Multiplication des condamnations à mort en RDC
9 octobre 2025
À propos de la condamnation de l’ancien président Joseph Kabila, le docteur Denis Mukwege, Prix Nobel de la Paix, a regretté, sur les ondes de la DW, l’utilisation, selon lui, "politique" de la peine capitale.
Il estime que "Ceux qui ont fait ce procès l'ont fait avec des objectifs bien spécifiques", ajoutant "Je ne pense pas que ça aide le Congo. Si on doit demander des comptes à l'ex-président, ce n'est pas par rapport à sa visite à Goma. Il fallait demander des comptes par rapport à (ce qu’il a fait) depuis 1996. Il était de l'AFDL. Il a été dans ce mouvement et donc, il a des comptes à rendre, certainement. Mais pas de sa visite à Goma."
Outre le verdict concernant Joseph Kabila, la justice militaire a prononcé des dizaines d’autres condamnations à mort, depuis la levée du moratoire sur la peine de mort, en mars 2024. Parmi les condamnés figurent des dizaines de militaires accusés de trahison et 26 personnes jugées, en août 2024, pour avoir rejoint la rébellion du M23, dont l’ancien président de la commission électorale, Corneille Nangaa.
Une supposée tentative de coup d'État
En septembre 2024, ce sont enfin 37 personnes, dont trois Américains, qui ont grossi cette liste sinistre après avoir été condamnée pour une supposée tentative de coup d'Etat.
Aucune information n'est jusque-là disponible quant aux modalités d’exécution de ces condamnations.
La fondation Bill Clinton pour les droits humains, une organisation de défense des droits des prisonniers, redoute pour sa part des "exécutions clandestines."
"Officiellement, il n'y a pas eu d'exécution de condamnés à mort. Mais clandestinement, ils peuvent être exécutés parce que certains des condamnés à mort sont dans des cachots clandestins pour lesquels il y a une interdiction formelle d'accès. Ni les avocats, ni la famille, ni les ONG des droits humains, ni la Croix-Rouge, ni le bureau conjoint des Nations unies, n'y ont accès. C'est la raison pour laquelle nous continuons à demander l'autorisation de visite dans ces cachots clandestins", Emmanuel Cole, président de la fondation Bill Clinton.
Des prisons clandestines dénoncées par cette organisation qui en exige la fermeture. Parmi elles figurent les geôles de l'Agence nationale des renseignements (ANR), de la Détection militaire des activités anti-patrie (Demiap) et du Conseil national de sécurité (CNS).
Les autorités congolaises semblent, malgré tout, déterminées à ne pas changer leur position. C'est ce que souligne Adolphe Amisi Makutano, cadre de l'Union pour la démocratie et le progrès social, l'UDPS, le parti du président Félix Tshisekedi.
"Notre justice fonctionne au rythme de la République démocratique du Congo et toutes ces décisions seront exécutées, tel qu’il est prévu dans les textes qui régissent cette même justice. Je tiens à vous rassurer que le Congo, notre pays, ne va pas revenir sur sa position parce qu'il s'agit d’un tel ou d’un tel. On ne trahit jamais la République et au niveau de la justice, celui qui trahit la République, son sort est connu", insiste Adolphe Amisi Makutano.
Avant la levée du moratoire sur la peine de mort qui courrait depuis 2003, la justice congolaise a prononcé des peines capitales, mais celles-ci ont toujours été commuées en prison à perpétuité.