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L'armée russe : un tigre en papier ?

Georges Ibrahim Tounkara
5 octobre 2022

L'armée russe est en difficultés en Ukraine et Vladimir Poutine a lancé une nouvelle mobilisation dite “partielle”. Mais, que vaut vraiment cette armée ?

Un tank russe T-80-Panzer saisi par des soldats ukrainiens début octobre
L'armée ukrainienne aurait infligé de lourdes pertes ces dernières seamines aux troupes russesImage : Inna Varenytsia/AP/picture alliance

Au fil des décennies, l'armée russe a été présentée comme l'une des plus puissantes du monde. Le pays est aussi bien entendu doté de l'arme nucléaire. Comme pour rappeler cette puissance au monde, le président Vladimir Poutine a souvent assisté à des parades et des exercices militaires dont la tradition remonte à l’époque soviétique. 

Cependant, la puissance d'une armée ne peut être démontrée par des marches rythmées sur la Place Rouge, mais par des actions sur le champ de bataille. Aujourd'hui, les Russes sont confrontés à une armée ukrainienne beaucoup plus faible mais ils essuient des revers et ont dû battre en retraite dans l’est du pays. Comment cela peut-il être possible ? 

L'armée russe compte un million d'hommesImage : Sergei Bobylev/TASS/dpa/picture alliance

Une armée forte en nombre

Sur le papier, les forces armées russes affirment compter un million de soldats. 

Un grand nombre des unités russes déployables ont déjà été utilisées en Ukraine et auraient subi des pertes importantes en termes de soldats tués ou blessés. Une armée forte en nombre

Le nombre exact de victimes est difficile à déterminer, mais les renseignements américains estiment que la Russie a subi au moins des dizaines de milliers de morts et de blessés. Les estimations basses parlent de 15.000 soldats tués. 

Une armée surestimée ?

Selon George Barros, de l'Institute for the Study of War, un groupe de réflexion américain, la tournure prise par la guerre prouve que le monde a longtemps surestimé la force de l'armée russe.  

Selon lui, le but de la récente mobilisation partielle de Poutine vise à maintenir la ligne de front actuelle après toutes les pertes subies. 

L'armée ukrainienne entend se battre jusqu'au bout pour protéger le territoire ukrainienImage : Carlos Barria/REUTERS

Les réservistes doivent être formés et équipés avant d'être déployés à la guerre, a expliqué Georges Barros. Or, beaucoup ne recevront désormais qu'un ou deux mois de formation, ce qui est loin d'être suffisant.  

D'autres sont même envoyés sur les lignes de front sans aucune formation ni équipement, a-t-il ajouté, précisant que la seule chose que ces conditions sont susceptibles d'accomplir est d'augmenter le nombre de victimes.

Un avis que partage Florence Gaub  directrice adjointe de l'Institut d'études de sécurité de l'UE.

"La Russie est bien sûr beaucoup plus forte en ce qui concerne l'armée de l'air et tout ce qui concerne la marine”, ajoute George Barros. “Et l'Ukraine est beaucoup plus forte avec le commandement, peut-être aussi avec le matériel de renseignement. Je viens de voir une photo. On y voit plein de soldats, c'est Vladivostok. Et ces soldats sont en route pour la guerre. On dit qu'ils doivent être formés. Et de toutes façons, ce ne sont que des réservistes. Quelles sont les chances de ces soldats dans cette guerre ? Ils ont une bonne ou une mauvaise chance de tomber relativement vite, parce qu'ils ne savent pas exactement ce qu'ils font. C'est sans doute pour cela que le chiffre impressionnant de 300.000 a été retenu", estime la chercheuse.

L'appel à la mobilisation partielle pousse des milliers de personnes à fuir la RussieImage : AP/picture alliance

Mobilisation partielle

Pour échapper à cette mobilisation, de nombreux Russes ont déjà fui le pays, notamment pour la Biélorussie. Dans ce pays, les agences immobilières et les propriétaires d'appartements sont souvent les premiers à rencontrer ces Russes qui ont fui. 

Aljona vit à Minsk et possède plusieurs appartements. Selon elle, l'afflux de Russes est désormais très important. "Ce ne sont pas des milliers ou des dizaines de milliers qui arrivent ici, mais la demande est déjà énorme", dit-elle.  

Ce sont surtout les jeunes hommes qui ne veulent apparemment pas partir à la guerre, qui s'intéressent aux appartements 

Les prix des loyers ont nettement augmenté ces derniers jours, et pas seulement dans le centre de Minsk. "Même en périphérie, il est difficile de trouver un appartement à moins de 100 roubles biélorusses (environ 40 euros) par jour", raconte-t-elle. 

Face aux revers subis par son armée en Ukraine, Vladmir Poutine n'exclut pas l'utilisation d'autres armes Image : Grigory Sysoyev/Kremlin/Sputnik/REUTERS

Sergei, originaire de Moscou, a opté pour un appartement dans la ville de Molodetchno, à 70 kilomètres de Minsk. "J'ai pris le train pour la Biélorussie cinq jours après l'ordre de mobilisation. Je n'ai moi-même reçu aucune notification, mais de nombreux collègues et connaissances ont déjà dû se rendre au bureau de conscription", raconte cet homme qui n'a jamais servi dans l'armée russe.  

L'homme de 32 ans ne voulait pas, comme il le dit, forcer le destin et s'est rapidement mis en route. 

Sergei ne sait pas encore combien de temps il restera en Biélorussie. "J'ai convenu avec ma logeuse que je resterais quelques jours et que je paierais tous les jours. Je l'ai déjà prévenue que mes amis pourraient me rejoindre. Elle n'y voit pas d'inconvénient. 

Georges Ibrahim Tounkara Journaliste au programme francophone de la Deutsche Welle