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En RDC, la ville de Minova sous la menace du M23

Paul Lorgerie
17 mai 2024

Alors que de nombreux observateurs prédisaient une chute rapide, la cité portuaire résiste malgré tout et la vie a repris son cours normal.

Des habitants à Minova, ville du Sud-Kivu.
"La psychose gagne les habitants", selon des témoins à Minova, ville du Sud-Kivu où se sont agglutinés des milliers de déplacés chassés ces derniers mois par les combats du Masisi.Image : ALEXIS HUGUET/AFP

La ville résiste. Enfin presque, car les combats entre les rebelles et l’armée congolaise ne sont pas bien loin et certaines voies de communication ont été fermées.

Il est 8h sur le marché de Minova. La plupart des échoppes sont encore vides. Les commerçants arrivent timidement. Pascal Kazenga, « petit commerçant de Goma », selon ses propres mots, a dormi sur place.

"Nous avons passé la nuit ici, car nous n’avons plus la possibilité de passer par la route. C’est pour cela que nous avons pris un bateau. Mais vous voyez que le marché est vide. Les gens ont fui à cause de la guerre."

Auparavant, il lui suffisait de prendre la route, depuis coupée par les éléments du M23 aux environs de la localité de Shasha. Naviguer sur le lac ? Trop dangereux, des obus y tombent fréquemment. Il lui faut donc emprunter une autre route.

"Auparavant, nous payions 5.000 francs congolais mais aujourd’hui, c’est 15.000 francs congolais. Il y a beaucoup de barricades sur la route. Depuis Goma, il faut prendre une moto jusqu’à Nzulo, puis de Nzulo on prend le bateau pour aller jusqu’à Kitembo, puis de nouveau une moto…"

Minova, 65.000 habitants et près de 300.000 déplacés, vit au quotidien sous la menace rebelle. Avec l'angoisse de ne pas pouvoir fuir cette ville enclavée, coincée entre le lac Kivu et les montagnes du Masisi.Image : ALEXIS HUGUET/AFP

Plus rien ne marche

Ce que regrette Daniel Kabundu, 24 ans. Gestionnaire informatique fraîchement diplômé, il avait l’habitude de se rendre à Goma, où il a fait ses études. Aujourd’hui, il tue le temps dans une boutique de la rue principale de Minova.

"On est encerclé par les armes lourdes. Je n’y connais rien, mais ça semble bien sophistiqué. Des gens ont déjà été gravement blessés à cause de cela. Et depuis, la route est barricadée. Sauf que des commerçants doivent circuler car Goma dépend de nous et nous dépendons de Goma. Donc, si un bateau sort de Minova, il peut être visé par le M23. Ils ont même visé un bateau du CICR. Donc cela devient risqué."

Selon le chef de groupement, Justin Kamanda, 40% des récoltes de Minova prenaient la route en direction des marchés du chef-lieu de la province du Nord-Kivu. Pour continuer à exporter, il a fallu ouvrir de nouvelles routes.

"Le chef de l’Etat avait donné des quais d’accostage à Minova et Kasunyu. Mais comme Minova n’était pas sûre, nous avons commencé des travaux de manière à ouvrir la route Minova – Kasunyu afin que les barges qui amènent des vivres de Goma ou Bukavu puissent accoster."

Une route encore difficilement praticable, sur laquelle les voitures ne peuvent passer au risque de s’embourber quasiment à coup sûr.