commence sa carrière de romancier en 1974 et acquiert une renommée internationale en 1980 grâce au roman "Waiting for the Barbarians" (En attendant les barbares). "La société d'apartheid est une société de maîtres et d'esclaves, où les maîtres eux-mêmes ne sont pas libres", a estimé cet auteur.
Image : AP
Sydney Brenner aux origines du traitement du cancer
Né en Afrique du Sud en janvier 1927, Sydney Brenner a reçu le prix Nobel de médecine en 2002 avec H. Robert Horvitz et John E. Sulston. Le comité norvégien a souligné la pertinence de leurs découvertes concernant la régulation génétique du développement des organes et la mort cellulaire programmée.
Image : Esteban Cobo/EFE/picture alliance
Kofi Annan et son combat pour la paix
L'ex-secrétaire général des Nations unies d'origine ghanéenne a reçu le prix Nobel de la paix en 2001, avec l'Onu, pour leur contribution à "un monde mieux organisé et plus pacifique". Il a jugé "presque indécent" de se voir attribuer un tel prix en pleine guerre en Afghanistan ou de conflit au Proche-Orient. Kofi Annan meurt en Suisse, en 2018, à l'âge de 80 ans.
Image : picture-alliance/dpa/H. Junge
Ahmed Zewail et la femtoseconde
L'Egyptien Ahmed Zewail a obtenu le prix Nobel de chimie en 1999 pour avoir réussi à photographier, à l'aide d'un laser extrêmement rapide, les atomes d'une molécule en train de bouger durant une réaction chimique. Pour ce faire, il avait utilisé une nouvelle unité : la femtoseconde. Le scientifique est mort en 2016 aux États-Unis à l'âge de à 70 ans.
Image : Imago Images/Xinhua/K. Ahmad
Nelson Mandela, l'icône de la lutte anti-apartheid
Pour avoir pacifiquement mis fin à la politique d'apartheid et entamé des négociations politiques, Nelson Mandela et Frederik de Klerk ont reçu conjointement le prix Nobel de la paix en 1993. Nelson Mandela devient le premier président noir d'Afrique du Sud en 1994. En 1999 après un unique mandat, il se retire de la vie politique. Il meurt le 5 décembre 2013 à Johannesburg.
Image : picture-alliance/AP
Nadine Gordimer et l'engagement contre la ségrégation raciale
Née le 20 novembre 1923, Nadine Gordimer, issue d'une famille d'immigrants juifs venus d'Europe de l'Est, a eu le prix Nobel de littérature en 1991. Auteur de quinze romans et de nombreux volumes de nouvelles, elle a ausculté les maux de sa société d'une plume sobre et sans concession. Opposée au régime d'apartheid sud-africain, elle est morte en juillet 2014 chez elle à Johannesburg, à 90 ans.
Image : picture alliance/dpa
Nagib Mahfouz, une des plus belles plumes d'Egypte
Cet écrivain égyptien s'est vu attribuer le prix Nobel de littérature en 1988, devenant le tout premier Egyptien et le premier écrivain d'expression arabe à recevoir cette distinction. Il commence à écrire à l'âge de 17 ans et publie ses premiers essais d’écriture dans les revues littéraires des années 1930. Il décède le 30 août 2006 au Caire à l'âge de 94 ans.
Image : picture-alliance/dpa
Wole Soyinka, l'international
Premier auteur africain a avoir été consacré en 1986 par le prix Nobel de la littérature, le Nigérian Wole Soyinka est né à Abeokuta en 1934. Romancier ironique, poète, dramaturge, également essayiste, il mêle dans ses romans et pièces de théâtre les réalités des villages nigérians qu’il connaît bien et les mythes culturels de l’Europe, voire du monde qu’il a parcouru dans tous les sens.
Image : imago/Gallo Images
Desmond Tutu et la "nation arc-en-ciel"
En décembre 1984, alors que le régime de Pretoria renforce la répression, la décision du comité d’Oslo de récompenser l’évêque sud-africain renforce le mouvement anti-apartheid. Desmond Tutu, devenu intouchable, continue de s’engager totalement. Il est l'inventeur du concept de "Rainbow Nation" (la nation arc-en-ciel). En 1995, il a dirigé la Commission Vérité et Réconciliation en Afrique du Sud.
Image : Helmuth Lohmann/AP Photo/picture alliance
Allan Macleod Cormack et la tomodensitométrie
Allan MacLeod Cormack était un physicien sud-africain qui a remporté le prix Nobel de physiologie ou médecine en 1979 pour ses travaux sur la tomodensitométrie à rayons X. Il a eu cette distinction conjointement avec Godfrey Hounsfield. Allan Macleod Cormack est mort au Massachusetts, aux Etats-Unis, le 7 mai 1998.
Image : ZUMA/Keystone/imago
Anouar el-Sadate et le conflit au Proche Orient
Président de l'Egypte entre 1970 et 1981, Anouar el-Sadate a signé les accords de Camp David avec le Premier ministre israélien Menahem Begin. Ces accords ont provoqué une forte opposition tant en Israël que dans le monde arabe mais ils seront soutenus et plébiscités par les membres du comité norvégien Nobel qui leur accordèrent leur plus prestigieux prix, le Nobel de la Paix le 27 octobre 1978.
Image : akg-images/picture alliance
Albert John Luthuli, le combattant serein
C'est le premier Africain noir à obtenir le prix Nobel de la paix en 1960. A l'âge de 47 ans, Albert John Luthuli se révolte contre le système établi, après avoir assisté à un massacre de mineurs africains en grève. Il adhère alors au Congrès national africain, dont il devient le président en 1952. Il est mort après avoir été renversé par un train près de sa résidence "surveillée" à Durban.
Image : Keystone/Getty Images
Max Theiler et la lutte contre la fièvre jaune
De nationalité sud-africaine, Max Theiler a reçu le prix Nobel de médecine en 1951 pour ses découvertes concernant la fièvre jaune et comment combattre cette maladie. A travers ses essais, d'abord sur les souris puis sur les singes, Max Theiler a réussi à obtenir une variante encore plus faible du virus. Cette variante, 17D, a été utilisée comme vaccin humain.
Image : Getty Images/Hulton Archive
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"C’est un message très puissant pour la liberté et le pluralisme du journalisme, un appel à la mobilisation", commente le secrétaire général de Reporters sans Frontières.
L’ONG avait d’ailleurs lancé une campagne de solidarité en faveur de Maria Ressa au printemps, alors que la journaliste subit régulièrement la pression de la justice philippine et d’une avalanche de messages de haine sur les réseaux sociaux.
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Les faits à l'épreuve des réseaux sociaux
"Un monde sans faits signifie un monde sans vérité et sans confiance", a déclaré Maria Ressa sur le site d’information Rappeler, le plus grand site de journalisme d’investigation des Philippines, et dont elle est la co-fondatrice.
"Rien n’est possible sans les faits", c’est un message que Maria Ressa avait aussi fait passer lors du Global Media Forum de la Deutsche Welle l’année dernière, alors que comme dans d’autres pays dans le monde, le pouvoir autoritaire aux Philippines mène de vastes campagnes de désinformation. Selon Maria Ressa, "à l’ère des réseaux sociaux, quand vous dites un mensonge un million de fois, vous pouvez réussir à transformer votre mensonge en fait. Vous pouvez ainsi avoir un nombre infini de vérités et cela nous fait douter des faits réels. Mais sans les faits vous ne pouvez pas avoir de vérité, et sans vérité, il n’y a pas de confiance. Et sans confiance, il n’y a pas de démocratie."
Hommage aux journalistes tués en Russie
L’autre journaliste récompensé pour son travail est le Russe Dimitri Mouratov, l’homme qui dirige la Novaïa Gazeta, l’un des derniers journaux indépendants à Moscou. La célèbre journaliste Anna Politkovskaïa, assassinée il y a quinze ans, faisait partie de la rédaction de la Novaïa Gazeta.
Pas moins de cinq autres journalistes du journal ont payé de leur vie leur combat pour la liberté d’expression en Russie.
"Ce n'est pas mon mérite personnel. C'est celui de ceux qui sont morts en défendant le droit des gens à la liberté d'expression", a déclaré Dimitri Mouratov, alors que dans une réaction pour le moins troublante, le Kremlin a réagi en saluant, je cite, le "courage" et le "talent" du journaliste.