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"L'objectif des ADF, c'est de créer un califat"

15 octobre 2024

A Beni, dans le Nord-Kivu, dans l'est de la RDC, cela fait dix ans que cette région fait face à des tueries attribuées aux ADF.

DR Kongo | Unruhen in Nord-Kivu
Image : Alexis Huguet/AFP/Getty Images

Cet article a été actualisé le mardi 15 octobre à 19:32

A l'initiative de la société civile, des mouvements citoyens, des confessions religieuses et des chefs coutumiers, la journée de ce mardi 15 octobre a étésans activités dans la ville de Beni. Les différents rapports des structures de la société civile locale estiment qu'au moins 8.000 personnes ont été tuées, depuis dix ans dans la région. 

Le gouvernement congolais attribue ces tueries essentiellement à la rébellion des forces démocratiques alliées, les ADF, une rébellion d'origine ougandaise, mais très active dans l'est de la RDC

Une marche est ainsi partie de la mairie de Beni où étaient réunis, dans la matinée, des centaines d’habitants. Une journée sans activités décrétée à l’initiative de la société civile, des mouvements citoyens et des confessions religieuses.  

La marche s’est terminée au stade du quartier Ngadi, où un culte avait été prévu. Cet endroit n’a pas été choisi par hasard : c’est en effet ce quartier qui a subi la première attaque des Forces démocratiques alliées dans la ville, le 15 octobre 2014. 

"C'était le début de l'horreur"

Dévote Majimoto a vécu cette première attaque au quartier Ngadi. Elle fait partie de ces habitants qui ont pourtant choisi de rester. Dix ans plus tard, elle se souvient de l’horreur et de la terreur qui ont accompagné ces premières tueries. 

"C’était vers 19 heures que nous avions entendu des coups de feu, explique Dévote Majimoto. On ne savait pas de quoi il était question… Quelques minutes après, une femme blessée s’est réfugiée dans ma maison, on venait de tuer son mari. Le lendemain matin, on a découvert beaucoup de corps par terre. Je n’avais jamais vu une personne décapitée à la machette… C’était le début de l’horreur. De nombreuses personnes ont fui ce jour-là"

Ecoutez le reportage à Beni...

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Neema Kavira a perdu plusieurs proches, tués par les ADF à Beni. Ce mardi 15 octobre, elle était dans la marche et au culte pour les honorer.  

Pour elle, "cela valait la peine que je sois là, parce que c’est pour honorer la mémoire de tous nos frères et sœurs qui ont été méchamment massacrés. Dix ans, c’est beaucoup. Nous continuons à dire à notre gouvernement de fournir beaucoup plus d’efforts, il y a beaucoup de déplacés, des personnes disparues. La communauté internationale ne doit pas nous oublier parce que nous aussi, nous avons le droit de vivre".  Un mémorial sera construit à Beni en mémoire de toutes ces victimes. 

Qui sont en réalité les ADF ? Quel est leur objectif et ont-ils un soutien au niveau régional ou international ?  

Lisez ou écoutez la réponse de Nicaise Kibel'Bel Oka, journaliste d'investigation et écrivain, spécialiste des questions de défense et de sécurité.  

 

Nicaise Kibel'Bel Oka : Les ADF ont pour origine le Tabligh.Le Tabligh c'est un mouvement islamiste qui est né en Inde dans les années 1920 et ils ont migré vers la Tanzanie, Ouganda, la République démocratique du Congo.

Ils sont d'origine ougandaise, mais aujourd'hui, c'est au moins huit pays qui sont ensemble dans la région de Beni et qui tuent au nom de l'islam, au nom de la charia, au nom de la Sunna du Prophète Mohammed.

"Les civils sont la première cible pour créer la terreur"

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DW : Et quel est leur objectif? Pourquoi s'attaquent-ils aux civils?

Nicaise Kibel'Bel Oka : L'objectif de ceux qu'on appelle ADF, c'est de créer un califat. Cet objectif leur avait été donné par Oussama Ben Laden et Al Zawahiri quand ils étaient à Khartoum, au Soudan.

C'est là que Jamil Mukulu a été formé et il est rentré dans la région de Rwenzori pour essayer de créer un califat, c'est à dire un Etat islamique.

Ils s'attaquent aux civils parce qu'en fait, les civils sont la première cible pour créer la terreur et pour appeler les civils à adhérer à leur idéologie.

DW : Alors ont-ils un soutien au niveau régional ou international ?

Nicaise Kibel'Bel Oka : Au départ, un groupe ougandais est arrivé dans l'est de la RDC, notamment dans la région de Beni, Rwenzori et l'Ituri.

Le premier soutien qu'ils ont eu, c'est le soutien de la population locale, parce qu'ils ont épousé dans la population locale.Ils ont organisé du commerce dans la population locale.

Le deuxième soutien aujourd'hui, depuis qu'ils sont devenus province Afrique centrale de l'Etat islamique, ils sont en communion avec Al-sunna de Mozambique. Il y a maintenant des recrutements qui partent du Mozambique, Tanzanie, Kenya, Burundi, Somalie jusqu'au Congo, Ouganda bien sûr aussi. Donc ils ont des soutiens régionaux, mais ils ont aussi le soutien international parce que maintenant qu'ils font partie de Daesh, ils reçoivent naturellement des fonds au niveau de Daesh.

Et surtout, ils reçoivent des instructeurs qui viennent leur apprendre des nouvelles techniques, notamment les embuscades et le maniement des drones.