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En RDC, le M23 exploite Rubaya et échappe à tout contrôle

14 mai 2025

D’après les autorités congolaises et des experts, les taxes illégales imposées par le M23 fragilisent l’économie locale et sapent la traçabilité et la certification des minerais "propres".

Goma 2025 I Corneille Nangaa, figure de l'Alliance Fleuve Congo (AFC)
Corneille Nangaa, figure de l'Alliance Fleuve Congo (AFC), une coalition politico-militaire à laquelle appartient le M23, est l'ancien président de la Commission électorale de la RDC. Bertrand Bisimwa et Sultani Makenga sont respectivement président et chef militaire du M23 ("Mouvement du 23 mars"). Image : Benjamin Kasembe

Dans les zones passées sous son contrôle, le groupe armé M23 a instauré sa propre administration et perçoit des taxes notamment sur l’exploitation minière au détriment du Trésor public congolais.

Le joyau de cette emprise est la mine de Rubaya, située dans le Nord-Kivu. Il s’agit de la plus grande mine de coltan de la République démocratique du Congo, aux mains du M23 depuis avril 2024. Ce contrôle permet au groupe armé de financer ses activités.

Des minerais sans traçabilité

La situation est vivement dénoncée par les autorités congolaises ainsi que par Josephat Musumba, chercheur au sein du Groupe d’étude sur le conflit et l’insécurité humaine (GECIH). Ce dernier alerte sur les risques croissants de voir ces minerais alimenter les circuits commerciaux internationaux sans aucun encadrement officiel.

"Lorsque la rébellion prend le contrôle d’une zone, elle y assure la sécurité, c’est un fait. Mais elle crée aussi un chaos dans les chaînes d’approvisionnement. Elle encourage les négociants locaux à venir s’approvisionner et stimule ainsi l’exploitation", explique-t-il.

Sur le terrain, les négociants se trouvent dans une impasse : il leur est désormais impossible de faire certifier leurs cargaisons auprès des structures de traçabilité officielles basées à Goma.

Le M23 a notamment pris le contrôle en avril 2024 de la mine de Rubaya, dans le Nord-Kivu, la plus grande mine de coltan de RDCImage : Johannes Meier/streetsfilm

Administration parallèle

Ecoutez les explications du chercheur congolais Josephat Musamba

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À Rubaya, le M23 a mis en place "une administration semblable à celle d’un État". Le groupe a notamment créé un "ministère chargé de l’exploitation des minéraux", qui délivre des permis aux creuseurs et aux opérateurs économiques, mais en dehors de tout système de traçabilité reconnu.

"Le M23 capture les chaînes d’approvisionnement. La première différence réside, par exemple pour le Sud-Kivu, la voie des minerais est réorientée. La deuxième différence :  chaîne d’approvisionnement est privée des acteurs éthiques qui assurent normalement la traçabilité. Ils ont mis en place leur propre système de traçabilité", déplore-t-il.

Ce constat est partagé par des experts de l’ONU qui, dans un rapport publié le mois dernier, estiment que les gisements de Rubaya génèrent près de 800 000 dollars par mois pour le M23. Cette somme provient notamment d’une taxe de sept dollars, prélevée sur chaque kilo de coltan extrait et commercialisé.