RDC : les actions au coeur de la riposte face à Ebola
17 septembre 2025
En République démocratique du Congo, l'Organisation mondiale de la santé a fait savoir que la vaccination contre le virus Ebola a débuté, le 13 septembre, à Bulape, dans la province du Kasaï. A l'heure actuelle, 283 personnes ont déjà été vaccinées. Il s'agit essentiellement du personnel de santé et des personnes qui ont été en contact avec des malades.
Le virus Ebola reste souvent mortel malgré de récents vaccins et traitements. Cette fièvre hémorragique a fait 15 000 morts en Afrique au cours des 50 dernières années.
Ebola a été identifié pour la première fois en 1976 au Zaïre, l'ancien nom de la RDC. La transmission humaine d'Ebola se fait par les fluides corporels, avec pour principaux symptômes des fièvres, des vomissements, des saignements et des diarrhées. Les personnes infectées ne deviennent contagieuses qu'après l'apparition des symptômes, après une période d'incubation allant de deux à 21 jours.
Le Dr Mory Keita travaille pour l'Organisation mondiale de la santé. Il est gestionnaire des incidents pour la réponse contre l'épidémie d'Ebola en RDC et il nous explique les actions conduites depuis deux jours sur le terrain.
Cliquez sur l'image pour écoutez l'interview de la DW avec Mory Keita.
DW : Monsieur Keita, Bonjour.
Mory Keita : Bonjour
DW : vous vous trouvez où actuellement ?
Mory Keita : Je me trouve actuellement dans la zone de santé de boulapé, l'épicentre de l'actuel épidémie d'Ebola en RDC.
DW : Alors dites nous Monsieur Keita, on apprend que la vaccination va commencer pour les professionnels de santé de première ligne et les contacts des personnes infectées.Vous êtes sur place, dites-nous un petit peu comment ça se passe, combien de doses ? Est-ce qu'il y a déjà des gens qui ont été vaccinés ? Est-ce que ça a commencé ?
Mory Keita : Exact. Bon, pour vous rassurer, je peux vous dire qu'on est déjà en avance.Nous avons été en mesure de vacciner 46 professionnels de santé qui sont également des personnels à haut risque, mais nos équipes également on puis se rendre dans un village dans une zone qui a été affectée récemment, qu'on appelle bambalai, où on a déployé une équipe avancée qui a été en mesure de vacciner 150 personnes, y compris des contacts à haut risque et des contacts, des contacts.
DW : J'ai cru comprendre que vous attendiez 45.000 doses supplémentaires.Mais au niveau des doses aujourd'hui, qu'est ce que vous pouvez nous dire ? Est ce que vous êtes suffisamment couvert ?
Mory Keita : avant la déclaration de l'épidémie, on avait déjà 2 000 doses dans le pays qui a été prépositionné bien sûr compte tenu du risque de transmission en RDC et ceci a permis qu'on puisse commencer très rapidement la vaccination. Donc ces 2 000 doses sont en cours d'acheminement, une partie de ces doses ont été sur le terrain et le reste est également à Kinshasa, mais qui sera acheminé très bientôt.
Alors juste pour rappel que il y a 2160 doses de vaccin également qui ont été reçues, mais ça, c'était en compensation de la dose de réserve qui a été utilisé.
Donc en tout, aujourd'hui nous avons 3580 doses de vaccin encore dans le pays.Ceci va nous permettre quand même de couvrir rapidement les contacts et les contacts des contacts.Mais par contre, vous l'avez dit tantôt, on attend plus de 45 000 doses de vaccin de ICG et ces doses vont également arriver dans le pays dans les jours à venir.
DW : alors justement en terme de vaccin, la vaccination, on parle de dose et on a le souvenir de Covid qui est encore frais, pour Ebola cela se passe comment ? Est-ce que c'est en une seule dose, un seul shot où il faut que les gens reviennent plusieurs fois ? Comment ça se passe concrètement cette vaccination ?
Mory Keita : Exact on a la chance que avec le vaccin Ervebo parce qu'il y a encore deux vaccins qui sont homologués pour Ebola, il y a le Johnson and Johnson et le vaccin de Merck donc le vaccin qui est utilisé maintenant là c'est le vaccin de Merck qui est une seule dose et elle est administrée une seule fois et la personne normalement après, disons 7 à 10 jours, elle a déjà l'immunité.
Mais c'est quand même un vaccin peu spécifique il faut le reconnaître. Parce que le vaccin dans les conditions normales doit être stockée à moins 80°.Sauf que si on le décongèle, on a quand même une fenêtre de 14 jours de pouvoir l'utiliser.
DW : En parlant de justement d'infrastructures et de conservation, on sait que vous êtes dans des zones reculées, des zones rurales, est ce que les 14 jours, cette fenêtre dont vous parlez, là vous pouvez y tenir vraiment en terme de courant ça ça se tient?
Mory Keita : il y a déjà une chaîne de froid ici. L'OMS et l'Unicef, les autres partenaires, nous sommes en train justement d'apporter un appui consistant dans ce sens-là. Par exemple, il y a un hélicoptère qui descend dans quelques minutes avec un groupe électrogène de 30 Cavéa donc on essaie de mettre déjà en place une capacité en électricité pour pouvoir faire face à ces besoins là.
DW : D'accord, une autre question, vous disiez le vaccin, si je comprends bien, vous l'utilisez de manière préventive n'est ce pas ?
Mory Keita : Oui.
DW : ...et pour ceux qui sont déjà malades, on fait comment ?
Mory Keita : Ceux qui sont malades sont également prises en charge dans les centres qu'on appelle les centres de traitement d'Ebola et où il y a des mesures d'isolement, des mesures de prévention et de contrôle d'infection qui sont en place pour éviter que le personnel puisse traiter ces malades-là sans se contaminer. Au niveau de ces isolements déjà on fait un circuit également pour qu'il y ait une séparation claire entre les malades suspects et les malades confirmés.
Alors pour rappel, il faut se le dire également, on a des médicaments spécifiques maintenant pour Ebola, qu'on appelle Ebanga.
Donc le médicament qu'on appelle Ebanga est utilisé pour traiter les malades d'Ebola et aujourd'hui les malades qui sont ici, il y en a déjà une dizaine qui ont déjà reçu ce traitement spécifique qui est une molécule spécifique qui a été développée d'ailleurs en RDC, et qui a prouvé son efficacité parce qu'il est déjà approuvé même par le FDI.
DW : Au niveau des chiffres, où est ce qu'on en est aujourd'hui, une photo globale ?
Mory Keita : Globalement nous avons en terme de cas confirmés à ce jour 36 cas confirmés parmi lesquels nous avons 16 décès.
Il faut rappeler également que avant que il n'y ait la confirmation des premiers cas, il y avait des décès qui étaient survenus et qu'on appelle souvent, bon c'est des décès suspects mais après qui doivent être investigués et puis après classifiés comme peut être probables. En plus de ces cas confirmés,des cas probables pourront s'ajouter une fois que les équipes de surveillance auront terminé leurs analyses sur ces décès probables.
Mais cependant, on attend pas que tout ceci soit terminé pour mettre en place des mesures de santé publique. Les cas probables d'Ebola doivent être traités comme des cas confirmés et donc les mêmes mesures de vaccination doivent être mises en place et c'est ce qui est en train d'être fait aujourd'hui.
DW : Merci beaucoup,
Mory Keita : Merci à vous.