Les pressions économiques menacent les médias selon RSF
2 mai 2025
Dans son rapport annuel de 2025, RSF s’inquiète d’un recul inédit de l’état de santé des médias dans une grande majorité de pays.
Mais ce que met particulièrement en avant l’ONG cette année, c‘est la pression économique qui fragilise énormement les médias et menace l’accès à une information fiable.
Si les exactions physiques contre les journalistes sont l’aspect le plus visible des atteintes à la liberté de la presse, les pressions économiques, plus insidieuses, sont aussi une entrave majeure, dit RSF.
"Sans indépendance économique, pas de médias libres", estime l’ONG de défense de la presse qui déplore par exemple le cas américain.
"La situation n'était déjà pas reluisante aux Etats-Unis, mais elle s'est encore aggravée depuis l'investiture en janvier de Donald Trump, auteur d'"attaques quotidiennes" contre la presse, selon la directrice éditoriale de RSF, Anne Bocandé.
RSF déplore la fermeture de médias comme Voice of America, ce qui prive "plus de 400 millions de personnes" d'un "accès à une information fiable".
D'autres médias devraient d'ailleurs fermer, puisque Donald Trump a signé, ce jeudi, un décret demandant la fin du financement de la télévision PBS et de la radio NPR, qu'il accuse d'être biaisés.
En début d'année, RSF s'inquiétait déjà des conséquences du gel de l'aide internationale américaine sur certains programmes destinés aux médias.
Situation grave au Rwanda et en Ouganda
Les programmes de l’USAID soutiennent les médias indépendants dans plus de 30 pays, mais il est difficile d’évaluer l’ampleur totale de l’impact sur les médias. Selon les données de l’USAID de 2023, l’agence a financé la formation et soutenu 6 200 journalistes, aidé 707 médias non étatiques et soutenu 279 organisations de la société civile œuvrant pour le renforcement des médias indépendants.
Mais il n’y a pas que les Etats-Unis. Dans près d'un tiers des pays du monde, dont la Tunisie par exemple, des médias ferment régulièrement, sous l'effet des difficultés économiques persistantes.
Enfin, il y a la répression politique et la violence à l’encontre des journalistes. Sur le continent africain, le Rwanda, l’Ouganda et l’Ethiopie sont passés de la catégorie des pays où la situation était « difficile » pour les journalistes à celle des Etats où elle est considérée comme "très grave", selon RSF.
L’Egypte, le Soudan et l’Erythrée figurent également parmi les pays où « la liberté de la presse est totalement absente et où exercer le journalisme est particulièrement dangereux, selon RSF.
Mai, Burkina, Guinée, épinglés
En Afrique de l’Ouest, les pressions politiques imposées par les juntes militaires viennent aggraver une situation rendue déjà extrêmement difficile par les conditions sécuritaires. En un an, le Mali (119e place du classement mondial) a reculé de cinq places, tandis que le Burkina Faso (105e) a perdu 19 places. La Guinée est quant à elle passée de la 78e à la 103e place.
Même si RSF ne le mentionne pas dans son rapport, au Sénégal, les entreprises de presse sont mobilisées depuis quelques jours contre un nouveau code de la presse qui menacerait leur existence. De nombreux médias ont même déjà fermé.
En République démocratique du Congo (133e, en recul de dix places), le paysage médiatique continue de se polariser et d’être réprimé dans l'est du pays.
Rares pays où la liberté de la presse est jugée bonne en Afrique : le Gabon, la Namibie, l’Afrique du Sud et le Cap-Vert.
RSF note enfin que l'économie du secteur est "mise à mal" par les Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft), dont les plateformes, "largement non régulées, captent une part croissante des revenus publicitaires" et participent à "la prolifération de contenus manipulés ou trompeurs".